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Actu-Environnement

Les nouvelles perspectives du marché carbone européen

Le marché carbone européen est plein de paradoxes. Il est investi de la mission de préserver le bien public mondial qu'est le climat, mais il n'est pas encore régulé. Il relève d'une multitude d'opérateurs et reste exposé à des risques.

Gouvernance  |    |  A. Sinaï
   
Les nouvelles perspectives du marché carbone européen
© MacX
   
Six mois après l'échec de Copenhague et à mi parcours de sa phase II, quel avenir pour le marché carbone ? s'interrogeaient les participants à une conférence organisée à Paris le 30 juin par Premier Cercle, en association avec The Wall Street Journal Europe, sur les perspectives du marché carbone. Sa phase III s'ouvrira en 2013 à l'échelle des 27 membres de l'Union européenne. Sera-t-il alors un îlot dans un monde dénué d'équivalent ? Ce n'est pas impossible. Si des marchés carbone apparaissent ici et là, rares sont les Etats à s'y lancer, hormis la Corée du Sud, le Japon, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Leur échelle n'équivaut pas à celle de l'Europe, seule pour le moment à s'être lancée sur un marché d'une telle ampleur, en l'absence des Etats-Unis, dont le Sénat tarde à faire passer la loi sur le climat et l'énergie.

Malgré l'absence de perspective d'un marché carbone unifié à l'échelle de la majorité des pays industrialisés en raison des difficultés d'application du protocole de Kyoto, l'Union européenne poursuit sa propre stratégie de lutte contre le changement climatique. La phase III de son marché carbone devrait aussi en être la consolidation. Lancée en 2005, la période d'essai du marché carbone européen (2005-2007) a été marquée par une phase de surallocation de quotas de la part des Etats vers leurs industries nationales. Puis le marché carbone européen est entré en phase II en 2008, date de l'entrée en vigueur du Protocole de Kyoto, qui expirera en 2012. Cette phase II a démarré sous l'égide de la crise financière, qui a contribué à la dévaluation des actifs carbone, qui ont oscillé entre 29 € et 8 € la tonne.

La phase III va marquer un tournant. En termes d'objectifs de réduction des GES d'abord. De fait, le marché carbone européen devra contribuer à la réduction de 20% des émissions européennes d'ici à 2020 (par rapport à 1990), conformément aux objectifs fixés par le « Paquet » énergie-climat adopté en décembre 2009. En outre, 2013 sera l'année du passage à la mise aux enchères des quotas de CO2. Comme le souligne Anaïs Delbosc, chef de projet recherche à la CDC Climat, '' le souci d'harmonisation se concrétise en phase III avec un processus centralisé au niveau européen, qui fait la part belle à une allocation de quotas par enchères ''.

Donner un statut juridique au quota

Restent les incertitudes. Les industriels assujettis au système européen des quotas (ETS) attendent des règles assez claires sur le volume des quotas distribués. '' Ce qui pose problème aux industriels, c'est la volatilité des prix. La dynamique des prix s'inscrit dans un cadre qui nécessite une vision stable. Une usine, c'est un investissement de 150 à 400 millions d'euros, et deux ans de chantier '', rappelle Stéphane Solère, directeur de la gestion des risques de marchés chez Lafarge. De même Alexandre Marry, de chez EDF Trading, s'inquiète de l'éventualité du passage de l'objectif européen de – 20 à -30% de réduction d'émissions de GES d'ici 2020 : '' Il y a là un risque réglementaire fort qu'on ne sait pas gérer ''.

Du côté des crédits Kyoto, l'avenir n'est pas plus clair : après 2012, aucun crédit relevant du MDP (Mécanisme de développement propre) n'offre de garantie quant à son éligibilité. En l'absence de reconduction d'un instrument juridique international, le marché des crédits risque de se fragmenter et les acteurs peuvent perdre confiance. Les grands industriels tels que les cimentiers ont besoin de temps pour observer l'évolution du mécanisme MDP et attendent que les CER (Certificats de réduction d'émissions issus du MDP) prennent de la valeur.

Dans un rapport d'avril 2010 sur la régulation des marchés du CO2, l'inspecteur général des finances honoraire Michel Prada, ancien Président de la Commission pour la régulation des marchés du CO2, faisait part d'un certain nombre de recommandations : exclure une qualification des quotas en instruments financiers et prévoir une régulation du marché européen du CO2 fondée sur un cadre adapté à ses spécificités, mettre en place un cadre adapté de prévention et de répression des abus de marché, favoriser la coordination internationale sur les marchés du CO21.

Aujourd'hui, Michel Prada constate qu'on ne sait pas de quoi on parle : '' on ne sait pas ce qu'est un quota juridiquement. Le marché est très ouvert. N'importe qui peut ouvrir un compte. Les quotas peuvent devenir une classe d'actifs de hedge funds ''. Les opérateurs qui viennent sur le marché devraient faire l'objet d'une forme modulée selon leur nature : industriels assujettis, gestionnaires pour compte de tiers ou gestionnaires en compte propre. '' Il faudrait définir pour chaque catégorie des conditions d'agrément appropriées '', suggère M. Prada, qui se dit '' frappé, voire inquiet de voir comment les autorités de surpervision ont progressivement perdu le contrôle. L'essentiel se passe ailleurs que sous le lampadaire réglementé '', au point que le marché ETS devient illisible.

La phase III du processus va donner l'opportunité de monter un dispositif de contrôle ab initio de toutes les transactions du marché européen. '' Réglementer le marché SPOT est indispensable '', corrobore Serge Harry, PDG de Bluenext, qui en appelle à la conjonction de cinq acteurs : la Commission européenne, les régulateurs, les bourses, les membres et les registres.

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