Ce vendredi 10 octobre 2014, les députés ont adopté les deux articles du titre I du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Après huit séances complètes dédiées aux grands objectifs de la transition énergétique, il ne reste que quatre séances pour débattre de la soixantaine d'articles restant.
Les débats ont été marqués par l'interminable discussion de l'article 1er qui fixe notamment la part du nucléaire dans la production électrique à l'horizon 2025. Au tout début de la 9ème discussion en séance publique, la présidente de séance, Sandrine Mazetier (SRC, Paris) a interrompu Michel Sordi (UMP, Haut-Rhin) en expliquant que son groupe avait épuisé les 12h25 de temps de parole qui lui avait été attribuées dans le cadre de la procédure du temps législatif programmé.
Amendements fondateurs
Si le choix de l'opposition de discuter longuement l'article 1er a été qualifié d'obstruction par la majorité parlementaire, on peut toutefois noter qu'il a permis à celle-ci de détailler longuement son point de vue sur la place à accorder au nucléaire dans le mix électrique français.
En l'occurrence, sur l'ensemble du projet de loi, l'UMP défendait une dizaine d'"amendements fondateurs", c'est-à-dire des "amendements [qu'elle juge] extrêmement importants, ou clivants, et qui motiveront évidemment [son] vote sur ce texte", a expliqué Julien Aubert (UMP, Vaucluse). Parmi ceux-ci figurait un amendement à l'alinéa 28 de l'article 1er qui stipule que la politique énergétique a pour objectif de "réduire la part du nucléaire dans la production d'électricité à 50% à l'horizon 2025". L'UMP souhaite de son côté que la politique énergétique permette de "stabiliser le potentiel nucléaire français en mettant en œuvre des programmes de renouvellement des centrales existantes et en allongeant leur durée d'activité".
De prime abord, l'amendement semble suggérer un maintien de la part du nucléaire dans la production énergétique. Néanmoins, les orateurs UMP ont insisté sur l'expression "potentiel nucléaire". Cet amendement "vise à substituer à la réflexion capacitaire la notion de potentiel nucléaire", a expliqué Julien Aubert, développant deux aspects : une possible censure du Conseil constitutionnel
Réduire la part du nucléaire ? Peu d'opposition dans l'hémicycle
En clair, l'UMP estime qu'il convient de "réfléchir à ce que nous voulons faire de [l'héritage "nucléaire"]". Et pour Julien Aubert, "il y aura vraisemblablement une réduction de la part qu'il représente dans l'électricité". Cette réduction doit se faire "[sans] démembrer un fleuron de l'industrie française [et en encourageant] les filières d'exportation" et en fonction des progrès réalisés en matière d'énergies renouvelables.
En synthèse, Julien Aubert, qui a été le député UMP le plus prolixe, admet que "certes, ce trésor [le nucléaire, ndlr] correspond à une époque et sera amené à se réduire dans la part de la production d'électricité, néanmoins, il faut faire attention et avancer avec précaution". Ces propos reprennent les grandes lignes qu'il avait déjà défendues en commission spéciale : ce qui gêne le chef de fil de l'UMP sur ce projet de loi est moins la réduction de la part du nucléaire que le calendrier proposé par le gouvernement. Julien Aubert estime d'ailleurs qu'"il aurait été intéressant pour nous de discuter ici de l'avenir du parc [y compris de] quelle partie (…) abandonner".
Michel Sordi, qui a défendu becs et ongles la centrale de Fessenheim, ne dit pas autre chose : "Nous sommes tous d'accord ici pour défendre les énergies renouvelables. Je pense simplement que cette réduction de la part du nucléaire se produira d'elle-même, si ce n'est en 2025, du moins en 2035, sans que nous devions réduire notre capacité de production annuelle". L'UDI, si elle clame par la voix de Charles de Courson, qu'elle abrogera cette disposition dès son retour au pouvoir, défend elle aussi une solution "pragmatique" de réduction du nucléaire "en fonction d'un ensemble de critères, comme l'évolution de la structure de la demande, de l'offre, des prix et des caractéristiques techniques".
Un point de vue que partage aussi, dans l'ensemble, André Chassaigne. Le député communiste du Puy-de-Dôme a ainsi expliqué : "les députés du Front de gauche ne sont pas a priori opposés à une réduction de la production d'énergie nucléaire. Ce que je conteste, c'est la fixation d'une date que je trouve arbitraire". Et de préciser, "par ailleurs, le chiffre de 50% me semble tout aussi arbitraire. Ce sont ces deux éléments que j'ai remis en cause".
L'affichage environnemental au service des économies d'énergie
En dehors du nucléaire, les débats portant sur la fin de l'article 1er et l'article 2 n'ont pas donné lieu à de profondes modifications du texte par rapport à son passage en commission spéciale.
A l'article 2, le "[soutien] à la croissance verte par le développement et le déploiement de processus sobres en émissions de gaz à effet de serre, par la maîtrise de la consommation d'énergie et de matières, ainsi que par l'économie circulaire, dans l'ensemble des secteurs de l'économie" est précisé. La maîtrise de la consommation d'énergie et de matière se fait "par l'information sur l'impact environnemental des biens ou services", ajoute l'amendement adopté en séance publique. L'objectif affiché est de renforcer l'affichage environnemental.
Enfin, l'article 2 prévoit que les politiques publiques "accompagnent les transitions professionnelles". Le texte amendé en séance ajoute qu'elles "veillent [aussi] à garantir un haut niveau de protection sociale et de garanties collectives pour l'ensemble des personnels du secteur de l'énergie, et accompagnent les besoins de formation".