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Nanomatériaux : l'Anses identifie leur présence dans plusieurs centaines de produits alimentaires

La présence de nanoparticules dans l'alimentation est-elle sous contrôle ? Avec plus de deux ans de retard, l'Anses dresse un état des lieux, estimant qu'au moins 900 produits alimentaires sont concernés. L'évaluation sanitaire reste difficile.

Risques  |    |  L. Radisson
Nanomatériaux : l'Anses identifie leur présence dans plusieurs centaines de produits alimentaires

La lettre de saisine date du 17 octobre 2016. Face à l'utilisation croissante de nanomatériaux dans l'alimentation et aux interrogations sur les risques qu'ils peuvent représenter pour la santé, cinq ministères demandaient au directeur général de l'Agence de sécurité sanitaire (Anses) la réalisation d'une expertise sur la question. L'établissement public a publié les résultats (1) de « cette saisine particulièrement stratégique » mardi 9 juin, avec plus de deux ans de retard par rapport à la commande.

Traçabilité complexe et incomplète

Dans le domaine alimentaire, les nanomatériaux sont utilisés en tant qu'additifs pour améliorer l'aspect ou l'appétence d'un produit, en tant que matériaux au contact des aliments pour améliorer la sécurité du conditionnement, voire avec une vocation nutritive, rapporte l'Anses. Malgré l'obligation, depuis 2013, de déclarer les substances à l'état nanoparticulaire, « la traçabilité des nanomatériaux dans le domaine de l'alimentation demeure complexe et incomplète », reconnaît l'Anses, qui gère le registre R-Nano permettant cette déclaration. Les raisons avancées ? Le non-respect de la réglementation sur l'information du consommateur, une enquête de la DGCCRF (2) d'avril 2018, montrant effectivement que 39 % des produits alimentaires contrôlés ne mentionnaient pas la présence de nanoparticules, et l'exclusion des produits finis du dispositif R-Nano.

Selon le dernier bilan (3) disponible de la déclaration R-Nano, qui porte sur l'année 2018, 1 288 entreprises ont déclaré la production, l'importation ou la distribution de substances à l'état nanoparticulaire. Un chiffre en baisse par rapport à l'année précédente, alors qu'il s'agit d'une déclaration annuelle. En février dernier, l'Agence européenne des produits chimiques (Echa) faisait également part de la défaillance des industriels à faire enregistrer les nanomatériaux qu'ils utilisent. Un enregistrement pourtant obligatoire depuis le 1er janvier 2020 dans le cadre du règlement Reach.

Les enfants particulièrement exposés

À l'aide des données du registre R-Nano, mais surtout de la littérature scientifique, l'Anses a identifié 37 substances utilisées dans la formulation des aliments et dans lesquelles la présence de nanomatériaux est avérée (carbonate de calcium, dioxyde de titane, oxydes et hydroxydes de fer, silicate de calcium, phosphates tricalciques, silices amorphes synthétiques, composés organiques et composites) ou suspectée (aluminium, argent, or, phosphates de magnésium, citrate d'ammonium ferrique, sels de sodium, de potassium et de calcium d'acides gras, etc.).

“ Malgré ces lacunes, l'Anses identifie près de 900 produits alimentaires concernés par la présence avérée de nanomatériaux facturés.  ”
Mais, alors que la littérature scientifique permet d'identifier des nanomatériaux inorganiques, organiques et composites, l'Agence reconnaît l'absence d'information sur l'usage actuel de ces deux dernières catégories de composés. Par ailleurs, « l'identification exhaustive des produits finis alimentaires contenant des nanomatériaux s'avère quasi impossible », estime l'Agence, mettant cette impossibilité sur le compte de « l'absence de mécanisme partagé par l'ensemble des acteurs pour leur référencement ».

Malgré ces lacunes, l'Anses identifie près de 900 produits alimentaires concernés par la présence avérée de nanomatériaux facturés. « Pour autant, cela ne peut être assimilé à une présence de nanomatériaux dans chaque produit ou lot », veut rassurer l'Agence, qui souligne aussi que ce recensement a été effectué avant la suspension en France du dioxyde de titane E171, effective au 1er janvier 2020 . L'inquiétude pointe toutefois lorsque l'on découvre que les sous-secteurs alimentaires les plus concernés sont également ceux qui concernent plus particulièrement les enfants : lait infantile (25,6 %), confiseries (15,6 %), céréales du petit-déjeuner (14,8 %), barres céréalières (14,9 %), viennoiseries et desserts surgelés (10,9 %). Le lait infantile ressort aussi dans les catégories des produits dans lesquels la présence d'au moins un des nanomatériaux peut concerner jusqu'à 25 % du produit.

Évaluation complexe des risques sanitaires

La lettre de mission des ministres demandait aussi à l'Anses d'évaluer la faisabilité d'une évaluation des risques sanitaires pour certains produits alimentaires. L'identification et la traçabilité défaillante des nanomatériaux pose toutefois problème. « Elles constituent (…) une étape essentielle indispensable à l'évaluation des risques sanitaires », rappelle elle-même l'Agence.

D'où, sans doute, le flou qui entoure la méthode proposée pour effectuer cette évaluation, dont le périmètre dépend également de la définition donnée au terme « nanomatériau manufacturé ». « Dans ce contexte et suite à la publication par l'Efsa d'un guide relatif à l'évaluation des dossiers portant sur des applications en nanosciences ou nanotechnologies », l'Anses propose « une approche permettant d'opter pour l'évaluation du risque la mieux adaptée à la substance manufacturée (sic) ». « Cette approche permet de statuer s'il faut procéder à une évaluation de risques standards ou bien nanospécifiques », ajoute l'Agence. Celle-ci annonce l'application prochaine de cette approche à une sélection de substances, ainsi qu'une proposition de méthodologie d'évaluation du risque nanospécifique.

Dans l'attente de la finalisation de cette seconde phase de l'expertise et compte tenu des incertitudes sur les risques sanitaires, l'établissement public réitère les recommandations émises à l'occasion de précédentes expertises sur le sujet. En particulier, une limitation de l'exposition des consommateurs, mais aussi des travailleurs, en favorisant les produits sûrs, dépourvus de nanomatériaux et équivalents en termes de fonction et d'efficacité.

Même si l'Anses annonce de premiers résultats d'ici début 2021, l'évaluation des risques sanitaires apparaît complexe. Et pourtant, il ne s'agit là que du premier volet de la commande du Gouvernement. Dans leur lettre de mission, les ministres demandaient ensuite à l'Agence de se pencher sur l'exposition liée aux nanoparticules contenues dans les résidus issus du traitement des eaux, des médicaments vétérinaires, des traitements phytosanitaires et des produits biocides. Vaste programme qui interroge sur les capacités de l'établissement à répondre à la commande si les industriels ne font pas preuve de plus de transparence.

1. Télécharger l'avis et le rapport de l'Anses
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-35632-avis-rapport-anses.pdf
2. Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes3. Télécharger le rapport 2018 issu des déclarations R-Nano
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-35632-rapport-nanos-2018.pdf

Réactions1 réaction à cet article

L'ANSES, en retard de deux ans dans son rôle d'évaluation publique de substances dangereuses... : la routine en quelque sorte, non ?!
L'industrie de la malbouffe aura de toute façon toujours plusieurs trains d'avance sur le législateur et les éventuelles restrictions / interdictions. Ce qui ne signifie pas qu'il faut baisser les bras, bien au contraire !
Le consommateur a tout intérêt à être vigilant, si ce n'est méfiant, pour sa santé et celle de ses proches en limitant sa consommation d'aliments (si on peut encore les nommer ainsi...) ultra transformés. Les associations de consommateurs l'alertent de façon objective sur le sujet depuis pas mal d'années ; aussi à lui de faire preuve d'un minimum de jugeote et de responsabilité.

Pégase | 18 juin 2020 à 13h50 Signaler un contenu inapproprié

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