« Le mot biodiversité est apparu dans les années 1990. Il n'apparaissait dans aucune politique publique avant. Aujourd'hui, il est partout », se félicite Michaël Weber, président de la Fédération des parcs naturels régionaux (FNPNR). C'est particulièrement vrai aujourd'hui dans les programmes des candidats aux élections municipales, quelle que soit leur couleur politique.
« Il y a un vrai changement de culture, la question n'est plus réservée aux programmes écologistes », confirme Maud Lelièvre. La déléguée générale des Éco-Maires, dont l'association a commencé à analyser les programmes des candidats, constate l'importance grandissante donnée à la place de l'animal, à celle de l'arbre, à l'éducation à l'environnement ou encore au réaménagement du bâti dans les discours des candidats.
Omniprésente dans les programmes de grandes villes
Mais si la question de la biodiversité gagne en importance dans les programmes des candidats, cette place n'est pas la même selon que l'on a affaire à des communes rurales ou urbaines. Elle est omniprésente dans les programmes des candidats des grandes villes, comme le montre la surenchère sur le nombre d'arbres à planter à Paris ou les propositions de création de forêts urbaines dans la capitale. « Comment faire pour que la prise de conscience soit aussi forte chez les élus ruraux que chez les élus des grandes villes ? », interroge Michaël Weber, qui rappelle que la préoccupation première des communes rurales est de conserver leur population et d'éviter la paupérisation des centre-bourgs.
Mais tout en posant cette question, le président du parc naturel régional des Vosges, élu local, a sa petite idée sur la question. Certaines propositions typiquement urbaines, comme la végétalisation des toitures, n'ont pas de sens à la campagne. D'autres, au contraire, y ont toute leur place, même si cela se fait par la force des choses. L'objectif de zéro artificialisation nette des sols, fixé par le plan biodiversité du Gouvernement, ne peut être tenu à terme par les métropoles, estime M. Weber. Les communes rurales sont donc fortement sollicitées sur cette thématique, même si l'élu déplore que l'effort ne repose au final que sur elles.
« Éviter une perception hors sol de la biodiversité »
L'approche de la biodiversité se révèle aussi de nature différente entre la ville et la campagne. Éric Brua, directeur de la Fédération des parcs naturels régionaux, pointe « le risque de déconnexion entre la réalité écologique sur les territoires et des débats très nationaux sur la biodiversité ». Et de donner l'exemple de l'engouement pour le véganisme qui va tomber à plat sur un territoire qui vit de l'élevage. En bref, « il faut éviter une perception hors-sol de la biodiversité », résume le directeur de la fédération.
Approches volontaristes ou contractuelles mieux perçues
La différence d'approche se situe aussi au niveau de la nature des outils à mettre en place. Là où la demande peut se révéler plus forte sur le réglementaire en ville, avec des exigences d'interdiction de certaines activités sources de nuisances, les approches volontaristes ou contractuelles sont mieux perçues en milieu rural. « Plutôt convaincre que contraindre », plaide Michaël Weber qui vante des outils volontaires comme les sanctuaires de nature, les atlas de la biodiversité communale, le concours jardiner pour la biodiversité ou celui des prairies fleuries.
Mais si les approches urbain/rural présentent des divergences, la demande sociale pour l'environnement des moins de 40 ans tend aussi à rapprocher les points de vue. Une convergence qui peut être illustrée par la demande croissante pour des cantines scolaires bio, les différences résidant, là, davantage sur la plus ou moins grande aisance financière des parents que sur leur lieu de résidence.
En tout état de cause, villes ou campagnes, « il est nécessaire de mettre en place des indicateurs clairs et reproductibles », indique Stéphane Woynarosky, président du groupe de travail « Collectivités et biodiversité » du comité français de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). « À défaut, les politiques environnementales se révèlent faibles », indique Maud Lelièvre.