
Ces industries considérées comme exposées à un risque élevé de fuites de carbone (délocalisation des productions dans des pays non soumis à une contrainte sur le CO2) seront donc privilégiées par rapport aux autres secteurs qui devront acheter leurs quotas. Rappelons que jusqu'à maintenant les quotas étaient attribués gratuitement quelque soit le secteur d'activité. Avec cette décision européenne, 164 secteurs seront exonérés : la fabrication de panneaux de bois, l'horlogerie, la fabrication d'appareils électroménagers en passant par l'industrie des fourrures, la production de vin, l'extraction de pétrole et de gaz ou encore la métallurgie et les cimenteries.
Pour établir cette liste la Commission européenne a utilisé plusieurs critères et a notamment sélectionné les secteurs pour lesquels la mise aux enchères des quotas engendrerait une hausse des coûts de production de plus de 30%. Autrement dit les secteurs qui devront acheter un grosse quantité de quotas.
Exonérer l'Europe ou taxer l'extra-européen ?
Avec ce système, l'Union européenne a donc choisi l'exonération mais certains Etats membres commencent à réfléchir à inverser le dispositif en taxant plus fortement l'importation de produits provenant de pays où la contrainte carbone est moins forte. Le Sénat français notamment prône la mise en place d'un mécanisme d'inclusion carbone aux frontières européennes. ''Les quotas gratuits sont autant de recettes en moins pour les Etats alors que ces recettes doivent servir pour au moins 50 % à lutter contre le réchauffement climatique'', a expliqué la sénatrice Fabienne Keller en novembre dernier à l'occasion de l'adoption d'une résolution du Sénat. Selon elle, la liste des secteurs exonérés revient à écarter 50% des émissions industrielles.
Ce mécanisme d'inclusion carbone aux frontières consisterait à intégrer dans le marché du carbone les produits fabriqués en dehors de l'Union européenne et relevant des secteurs exposés à des risques de délocalisation. Par exemple, les importateurs d'acier devraient acquérir des quotas dans une proportion correspondant au contenu carbone des produits importés. Pour la sénatrice, ce MIC permettrait à l'Europe de rétablir une concurrence loyale et d'inciter les entreprises extra-européennes non soumises à une contrainte carbone dans leur pays à réduire leurs émissions.
Michel Rocard, co-président de la commission chargée de préparer le dispositif de taxe carbone française plaide quant à lui pour une suppression du système d'échange de quotas et l'instauration d'une taxe carbone généralisée : ''je suis favorable à l'abandon de l'ETS qui marche mal pour lui substituer une taxation'', déclarait-il devant les députés en septembre 2009.
Suite à l'échec de Copenhague, cette taxe carbone aux frontières va sans doute revenir dans les débats. La Suède avait d'ailleurs fait une proposition sur le sujet pendant sa présidence en juillet 2009. Mais à l'heure actuelle, les Etats soutenant le principe de l'instauration d'un tel mécanisme ne sont pas majoritaires. Et ce sera sans compter sur les réticences des pays émergents.