Dans son rapport d'activité 2012, le médiateur national de l'énergie Denis Merville a de nouveau appelé le 11 juin à la création d'un "chèque énergie" pour faire face à la montée "inquiétante" de la précarité énergétique en France. Ce chèque énergie serait doté d'un montant d'au moins d'1 milliard d'euros par an et accordé aux bénéficiaires actuels des allocations logement (APL). Il serait financé par la CSPE (électricité) et son équivalent en gaz, la CTSS, propose le médiateur. "Ce montant est à rapprocher des 5 milliards collectés chaque année par la CSPE pour financer le développement des énergies renouvelables (3 Mds d'€), et la péréquation tarifaire dans les zones insulaires (1,4 Md d'€)", recommande-t-il.
Le médiateur rappelle que 8 millions de Français (4 millions de ménages) au moins consacrent plus de 10% de leurs revenus aux dépenses d'énergie. "En 2012, et c'est un chiffre en constante augmentation, près d'une sollicitation du médiateur sur cinq relevait de difficultés de paiement, avec une dette moyenne de 1.900€", précise Denis Merville. La situation en 2013 est "déjà alarmante : le quart des dossiers reçu depuis janvier dernier concerne des difficultés de paiement avec un pic à 34% en mars".
Alors que la loi Brottes sur l'énergie d'avril 2013 a étendu le nombre de bénéficiaires des tarifs sociaux (TPN/TSS) à plus de 4 millions de ménages en situation de précarité énergétique, le médiateur estime que cela "ne sera pas mis en œuvre pour l'hiver 2013-2014 et sans doute 2014-2015, et des millions de ménages précaires qui en ont besoin n'en bénéficieront pas".
"Les tarifs sociaux ne sont pas la meilleure solution", réitère le médiateur de l'énergie. La raison ? "Ils coûtent cher en gestion [moins de 200 millions d'euros par an], parviennent péniblement à toucher la moitié des bénéficiaires potentiels et sont profondément inéquitables car ils ne prennent en compte que le chauffage au gaz naturel. Les trois quarts des ménages qui se chauffent à l'électricité, au fioul, au bois, via des réseaux de chauffages urbains… ne touchent rien pour ce qui constitue leur principal poste de dépense énergétique", explique-t-il en pointant leur ''complexité administrative et logistique''.
Batho promet d'étendre les tarifs sociaux "avant l'hiver prochain"
Les lenteurs administratives et les problèmes techniques rencontrés dans l'automatisation de l'attribution des tarifs sociaux de l'énergie ''ne sont pas acceptables'', a aussitôt répondu la ministre de l'Ecologie et de l'Energie Delphine Batho qui a demandé une mission d'audit à l'Observatoire de la précarité énergétique dont les conclusions sont attendues pour le 15 juillet.
La ministre a également assuré dans un communiqué que depuis le 14 mai dernier, l'attribution des tarifs sociaux est automatique pour toutes les personnes bénéficiant de l'ACS (Assurance Complémentaire Santé), comme prévu par un arrêté du 21 décembre 2012. "70% de l'objectif fixé est désormais atteint. Cependant le croisement des fichiers se heurte à certaines situations particulières (hébergement par un tiers, abonnement et compteur sous un autre nom etc...)", précise-t-elle. L'arrêté du 21 décembre 2012 a ainsi permis d'étendre le bénéfice des tarifs sociaux de l'électricité et du gaz de 1,2 million de foyers à 1,9 millions de foyers, bénéficiant de l'ACS, selon la ministre, contre seulement 600.000 foyers début 2012.
"La décision du gouvernement est claire : c'est que 8 millions de Français puissent bénéficier des tarifs sociaux de l'électricité et du gaz. Ce droit doit être effectif dans les meilleurs délais et en tout état de cause avant l'hiver prochain", a promis Delphine Batho. Le projet de décret en Conseil d'Etat prévu par la loi Brottes "est prêt et sera publié au terme du processus de consultation en cours".