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AccueilJean-Yves BurgyTraçabilité des déchets : de l'obligation réglementaire au calcul des taux de valorisation

Traçabilité des déchets : de l'obligation réglementaire au calcul des taux de valorisation

Jean-Yves Burgy, dirigeant et fondateur de la société RECOVERING, dresse un bilan de l'organisation documentaire liée à la traçabilité des déchets : ses progrès, ses failles et les conséquences en matière de fiabilité des informations délivrées.

Publié le 10/11/2013

La traçabilité des déchets est devenue depuis quelques années un sujet de première importance. Aussi, la mise en place d'une organisation documentaire permettant de tracer le déchet de son détenteur primaire à l'exutoire final devrait apporter la preuve que celui-ci a été traité dans les règles de l'art et qu'il a bien été orienté vers l'exutoire adéquat. Or, un certain nombre d'écueils ne permettent pas d'atteindre cet objectif, rendant hypothétique un suivi précis des différentes filières de valorisation.

Les obligations réglementaires ou contractuelles

Les bordereaux de suivi de déchets ne sont obligatoires que pour les déchets dangereux et pour les déchets amiantés. Le BSDD, respectivement le BSDA, permet aujourd'hui de tracer le déchet car il doit être renseigné par tous les intermédiaires. Il comporte toutes les indications sur la provenance des déchets, leurs caractéristiques, les modalités de collecte, de transport et d'entreposage, l'identité des entreprises concernées et la destination des déchets. Les bordereaux doivent être conservés 5 ans par le producteur et 3 ans par les collecteurs et transporteurs.

Dans le cas des déchets non dangereux ou des déchets inertes, les bordereaux de suivi de déchets peuvent être exigés notamment par certains producteurs de matériaux qui, souhaitant s'assurer de la bonne provenance des déchets, ont inclus dans leurs contrats d'approvisionnement un article sur la traçabilité ce qui leur facilite par ailleurs la tenue de leur registre déchets.

En effet l'arrêté du 29 février 2012 fixe le contenu des registres qu'ont obligation de tenir l'ensemble des parties tout au long de la chaîne de valeur du déchet, en l'occurrence les exploitants des établissements produisant ou expédiant des déchets, les collecteurs, les transporteurs, les négociants et les exploitants des installations de transit, de regroupement ou de traitement de déchets. Une seule et même partie peut être concernée par la tenue de plusieurs registres si ses activités sont multiples et leur contenu varie d'un cas à l'autre.

Les nombreuses informations exigées permettent donc d'avoir une véritable cartographie des flux au niveau d'une entité. Une nouveauté y est introduite qui est la qualification du traitement final vis-à-vis de la hiérarchie des modes de traitement définie à l'article L. 541-1 du code de l'environnement.

Un système encore peu déployé et imparfait

La mise en place des registres est un progrès qui ne peut être contesté. Si celui-ci est maintenant largement utilisé par les plateformes de gestion de déchets et les exutoires finaux, il n'en va pas de même pour les établissements. Certes quelques grandes entreprises industrielles l'ont ou sont sur le point de le mettre en place parfois avec l'aide de leur prestataire de déchets, mais la majorité des PME n'ont la plupart du temps pas connaissance de cette mesure réglementaire. Dans le bâtiment, il en va de même, la maîtrise d'ouvrage et d'œuvre ignorant ces obligations.

Néanmoins plusieurs points se doivent d'être améliorés car le dispositif présente quelques difficultés et écueils. Le premier point est la détermination du code de l'opération et de la qualification des opérations. Quatre types de qualifications respectant la hiérarchie des exutoires (Cf. Directive Cadre Déchet 2008/98/CE) sont proposés. On trouve au bas de l'échelle l'élimination, puis la valorisation, puis le recyclage et enfin la préparation en vue du réemploi. Le code et la qualification sont choisis par l'établissement mais des erreurs volontaires ou non sont possibles pour gonfler artificiellement son bilan en termes de valorisation de plus en plus exigé par les clients.

Le second point critique qu'il reste à résoudre est la rupture de la chaîne d'information. Les registres sont tenus de manière manuelle ou de manière informatique. Avec un simple tableur, il est possible de développer son « système maison » mais il existe des logiciels de gestion de déchets plus coûteux qui ont des modules permettant d'éditer à partir des données d'entrée un véritable registre en bonne et due forme. Il n'en reste pas moins que ces systèmes d'informations ne sont pas interconnectés ce qui empêche de suivre le déchet non dangereux jusqu'à son exutoire final.

Au-delà du suivi, la vérification et la réconciliation des tonnages ne sont pas possibles car cela nécessiterait un travail titanesque. Il serait donc pertinent d'avoir un système centralisant en temps réel l'ensemble des informations à l'instar de ce qui devrait être mis en place au Royaume-Uni dès le début 2014. L'enregistrement en ligne des flux de déchets a des avantages indéniables pour les utilisateurs : qualité des informations, rapidité et facilité d'utilisation. Il a aussi des bénéfices pour les services en charge de la quantification des déchets et de la planification avec des possibilités de travailler aussi bien au niveau local que national. Enfin il permet de faire l'économie de millions de bordereaux de suivi sous forme papier qui sont encore utilisés à ce jour.

Fiabilité du calcul du taux de valorisation

Les difficultés évoquées ci-dessus soulèvent un certain nombre d'interrogations par rapport à la fiabilité du taux de valorisation de déchets affiché par les opérateurs économiques. Si pour certains déchets mono matériaux bien identifiés, le suivi semble possible, il n'en va pas de même pour les déchets en mélange qui représentent la majorité des déchets industriels et du bâtiment. Dans le schéma actuel, on ne peut y accorder qu'une crédibilité limitée sauf dans le cadre d'une démarche très structurée.

Au-delà de cela, se pose la question de la pertinence d'un taux de valorisation global. En effet additionner des tonnages dont la destination finale n'est pas de nature identique pourrait s'assimiler à une hérésie scientifique. La valorisation énergétique, la valorisation matière, le réemploi ou le recyclage ne sont pas de même nature et non pas les mêmes impacts sur l'environnement. Un certains nombre d'acteurs économiques pourraient souhaiter faire leur choix et faire évoluer le mix des valorisations utilisées. En effet, considérer l'incinération des déchets comme de la valorisation au-delà d'un certain rendement énergétique reste discutable car l'objet premier de l'incinération reste dans tous les cas de réduire le volume de déchets et les impacts environnementaux en termes d'émission de CO2 sont importants. On peut lui préférer la valorisation matière. Cette faible  transparence mène donc à un manque d'analyse critique sur la manière dont les déchets sont gérés.

Sous réserve d'un système garantissant la traçabilité, il serait donc plus pertinent d'afficher un ensemble de taux : taux de recyclage, taux de réemploi, taux de valorisation énergétique, taux de valorisation matière. A défaut il paraît plus cohérent d'afficher uniquement son taux d'élimination, mais la communication ne se ferait pas de manière aussi positive.

Avis d'expert proposé par Jean-Yves Burgy, dirigeant et fondateur de la société RECOVERING

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3 Commentaires

Midgesse

Le 22/11/2013 à 15h29

Vaste sujet s'il en est d'où mes nombreux commentaires :
- La réglementation et l'application des règles : cela ajoute un temps de traitement très important pour l'enemble des acteurs et donc un coût non négligeable (pointer les camions, prendre les bons, les enregistrer,...) au chantier. Ce qui expliquerait pour partie la faible application de ce système dans les PME
- la notion de "temps de décision" qui est différente entre un donneur d'ordre ou une administration et le conducteur de travaux sur son chantier. On parle en mois pour les premiers et en heures pour les 2nds. Faire appliquer une règle quand votre dossier prend quelques semaines, c'est déjà plus simple que lorsque vous êtes sur chantier et que vous devez résoudre un problème dans la matinée pour que votre chantier ne prenne pas de retard vs les pénalités. Ce qui pourrait aussi expliquer ke faible deploiement de la réglementation
- l'implication des donneurs d'ordre pour payer "réellement" les évacuations des déchets : les entreprises se retrouvent souvent seules face à ce problème car le donneur d'ordre ne veut pas en entendre parler (coût supplem...) : quid de la bonne application de la réglementation dans ce cas ?
- la demande de prévision annuelle de déchets faite aux entreprises du BTP par les centres de réception des déchets : à part avec une boule de cristal je ne vois pas comment dans le BTP on peut prévoir 1 an à l'avance étant donné que les contrats ne sont pas encore signé = fiabilité des prévisions ?

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Midgesse

Le 22/11/2013 à 15h45

Vaste sujet s'il en est d'où mes nombreux commentaires :
- La réglementation et l'application des règles : cela ajoute un temps de traitement très important pour l'enemble des acteurs et donc un coût non négligeable (pointer les camions, prendre les bons, les enregistrer,...) au chantier. Ce qui expliquerait pour partie la faible application de ce système dans les PME
- la notion de "temps de décision" qui est différente entre un donneur d'ordre ou une administration et le conducteur de travaux sur son chantier. On parle en mois pour les premiers et en heures pour les 2nds. Faire appliquer une règle quand votre dossier prend quelques semaines, c'est déjà plus simple que lorsque vous êtes sur chantier et que vous devez résoudre un problème dans la matinée pour que votre chantier ne prenne pas de retard vs les pénalités. Ce qui pourrait aussi expliquer ke faible deploiement de la réglementation
- l'implication des donneurs d'ordre pour payer "réellement" les évacuations des déchets : les entreprises se retrouvent souvent seules face à ce problème car le donneur d'ordre ne veut pas en entendre parler (coût supplem...) : quid de la bonne application de la réglementation dans ce cas ?
- la demande de prévision annuelle de déchets faite aux entreprises du BTP par les centres de réception des déchets : à part avec une boule de cristal je ne vois pas comment dans le BTP on peut prévoir 1 an à l'avance étant donné que les contrats ne sont pas encore signé = fiabilité des prévisions ?

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Manon

Le 25/07/2014 à 16h45

Qu'en est-il du Royaume Unis et de la centralisation des informations? Par avance merci de votre réponse.

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