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AccueilNathalie JaubertMieux intégrer les critères environnementaux dans les décisions de financement et d'investissement

Mieux intégrer les critères environnementaux dans les décisions de financement et d'investissement

Nathalie Jaubert déléguée à la RSE chez BNP Paribas nous propose un avis d'expert sur l'intégration de critères environnementaux dans les décisions de financement et d'investissement des banques.

Publié le 04/06/2012

Les banques sont devenues incontournables dans la transition vers une économie plus verte et plus durable. Si leur rôle dans le financement des infrastructures vertes et des énergies renouvelables est bien identifié, leur effort doit également porter sur l'intégration de critères environnementaux dans leurs décisions de financement et d'investissement, en priorité dans les secteurs sensibles et à terme dans tous les secteurs.

La crise de 2008 a révélé le pouvoir d'influence considérable des banques sur l'économie. Interrogées voire décriées, elles subissent une double injonction : continuer à financer l'économie dans toute sa complexité tout en étant plus transparente. Leur responsabilité indirecte est de plus en plus recherchée : leurs parties prenantes externes (clients, actionnaires, investisseurs institutionnels, ONG) les interpellent de façon récurrente sur les actifs qu'elles financent et sur le comportement de grands clients qu'elles accompagnent dans leur développement.

Au-delà de toute polémique, il est donc devenu impératif pour elles d'être en mesure d'expliciter leurs décisions de financement et d'investissement. Comment les banques peuvent-elles aujourd'hui faire face au défi de répondre à des besoins mondiaux toujours croissants tout en encourageant le développement d'une production «durable» ?

L'intégration de critères ESG

Pour répondre à cette double attente, les banques doivent intégrer progressivement des critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG) dans toutes ses décisions de financement et d'investissement. L'objectif est de mieux appréhender les risques potentiels afin de mieux identifier les projets à financer, les entreprises dans lesquelles investir, et les zones géographiques les plus sensibles. Ces critères sont d'autant plus importants chez BNP Paribas, qu'ils permettent d'objectiver la plus-value environnementale des financements et des investissements, une bonne gestion environnementale contribuant à une meilleure performance financière sur la durée. Leur prise en compte se fera progressivement car ils sont à la fois éloignés du cœur de métier de la banque (l'analyse financière du risque), à long terme et avec une faible probabilité d'occurrence mais à impact maximal s'ils se réalisent.

Encadrer les secteurs les plus sensibles

Les secteurs économiques les plus sensibles en termes environnementaux ou sociaux doivent être encadrés par des politiques de financement et d'investissement responsable qui s'appliquent à tous les produits et services, y compris à la gestion d‘actifs. En un peu plus d'un an, notre groupe a ainsi travaillé sur les secteurs de l'huile de palme, du nucléaire, des matières premières agricoles essentielles, de l'industrie de la pâte à papier et enfin l'électricité produite à partir du charbon.

Ce sont des chantiers très lourds : chaque politique nécessite six mois de travail en moyenne. Tous les acteurs (internes : métiers, risques… et externes : ONG, experts…) sont consultés afin d'aider à positionner les critères à un niveau suffisamment ambitieux pour avoir un réel impact sur l'environnement et la société mais également réaliste pour garantir leur mise en œuvre.

Un cas concret : le financement de l'industrie de l'huile de palme

En octobre 2010, BNP Paribas a adopté une politique visant à clarifier sa position concernant ses investissements et financements dans le secteur sujet à polémique de l'huile de palme. Cette politique spécifie les critères requis pour qu'une société produisant de l'huile de palme soit acceptée comme cliente ou comme cible d'investissement par la banque. Ensuite elle encourage les clients et partenaires impliqués dans le secteur à se faire certifier RSPO (Roundtable on Sustainable Palm Oil). Nous avons en effet identifié RSPO comme l'initiative présentant les meilleurs standards dans le secteur de l'huile de palme à ce jour.

L'application de cette politique est basée sur une approche d'engagement en plusieurs étapes et adapté au niveau de risque :

- Toutes les sociétés (clientes ou prospects) sont informées de l'existence et du contenu de la politique : elle est publiée sur le site internet du Groupe et envoyée aux clients opérant dans le secteur.

- Avec l'aide d'une ONG spécialisée dans la gestion forestière et les plantations durables (The Forest Trust - TFT), BNP Paribas procède à une analyse annuelle du secteur. L'objectif est d'identifier les sociétés ayant les pratiques environnementales les plus risquées et qui ne remplissent pas les critères de la politique. Sur la base de cette revue annuelle, le Groupe établit une liste des clients et prospects classés « sensibles ».

- Un dialogue est engagé avec les sociétés identifiées comme ayant des pratiques « sensibles ». Ces clients et prospects reçoivent alors une visite de leur chargé de compte, d'un membre de l'équipe RSE et de TFT qui leur exposent les attentes de BNP Paribas et établissent avec eux les éventuels points de non-conformité avec la politique. Les sociétés exposent leurs objectifs RSE, leurs contraintes et présentent les actions RSE qu'elles envisagent de mettre en œuvre pour améliorer leurs performances sociales et environnementales.

- Le Groupe étudie les plans d'actions de ces clients et évalue leur capacité à améliorer la durabilité de leurs plantations. Sur la base des informations recueillies lors de ces rendez-vous, ainsi que de l'étude faite au préalable par TFT, la banque classe les entreprises en 3 niveaux de risque.

- Pour celles considérées comme relativement risquées, toute opération sera soumise à l'approbation du management et aucun investissement ne sera autorisé. Les plus risquées seront exclues du périmètre de financement et d'investissement de la banque.

Fin mars 2012, les sociétés ayant fait l'objet d'une revue annuelle représentent environ 25% des plantations de palmier à huile mondiale.

Mieux sélectionner, Influer sur les pratiques et exclure en dernier recours

Finalement, ces politiques doivent permettre d'identifier les maillons les plus critiques dans la chaîne de production. Bien entendu, toutes les entreprises doivent respecter les lois existantes dans le domaine de l'environnement mais elles doivent également faire preuve de transparence en fournissant un certain nombre d'informations, permettant de juger de la maîtrise de leurs risques sur ce sujet.

Une analyse approfondie des risques spécifiques de chaque secteur permet ensuite de définir des critères de performance que les entreprises et/ou les projets doivent impérativement satisfaire.

Ces politiques, qui validées par le Comité exécutif chez BNP Paribas, ont été très largement diffusées à l'ensemble des métiers. Si elles répondent à une attente des commerciaux et des gérants de disposer d'instructions précises en amont de toute prise de décision, elles induisent néanmoins de profonds changements : il est nécessaire de former et d'accompagner les équipes parfois peu familières de certains critères d'évaluation très techniques. Elles supposent également un dialogue d'un nouveau type avec les clients ou les sociétés dans lesquelles nous souhaitons investir : au-delà des critères de performance financière, il convient aujourd'hui d'aborder des sujets beaucoup plus larges.

Notre philosophie n'est pas d'exclure un secteur d'activité dans sa globalité (hormis ceux qui font l'objet d'interdits légaux) mais nous ne nous interdisons pas, en dernier recours, d'exclure des entreprises qui ne souhaitent pas évoluer et prendre en compte nos politiques.

Une démarche de progrès

La démarche engagée doit et va donc se poursuivre à la fois en s'appliquant à d'autres secteurs d'activité, en révisant si nécessaire les politiques existantes (par exemple, la politique nucléaire pourrait évoluer suite aux stress tests mis en œuvre à l'échelon européen) mais également en la déclinant dans des secteurs spécifiques.

Avis d'expert proposé par Nathalie Jaubert déléguée à la RSE chez BNP Paribas

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8 Commentaires

JM Robin

Le 05/06/2012 à 10h36

Merci de votre article.
La capacité d'influence et d'action des banques est certaine.
Un pouvoir (capacité de nuisance?), comme dans bien d'autres domaines, sur lequel il faudra que la société se donne les moyens de revenir
Bien cordialement
JMarc Robin

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Obse

Le 05/06/2012 à 11h59

- Vous ne parlez pas de l’éthique du travail des traders … c’est un problème complexe et mondial mais qui doit être également solutionné rapidement : la partie fictive (non-réelle) des valeurs qu’ils manipulent est bien trop élevée, cela ne représente plus du tout l’économie réelle ; de plus, l’absence de tout sens moral leur fait faire n’importe quoi (économiquement parlant, pas financièrement parlant) et ces « n’importe quoi » peuvent entrainer des choix complètements aberrants de la part des instances économiques mondiales et des états par exemple en terme de politique agricole, ou encore ruiner toute une région spécialisée dans un ou deux secteurs d’activité en quelques semaines, etc.

Enfin, à Rio+20, le Sommet de la Terre et des Peuples (et tous les évènements qui auront lieu courant juin en rapport à Rio+20), plutôt que de militer (lobbysme) pour conserver les aberrations criminelles inhumaines actuelles, militez pour responsabiliser et régulariser tout cela afin de mettre notre monde sur la bonne voix plutôt que celle de l’autodestruction par la cupidité.

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Obse

Le 05/06/2012 à 12h01

Il doit exister dans les nouveaux pays positionnés sur ce marché des plantations qui ne soient pas plantées sur de la forêt rasée (voilà déjà un premier critère concret inévitable), mais est-ce pour autant une raison de tolérer l’emploi des pires pesticides (pour les employés, l’environnement et le consommateur), interdits depuis longtemps en France mais que la RSPO accepte très bien (car les ONG ont bien peu de pouvoir dans cette organisation multi-parties-prenantes spécifique) (2nd critère) ; est-ce également une raison pour investir dans un secteur d’activité où de nombreuses conventions de l’OIT ne sont pas respectées (je sais, c’est aussi le cas pour de nombreux autres secteurs où toutes les grandes banques investissent mais il faut bien commencer quelque part…), enfin, est-ce une raison pour participer à la malbouffe industrielle vendue par millions de tonnes dans nos supermarchés et qui va finalement causer une augmentation importante du surpoids, de l’obésité, des maladies cardiovasculaires, de la mauvaise santé nutritive en général et prioritairement dans les classes les moins aisées de nos sociétés occidentales, ce qui nous coutera encore d’avantage en protection sociale et coûtera donc bien plus dans le futur aux états, qui iront bien sur alourdir à nouveau leur dette au près des grandes banques : voyez-vous, il faut casser ce type de type de cercle vicieux et les remplacer par des « cercles vertueux » ;

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Obse

Le 05/06/2012 à 12h02

car, s'il est vrai que prise hors contexte, cette huile (traditionnellement cultivée) n'a pas beaucoup d’impact environnementaux et n’est qu’une huile alimentaire de très mauvaise qualité mais qui a l’énorme atout (pour les industriels) de pouvoir être à peu près solide à température ambiante, mais le contexte est que l’énorme majorité de la production mondiale de cette huile venait il y a 5-10 ans des grandes îles d’Océanie (Malaisie, Sumatra, Bornéo, etc.) et la demande mondiale a tellement augmentée que sa culture s’est étendue à de nombreux pays équatoriaux. Pour disposer de grandes surfaces cultivables plus rapidement, des pratiques atroces ont eu lieux, notamment 1) le marquage des arbres de la forêt pour indiquer aux indigènes que leur lieu de vie multi-centenaire, à la biodiversité florissante et parfaitement équilibrée, a été acheté par des intérêts privés, 2) la destruction TOTALE de la forêt primaire sur la zone (par bulldozer et autres machines ou pire par brulage au napalm puis bulldozer), 3) le nivellement et la plantation industrielle de palmiers à huile, 4) le traitement chimique (en mode « agriculture intensive non-régulée », c’est-à-dire avec les pires produits en "…-cides" comme par exemple les neurotoxiques ou les mutagènes-reprotoxiques-cancérigènes). On est donc passé d’un extrême vivant à l’autre extrême (presque) mort. Certaines plantations osent même se faire certifier ISO 14001 (norme qui montre bien ses failles dans ce cas).

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Obse

Le 05/06/2012 à 12h04

mais je vous suggère d'aborder le plus tôt possible après les secteurs déjà examinés (pertinents) ceux du type de matière fossile pas encore examiné (pétrol-gaz, avec notamment les polémiques actuelles sur le gaz de schiste : ne vous salissez pas les mains !) et le secteurs minier (métaux, terres rares, matières précieuses, etc.) car ces deux secteurs concentrent d'énormes problématiques de corruption, d'accaparation des terres, pollutions chimiques hydrocarbures et métalliques très toxiques, violations graves des droits de l'Homme, et la liste est longue...

- Il y a également 2 sujet économiques sur lequel vous aurez beaucoup de travail : la lutte contre l’évasion fiscale (et la corruption en général) : inutile d’en dire plus sur les pratiques des grandes entreprises dans ce « sport » asocial et irresponsable ; et la lutte contre l’augmentation de la dette des états en inversant la tendance actuelle : en faisant du prêt responsable à taux adaptés à la situation du pays et assortie de conseils concrets pour progresser au lieu du prêt irresponsable et vampirique (soit disant « en fonction du risque » donc plus le pays est sur une mauvaise pente, plus le taux augmente et plus le taux augmente, plus le pays est sur une pente encore plus mauvaise : c’est indéniable) en ne trouvant pas d’autre conseils que de privatiser tous les services publiques : mais pensez un peu aux citoyens ! Un état ne fait pas (ou peu) de bénéfice (en théorie) sur ses services alors qu’une entreprise si!

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Obse

Le 05/06/2012 à 12h06

[commentaire en plusieurs parties : la suite chaque fois dans le commentaire en dessous]
Bonjour,
Je trouve votre article plutôt intéressant car il montre qu'au moins, la tendance des investissements aveugles, juteux et bien peu éthiques (BNP était par exemple nominée aux prix Pinocchio en 2009) est entrain de s'inverser et je vous en félicité ... mais je me permet tout de même de dénoter quelques failles dans votre texte, qui, je l'espère, vous serviront de crique constructive (et il y a du travail ...) :

- Aucune référence à l'ISO 26000 (qui pourtant est adaptable à tous type organismes et sont des lignes directrices assez exhaustives des critères ESG qui, eux par contre, changent à chaque prestataire de consulting RSE) ;

- J'imagine très bien l'ampleur du travail de rénovation des pratiques et d'évolution conviction interne et externe qu'implique la RSE pour les grandes banques ...

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Glossologeek

Le 05/06/2012 à 19h23

Le véritable article est le commentaire de "obse" plus haut, car il évoque, sans langue de bois, les véritables problèmes de fond de la responsabilité des banques à l'égard des sociétés.

Pour le reste, je suis désolé de dire à Nathalie Jaubert que son article est à pleurer de conformisme, de langage technocratique et convenu dont nous souffrons depuis près de 40 ans.

Il est temps qu'une redistribution des cartes s'opère, et que de nouveaux intellectuels plus humanistes et brillants prennent le pouvoir avant que notre société ne disparaisse de la carte.

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Etienne

Le 05/06/2012 à 23h33

Angra 3 au Brésil, Belene en Bulgarie...

Un petit lien intéressant :
http://ouvavotreargent.com/portrait-bnp


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