Les chaudières à gaz naturel, déjà progressivement interdites dans les bâtiments neufs, sont dans le viseur du Gouvernement. Selon la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), après le fioul, l'installation de nouvelles chaudières à gaz fossile pourrait être interdite à partir de 2026, a évoqué la Première ministre, auprès d'organisations patronales, après avoir présenté, le 22 mai, son plan national de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Interrogé sur RMC, le 25 mai, Olivier Klein, ministre du Logement, a confirmé l'éventualité d'un tel calendrier : « On regarde pour ralentir d'abord l'installation de nouvelles chaudières. Et 2026 me paraît une date tenable. »
Après la fin de l'installation de nouvelles chaudières au fioul, effective depuis le 1er juillet 2022, se dessine donc un projet similaire pour les chaudières à gaz, qui fait désormais l'objet d'une concertation publique en ligne, lancée jusqu'au 28 juillet par le Gouvernement.
L'idée serait d'étendre ce qui s'applique déjà aux maisons individuelles neuves, dans lesquelles l'installation de nouvelles chaudières à gaz est interdite depuis janvier 2022 par la réglementation environnementale RE 2020. Celle-ci promeut en particulier, comme alternative, les pompes à chaleur aérothermiques et géothermiques ou les réseaux de chaleur. À partir de 2025, cette interdiction concernera aussi les logements collectifs neufs, date à laquelle seules des solutions hybrides électricité-gaz seront autorisées.
Un quart de chaudières à gaz en moins en 2030
« Le secteur du bâtiment a un rôle déterminant à jouer pour atteindre nos objectifs climatiques d'ici à 2030, puis en 2050. Ainsi, les émissions de gaz à effet de serre du secteur sont de 75 MtCO2 en 2021 et ces émissions devront baisser d'environ 45 MtCO2 pour atteindre 30 MtCO2 en 2030. Cela implique de réduire drastiquement les émissions liées au fioul et celles liées au gaz en accélérant le remplacement des chaudières au gaz comme fioul et l'isolation des logements », expliquent les ministères des Transitions écologique, énergétique et du Logement.
Révision réglementaire et suppression d'aides pour éliminer le gaz
Le Gouvernement propose de réviser le décret du 5 janvier 2022 qui interdit l'installation de nouvelles chaudières au fioul afin d'y bannir aussi celles 100 % au gaz et au GPL. Ce décret fixe un seuil CO2 de 300 gCO2/kWh pour l'installation de nouveaux systèmes de chauffage, ce qui interdit l'installation de nouvelles chaudières au fioul depuis le 1er juillet 2022. « Ce seuil pourrait être abaissé à 150 gCO2/kWh, ce qui permettrait d'interdire l'installation de nouvelles chaudières à gaz naturel et au GPL. Les enjeux étant différents selon les types de bâtiments et les systèmes de chauffage, un calendrier progressif, par type de bâtiments, pourrait être envisagé. »
S'ajoute, depuis le 1er janvier 2023, la suppression des aides MaPrimeRénov' pour l'installation de chaudières à gaz, y compris celles à très haute performance énergétique (THPE). Il est aussi proposé de supprimer les soutiens à l'installation de nouvelles chaudières fossiles dans le bâtiment, via MaPrimeRénov' Sérénité et les certificats d'économies d'énergie (CEE), en supprimant les fiches concernées et en interdisant l'installation de ces chaudières dans les fiches « Rénovation globale ». En cohérence avec le durcissement des règles d'éligibilité aux aides publiques et privées, le taux réduit de TVA à 5,5 % pour la pose et l'installation de chaudières fossiles cesserait aussi en 2024 et serait aligné sur le taux de référence de 20 %. « S'agissant du taux applicable à l'entretien des chaudières fossiles, il est proposé de conserver un taux réduit dans la mesure où ces actions contribuent au maintien de l'efficacité énergétique du système », suggère aussi le Gouvernement.
Le biogaz et les pompes à chaleur hybrides autorisés
Outre les pompes à chaleur hybrides qui resteront autorisées, le Gouvernement n'exclut pas le recours au biogaz. Il prévoit la substitution de 15 % du gaz naturel par du biométhane dans le réseau de distribution en 2030, « hypothèse ambitieuse mais crédible qui réduirait les émissions de gaz résiduelles ». Le passage de certains logements ou bâtiments au biogaz est aussi envisagé sous réserve de la disponibilité de la biomasse permettant de le produire.
Levier de boucliers des acteurs du secteur
Bannir les chaudières à gaz a fait bondir les acteurs du secteur, qui jugent cette interdiction trop contraignante. D'autant que 12 millions de ménages français se chauffent actuellement au gaz, soit 40 % d'entre eux. Or, pour les particuliers, installer une pompe à chaleur (PAC), par exemple, coûte en moyenne 10 000 euros de plus qu'une chaudière à gaz performante, souligne l'association professionnelle Coénove. Autre difficulté, l'installation d'un autre système de chauffage n'est pas toujours compatible avec le logement. « Le recours à des solutions de remplacement des chaudières à gaz par des PAC électriques n'est pas possible dans tous les cas de figure et va se heurter à de nombreuses contraintes techniques et réglementaires, y compris en maisons individuelles », ajoute Coénove.
Du côté des acteurs du bâtiment, la Capeb constate néanmoins, « avec satisfaction, que le Gouvernement est prêt à entendre les propositions des acteurs de la filière, en lançant une concertation, et appelle à privilégier le biogaz plutôt que de changer les chaudières ».
Les résultats de la concertation seront restitués à l'automne.