Suite à l'échec de la commission mixte paritaire le 10 juillet dernier, les députés ont repris l'étude du projet de loi agricole. Les travaux en commission des affaires économiques sont l'occasion de réintégrer dans le texte les nombreux éléments supprimés par les sénateurs, en attendant le vote final en septembre prochain.
L'Assemblée nationale a ainsi rétabli l'interdiction pour les vendeurs de pesticides et de biocides d'offrir des ristournes, rabais et échantillons gratuits. Comme pour les pesticides, les biocides les plus préoccupants seront interdits à la vente en libre-service et ne pourront pas faire l'objet de publicité. Les députés ont aussi réécrit le paragraphe interdisant les substances actives présentant des modes d'action identiques à ceux des néonicotinoïdes. Le Gouvernement a également réécrit la partie concernant la séparation de la vente et du conseil et réaffirme sa volonté d'aller jusqu'au bout de la démarche.
Une protection des riverains via une charte
Alors que le Sénat n'avait pas voulu voter de mesures de protection des riverains, l'Assemblée nationale a validé une proposition du Gouvernement en la matière. Cette protection prendra la forme d'une... charte d'engagement entre utilisateurs de pesticides et personnes exposées. Comme il le martèle depuis plusieurs mois, le gouvernement veut "privilégier la mise en place de mesures prises par les utilisateurs". Cette idée de charte fait d'ailleurs partie du contrat de solutions présenté dernièrement par la FNSEA et 40 partenaires agricoles.
Une mesure loin de convenir à l'association Générations futures : "Nos organisations ne sauraient se satisfaire de déclarations d'intention, de documents qui ne fixeraient pas des obligations de suivis et de résultats, explique-t-elle dans un courrier adressé aux ministres de la Santé, de l'Agriculture, de l'Environnement et de la Recherche. Elles ne sauraient se satisfaire de vagues recommandations qui pourraient être formulées dans le cadre des discussions nationales et dont la mise en œuvre serait laissée à discrétion des acteurs locaux. Un cadre contraignant, national, est nécessaire et doit être ambitieux, fait de mesures efficaces, et ce afin de répondre aux enjeux de santé publique que recouvre ce dossier."
Un nouveau rapport sur le fonds d'indemnisation des victimes des pesticides
Sur d'autres sujets, les avancées des sénateurs n'ont en revanche pas été retenues. Ainsi, la création d'un fonds d'indemnisation pour les professionnels agricoles malades à cause des pesticides a été supprimée et remplacée par... la rédaction d'un rapport sur le financement d'un tel fonds. Un revirement qui pousse l'association Phyto-victimes à parler de "maltraitance envers les victimes des pesticides".
Pour la sénatrice Nicole Bonnefoy (socialiste), à l'origine de l'avancée du Sénat en la matière, le ministre de l'Agriculture fait preuve d'une "mauvaise foi patente". "Il est stupéfiant que le ministre réfute aujourd'hui la création d'un tel fonds au motif d'une rupture d'égalité entre les professionnels et les « riverains et les jardiniers amateurs », alors que c'est le Ministre lui-même qui avait souhaité en réduire le périmètre aux seules victimes professionnelles !", s'indigne la sénatrice qui rappelle que de nombreux rapports ont déjà été produits à ce sujet.
Le retour du bio et des carafes d'eau dans les cantines
Les députés ont, par ailleurs, réintégré le droit à expérimenter l'interdiction des contenants alimentaires en matière plastique dans les cantines scolaires. De même, les objectifs de 50% de produits de qualité dont 20% de produits bio dans la restauration collective d'ici 2022 réapparaissent. Tout comme la fin de l'utilisation de bouteilles d'eau en plastique. Un élément du Sénat vient compléter ce chapitre : l'interdiction des pailles et des touillettes en plastique dès 2019. Pour rappel, la Commission européenne envisage d'interdire ces produits dès 2021.