"Sur la base de la documentation présentée par la France, il n'y a aucune preuve scientifique spécifique, en termes de risque pour la santé humaine et animale ou pour l'environnement, qui appuierait l'adoption d'une mesure d'urgence sur la culture du maïs MON 810 en vertu de l'article 34 du règlement (CE) 1829/2003" : Sans surprise, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) estime, dans un avis (1) publié le 1er août, que la clause de sauvegarde, prise par la France en mars dernier à l'encontre du maïs MON810, n'est pas justifiée. C'est la troisième fois depuis 2008 que l'Efsa, saisie par la Commission européenne, rejette les arguments scientifiques avancés par la France pour mettre en place un moratoire sur le MON810.
"Les publications scientifiques citées dans la documentation fournie par la France ne présentent pas d'intérêt pour le maïs MON 810, et les arguments avancés par la France ne révèlent pas de nouvelle information susceptible d'invalider les conclusions de l'évaluation des risques et les recommandations de gestion des risques faites par l'Efsa", estime l'autorité.
Pour justifier la mise en place de cette clause de sauvegarde, le gouvernement français avait avancé "un risque de dommage grave et irréversible pour l'environnement". La France s'est appuyée notamment sur deux avis de l'Efsa, publiés en 2011 et 2012, qui mettaient en avant le développement de résistances chez les insectes ravageurs et la mortalité de populations de papillons sensibles. Pour juguler ces risques, l'Efsa préconisait toutefois la mise en place de mesures de gestion et un renforcement de la surveillance.
La saison des semis est passée
Parallèlement à la procédure d'information de la Commission européenne, le gouvernement a publié, mi-mars au Journal officiel, un arrêté visant à empêcher la commercialisation, l'utilisation et la culture des 232 variétés de semences du maïs MON 810 actuellement inscrites au catalogue commun des variétés des espèces agricoles. L'objectif étant d'empêcher en urgence les semis, qui ont lieu entre mars et juin.
Saisi en référé par l'Association générale des producteurs de maïs (AGPM) et deux exploitants agricoles, la SARL Le Trouilh et l'EARL de Candelon, le Conseil d'Etat a refusé, en mai, de suspendre cet arrêté, estimant que le texte ne portait pas une atteinte grave et immédiate à la situation économique des requérants et de la filière. Le Conseil d'Etat doit désormais se prononcer selon la procédure de droit commun. A deux reprises, il a annulé les arrêtés français instituant des clauses de sauvegarde.
Mais fort de cette décision, le gouvernement a ordonné la destruction de plusieurs hectares de MON810 en Haute-Garonne, dans le Tarn-et-Garonne et le Gers, semés par plusieurs exploitants, dont les deux requérants devant le Conseil d'Etat.
Vers une révision de la réglementation européenne
Désormais, ces scénarios à rebondissements ne devraient plus avoir lieu. En juin dernier, le Conseil européen est parvenu à un accord très attendu : la révision de la directive 2001/18/CE qui doit donner aux Etats membres la possibilité de restreindre ou d'interdire sur leur territoire la culture d'OGM pour des motifs environnementaux, mais aussi socio-économiques, éthiques...
Concrètement, l'Union européenne conservera les compétences pour tout ce qui relève de l'évaluation et de l'autorisation des OGM. En revanche, un Etat membre pourra, en passant par l'intermédiaire de la Commission européenne, demander à l'entreprise d'exclure tout ou partie de son territoire de sa demande d'autorisation de culture. Fin juillet, le Conseil a entériné cet accord. Il devrait être examiné par le Parlement européen à l'automne.