Coût de l'objectif de 75% de recyclage en 2012
Combien va coûter la mise en œuvre de cet objectif inscrit dans la loi Grenelle 1 concernant les seuls déchets d'emballages ménagers ? Il est assorti d'une autre mesure, aussi inscrite dans cette loi : les producteurs devront financer ''80 % des coûts nets de référence d'un service de collecte et de tri optimisé''.
Sans surprise, l'estimation de ces coûts varie fortement selon les acteurs. Regroupant les producteurs d'emballages, l'éco-organisme Eco-Emballages - qui n'a pas souhaité répondre à nos questions - tablerait sur un montant de 580 millions d'euros par an. Les collectivités chiffrent ce montant à 960 millions d'euros. Le groupe de travail planchant sur cette question l'évalue de son côté à 620 millions d'euros.
Pourquoi de tels écarts ? Le ministère de l'environnement et les producteurs de déchets n'incluent pas la TVA ou la TGAP dans ces coûts nets, explique Nicolas Garnier, délégué général d'Amorce, l'association nationale des collectivités, des associations et des entreprises pour la gestion des déchets, de l'énergie et des réseaux de chaleur. Le ministère estime de son côté que le montant avancé par les collectivités ne correspond pas aux ''coûts nets optimisés, mais aux coûts nets constatés'', c'est-à-dire ce que coûterait l'atteinte d'un objectif de 75% de recyclage des déchets d'emballages dans un cadre non optimisé.
Tout l'enjeu est donc de savoir ce qu'est un ''service optimisé'' : fréquence de collecte, type d'habitats… Le ministère mise sur deux-trois mois de négociations pour les déterminer. Actuellement, les quelque 400 millions d'euros versés par les producteurs permettent de prendre en charge 50% des coûts de gestion de la filière avec un taux de recyclage de 63% des déchets d'emballages.
L'harmonisation des consignes de tri
L'harmonisation des consignes de tri est l'un des serpents de mer du secteur des déchets d'emballages ménagers. Toutes les collectivités ne récupèrent pas l'aluminium. D'autres laissent à leurs habitants la possibilité de collecter les petits déchets d'équipement électriques et électroniques (DEEE) avec les déchets d'emballages. Le tout dans des contenants qui, eux aussi, varient. Sans compter les couleurs associées à la collecte sélective, différentes d'une ville à l'autre. Difficile pour l'usager de s'y retrouver.
Ce problème n'est pas insoluble, selon une étude de l'Ademe publiée le 13 avril consacrée à l'analyse de l'information et de la signalétique pour la collecte sélective des produits en fin de vie. L'Ademe propose notamment la création d'un étiquetage national, voire européen, des déchets triés sélectivement, pris en charge par les éco-organismes agréés. Le nouvel étiquetage serait promu par le lancement d'une campagne à l'échelle du pays.
Pour France nature environnement, l'harmonisation des consignes de tri doit être l'occasion de miser sur la prévention. La fédération d'associations propose dans un communiqué du 20 avril que ''les producteurs de produits emballés, via les éco-organismes, contribuent chaque année à un fonds géré par l'ADEME, destiné au soutien des actions de sensibilisation à la consommation de produits moins emballés''.
La fin de la confusion passe aussi par une réforme du fameux Point vert, qui ajoute à la confusion Souvent pris à tort comme un indicateur de la recyclabilité d'un emballage, il ne fait que montrer que le producteur contribue financièrement à la gestion de sa fin de vie. ''Il ne dissuade pas non plus de la fabrication d'emballages difficilement ou non recyclages'', note Nicolas Garnier. Amorce réclame un malus de 50% à 100% du montant de la contribution de ces emballages.
La fin du soutien à la compensation à la tonne triée
''Anecdotique'' par rapport aux enjeux du réagrément d'Eco-Emballages, la fin progressive du soutien à la compensation cristallise l'exaspération des collectivités face au barème D, en vigueur depuis 2005 et qui doit être remplacé en 2011 par le barème E. Elles estiment s'être fait flouer lors des négociations sur le barème D, se révélant pénalisant pour les collectivités les plus performantes en termes de tri des emballages ménagers. Il avait donc été doté d'un dispositif destiné à compenser leurs pertes : à 100% jusqu'en 2008, avant d'être réduit à 50% en 2009 puis de 25% en 2010.
Cette compensation étant versée en avril pour l'année précédente, plus de 500 collectivités locales ont été privées d'environ 13 millions d'euros en avril 2010, alors que leurs performances en termes de recyclage contribuent majoritairement à l'atteinte du 75 % de recyclage des emballages ménagers, selon Bertrand Bohain, délégué général du Cercle national pour le recyclage (CNR).
Il regrette que la modification du cahier des charges d'Eco-Emballages, qui pourrait permettre de compenser à nouveau les collectivités intégralement, ne soit pas d'actualité.
Eco-Emballages dans le collimateur de l'Autorité de la concurrence
Enfin, l'Autorité de la concurrence a publié vendredi 9 avril un ''test de marché'', qui doit permettre de rendre publiques des propositions d'engagements faites par Eco-Emballages et sa filière Valorplast pour laisser plus de place à la concurrence sur le marché de la revente des déchets plastiques triés et le contrôle du recyclage de ces déchets.
La société DKT International est à l'origine de ce test. Elle estime avoir été victime de pratiques d'éviction sur ce marché d'Eco-Emballages et Valorplast au cours des années 2005 et 2006. ''C'est-à-dire au moment du renouvellement de la plupart des contrats passés entre Eco-Emballages et les collectivités territoriales en vue de la reprise des déchets d'emballages pour leur valorisation'', indique l'Autorité de la concurrence.
DKT International avait réclamé des mesures anticoncurrentielles à effet immédiat dans un premier temps. La demande a été rejetée par l'autorité, et cette décision a été confirmée par la cour d'appel de Paris en novembre 2009. Les propositions d'Eco-Emballages et de Valorplast seront analysées par l'Autorité de la concurrence dans un délai de deux mois, avant de décider des suites à donner à l'affaire.