Utilisé de plus en plus fréquemment dans le bâtiment, le BIM, ou Building Information Modeling, permet d'optimiser les étapes précédant la construction autour d'un projet numérisé et partagé. Cette maquette numérique 3D enrichie peut aussi s'appliquer au patrimoine existant. Dans les deux cas, elle faciliterait la communication entre tous les maillons de la chaîne. Et désormais, ce procédé s'intègre aussi aux infrastructures du secteur de l'eau. La Métropole européenne de Lille (MEL) et le Centre d'études et de recherches de l'industrie du béton (Cerib) ont expérimenté l'outil sur plusieurs types d'infrastructures de gestion de l'eau. Ils ont présenté leur retour d'expérience à l'occasion du Carrefour des gestion locales de l'eau, en juin dernier. Détails.
Des projets optimisés
La métropole lilloise a choisi de modéliser trois projets : des travaux sur un réseau d'eau potable, la construction d'un bassin d'orage et l'extension d'une station d'épuration, avec pour chacun d'entre eux des résultats différents. Pour le réseau du boulevard Gambetta, à Tourcoing, le BIM a permis au maître d'ouvrage de collaborer avec les entreprises sélectionnées, notamment dans la conception et la définition des propriétés des canalisations. Pour un site plus important, comme le bassin d'orage de Roncq, le BIM a servi à la compréhension du projet entre maître d'œuvre et maître d'ouvrage et à une bonne coordination entre les composantes de l'ouvrage (du gros-œuvre à l'insertion paysagère) ainsi que la gestion des travaux et la réduction des risques, tout en prenant compte des contraintes d'exploitation.
Enfin, pour les travaux d'extension de la station d'épuration de Wattrelos, le but était de maîtriser l'existant, de gérer le patrimoine et de disposer d'une base solide dès le démarrage du marché public de construction-exploitation-maintenance.
La nécessité d'un langage commun
Reste que pour la réussite du processus, un travail préalable sur la connaissance des infrastructures est nécessaire. Pour le projet de rénovation du réseau d'eau potable, il a ainsi fallu renseigner l'outil sur les propriétés physiques des tuyaux ou des caniveaux hydrauliques. Les dimensions, la résistance, la durée de vie ou encore les certifications sont autant d'informations collectées. Ces données seront ensuite enrichies par les données du maître d'ouvrage exploitant, notamment pour apporter une meilleure visibilité sur le type d'effluent transporté ou sur les conditions de mise en œuvre des ouvrages. Rémi Lannoy, responsable du département construction numérique du Cerib, met en avant « l'analyse fonctionnelle » apportée par le maître d'ouvrage, complétée par « l'analyse d'offre » de l'industriel, « permettant au système numérique de décrire les objets de manière systémique ». Néanmoins, un enjeu peut apparaître comme un frein : la disponibilité des données. En effet, il est difficile d'alimenter et d'enrichir les maquettes si les parties prenantes ne s'impliquent pas totalement.
La Métropole de Lille semble avoir dépassé ces écueils et avoir tiré pleinement bénéfice du BIM. Selon elle, l'un des avantages de l'outil réside surtout dans une communication unifiée entre les acteurs d'un même projet, indépendamment du secteur d'origine. L'enjeu est l'instauration d'un « langage universel » de portée nationale. D'ailleurs, pour la MEL, un des objectifs de ces expérimentations est la standardisation dans un dictionnaire (ou un référentiel) des diverses normes et propriétés, surtout dans le secteur du béton. Pour Rémi Lannoy, « cette expérimentation s'inscrit dans un élan national ». En effet, le plan BIM 2022 a pour but de généraliser cette technologie dans les secteurs de la construction à travers un dictionnaire national. Pour cela, une organisation des filières est nécessaire afin de favoriser une déclinaison sectorielle des normes.