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Le moratoire sur les zones commerciales affaibli par de nombreuses exclusions

L'engagement du président de la République de suspendre les implantations commerciales en périphérie de ville n'est pas traduit de manière solide dans le projet de loi climat. Son examen à l'Assemblée l'illustre.

Aménagement  |    |  L. Radisson
Le moratoire sur les zones commerciales affaibli par de nombreuses exclusions

C'était l'une des propositions de la Convention citoyenne pour le climat qu'Emmanuel Macron avait le mieux accueillie : stopper les aménagements de zones commerciales en périphérie des villes afin de lutter contre l'artificialisation des sols. Cela s'est traduit, dans un premier temps, par l'envoi d'une circulaire aux préfets leur demandant « une vigilance toute particulière sur le respect du principe de consommation de l'espace ». Une sensibilisation qui, sur le terrain, risque toutefois de ne pas peser bien lourd face aux intérêts économiques locaux.

La ministre de la Transition écologique avait aussi annoncé une mesure plus forte à l'occasion du cinquième Conseil de défense écologique : la révision par la loi des conditions de délivrance des autorisations d'aménagement commercial. Le projet de loi climat et résilience, présenté le 10 février en Conseil des ministres, contient effectivement le principe général d'une interdiction de création de nouvelles surfaces commerciales entraînant une artificialisation des sols. Mais cet article, déjà critiqué comme étant assez éloigné d'une interdiction absolue, a fait l'objet de nouveaux assouplissements le 17 mars lors de son examen en commission spéciale à l'Assemblée nationale.

Les entrepôts logistiques non concernés

L'interdiction ne concerne que les projets soumis à autorisation commerciale au titre du code de commerce et ne vise donc pas les entrepôts logistiques encadrés par ailleurs par la législation des installations classées (ICPE). Le Gouvernement a au contraire adopté, dans le cadre du plan post-Lubrizol, des textes facilitant leur implantation. Cela a été permis par une extension du régime d'autorisation simplifiée pour la majeure partie d'entre eux. D'autres mesures de soutien à l'implantation des entrepôts ont également été mises en avant par le Gouvernement lors du comité interministériel dédié à la logistique du 7 décembre dernier. C'est en particulier le cas des mesures fiscales favorables adoptées dans la loi de finances pour 2021.

« Des projets comme Europacity n'existeront plus mais il sera toujours possible de construire en plein champs des entrepôts Amazon de la taille de plusieurs terrains de foot », dénonce le Réseau Action Climat (RAC), qui fédère les associations impliquées dans la lutte contre le changement climatique. Pourtant, pour Alma Dufour des Amis de la Terre, la question des entrepôts de e-commerce est un triple sujet, en ce qu'il touche l'artificialisation des terres, mais aussi l'empreinte carbone de la France, à travers ses importations, ainsi que la question de l'emploi. « Les entrepôts de e-commerce se développent rapidement, entraînant une explosion des importations de produits et du fret aérien, ceci tout en détruisant 4,5 fois plus d'emplois qu'ils n'en créent », pointe le RAC.

“ Les entrepôts de e-commerce se développent rapidement, entraînant une explosion des importations de produits et du fret aérien, ceci tout en détruisant 4,5 fois plus d'emplois qu'ils n'en créent. ” Réseau Action Climat
Certaines de ces préoccupations ressortent du rapport sur le développement durable du commerce en ligne remis aux ministres en février mais dont Bercy avait bloqué la publication. Un blocage qu'avait dénoncé le député Matthieu Orphelin dans un courrier au Premier ministre. Ce rapport, signé de hauts-fonctionnaires, pointe « des signaux de rupture préoccupants » avec « des effets potentiellement importants sur l'emploi ». Les auteurs y préconisent une meilleure planification de la logistique, la généralisation de la procédure d'agrément des entrepôts existant en Ile-de-France, une régulation des livraisons, ainsi qu'une réforme de la fiscalité du commerce.

Pas de quoi rassurer les fédérations professionnelles déjà inquiètes du projet de loi actuel. Ainsi, si l'Union nationale des aménageurs (Unam) dit « partager les objectifs de sobriété foncière et de préservation de la biodiversité poursuivis par le projet de loi », elle dénonce « ses modalités de mise en œuvre qui, faute de pragmatisme, fragiliseront les territoires et donneront lieu à une crise immobilière majeure ».

Dérogations pour les surfaces de vente de moins de 10 000 m2

Outre l'exclusion des entrepôt logistiques, l'article prévoit des possibilités de dérogations pour les surfaces de vente inférieure à 10 000 m2. Des dérogations justifiées par le Conseil d'État dans son avis sur le projet de loi en date du 4 février. Le Palais Royal craint en effet, dans certaines circonstances, une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre ainsi qu'à l'égalité entre les opérateurs économiques.

Mais « 80 % des projets de surfaces commerciales se trouvent en dessous, la moyenne des surfaces commerciales étant de 2 000 m2 », critique le RAC. Pour les ONG, le risque existe que le moratoire reste une mesure symbolique. Les porteurs de projet pourraient en effet obtenir plusieurs dérogations pour de petites unités commerciales, puis « les accumuler pour faire un centre commercial de plus de 10 000 m2 sur terres agricoles », pointent les associations.

Et, selon ces dernières, l'examen du texte en commission, loin de renforcer l'ambition, a assoupli encore le moratoire. Les députés ont en effet adopté un amendement (1) du rapporteur Lionel Causse qui modifie les critères permettant une dérogation. « On passe (…) d'un système de faisceau général d'indices – la prise en considération – à un système beaucoup plus restrictif », a vanté la ministre en charge du logement Emmanuelle Wargon. Des critères « non cumulatifs et laxistes », estiment au contraire les associations. « Il n'y aura plus de moratoire sur les zones commerciales artificialisant des terres si cette rédaction entre en vigueur », assure même le RAC.

La balle est de nouveau dans le camps des députés qui examinent le texte en séance publique à compter du 29 mars. Plusieurs amendements, issus de l'opposition comme de la majorité, ont été déposés sur cet article. Parmi les premiers, un amendement (2) de la députée non inscrite Delphine Batho soumet certains entrepôts logistiques à autorisation d'exploitation commerciale. Parmi les seconds, un amendement  (3) du député Modem Erwan Balanant instaure un moratoire sur les entrepôts de e-commerce de plus de 3 000 m2.

1. Télécharger l'amendement adopté de Lionel Causse
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-37282-amdt-causse.pdf
2. Télécharger l'amendement déposé par Delphine Batho
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-37282-amdt-batho.pdf
3. Télécharger l'amendement déposé par Erwan Balanant
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-37282-amdt-balanant.pdf

Réactions1 réaction à cet article

Je suis effaré de voir la naïveté de tous ces commentateurs ! La politique énergétique et d'aménagement en France est faite par et pour les grands groupes, pétroliers, bétonniers, agro-business, etc., et Macron est leur pantin. Cette Convention Citoyenne et la loi qui s'en suivra n'ont comme objectif que de procrastiner, il n'y a aucune espèce de conscience écologique là-dedans.

dmg | 29 mars 2021 à 11h39 Signaler un contenu inapproprié

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