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Actu-Environnement

Néonicotinoïdes et pollinisateurs : deux nouvelles études prouvent leurs effets néfastes

Deux équipes de chercheurs ont mis en évidence l'impact des néonicotinoïdes sur les insectes pollinisateurs dans des publications parues dans la revue Science. Elles corroborent les expérimentations antérieures qui faisaient jusqu'alors débat.

Changement climatique, perte d'habitat, etc., les facteurs sont nombreux et avérés pour expliquer l'une des dégradations qui touche la biodiversité : la disparition des pollinisateurs comme les abeilles ou les bourdons, d'année en année. Mais jusqu'alors, les études ne prouvaient pas véritablement la mise en cause des néonicotinoïdes, projetés ou épandus sur les cultures, comme menace pour ces populations d'insectes. La publication de deux études (1) , parues le 30 juin 2017 dans la revue Science et mises en évidence en France par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), change la donne.

Si certaines études avaient déjà montré l'impact de ces substances censées viser les insectes ravageurs des cultures, d'autres le réfutaient. Balle au centre et débats. D'autant plus qu'aucune étude n'avait été réalisée dans les conditions réelles de durée et d'exposition, en tenant compte de la variabilité de l'environnement étudié. C'est dans ce contexte que des équipes de chercheurs se sont penchées sur des études au long cours interrogeant le rôle des néonicotinoïdes sur les insectes pollinisateurs.

Quatre mois d'exposition dans les champs de maïs outre-Atlantique

Les abeilles sont-elles exposées à une toxicité chronique des néonicotinoïdes ? C'est la question que s'est posée l'équipe de Tsvetkov et al. Les scientifiques se sont focalisés sur les champs de maïs, au Canada, largement imprégnés de ces substances chimiques, en étudiant un échantillon de cinquante-cinq colonies d'abeilles domestiques réparties en deux groupes. L'étude met très clairement en évidence la présence, dans les ruches, de vingt-six produits agrochimiques dont les néonicotinoïdes avec une fréquence plus élevée dans les nids situés près des sites exposés et une période plus longue (83,4 jours). "Environ quatre mois, soit la majorité de leur période d'activité", résume Hélène Soubelet, docteur vétérinaire et directrice de la FRB. Qui plus est, les échantillons de pollen positifs n'étaient pas forcément issus de plantes traitées, preuve que les poussières contenant les néonicotinoïdes sont largement disséminées.

Mortalité de 23% supérieure à celle des colonies non contaminées, diminution des vols pour faire des réserves, propension des abeilles à quitter la ruche ou encore difficulté à entretenir leur habitat et d'élever une nouvelle reine, autant d'effets négatifs observés par les chercheurs. Les abeilles, dans ces conditions, voient leurs résistances diminuer. "Ces molécules ont des effets délétères importants sur les colonies d'abeilles, potentialisés par certains fongicides, qui conduisent à leur affaiblissement et à leur dépérissement", poursuit la directrice de la FRB. Pour les scientifiques, les mêmes effets sont à envisager pour les abeilles sauvages.

Trente-trois sites passés au peigne fin dans des pays différents

Autre point de faiblesse des études antérieures : les conditions d'étude. La deuxième équipe de chercheurs, Woodcock et al., a mené ses expérimentations sur trente-trois sites plantés de colza d'hiver, répartis en Allemagne, Hongrie et Royaume-Uni, pour pallier ce problème. Trois espèces de pollinisateurs ont été suivies. Les chercheurs ont mis notamment en évidence, en présence de la clothianidine, chez les ouvrières de l'abeille domestique, en Hongrie, un taux de déclin de 24% des populations. Pour les espèces du bourdon et de l'abeille solitaire, les auteurs ont démontré que l'exposition aux résidus de néonicotinoïdes, avait pour conséquences, pour l'une, la diminution de la production de reines et pour l'autre, de la production d'oeufs. Même à faibles doses, "l'exposition aux néonicotinoïdes a des effets majoritairement négatifs sur le potentiel reproductif interannuel des insectes étudiés", synthétise Hélène Soubelet. Plus inquiétant, les scientifiques révèlent : "Même en cas d'interdiction d'usage des semences enrobées aux néonicotinoïdes, comme c'était le cas en Europe au moment de l'étude, les résidus déjà présents dans l'ensemble de l'agro-écosystème sont susceptibles d'affecter les populations de pollinisateurs sauvages et domestiques en raison de leur persistance dans l'environnement, dans les plantes non cibles, dans les eaux ou dans les produits stockés dans la ruche."

Depuis la loi française pour la reconquête de la biodiversité qui interdit les sept substances actives de la famille des néonicotinoïdes (acétamipride, clothianidine, dinotéfurane, imidaclopride, nitenpyrame, thiaclopride, thiamétoxame), les débats étaient houleux... La Commission européenne ne partage pas cet avis, même si elle avait émis une restriction d'usage de trois d'entre eux : le clothianidine, l'imidaclopride et le thiamétoxame, depuis 2013. Malgré un différend, au sein du nouveau gouvernement, entre Stéphane Travert, ministre de l'Agriculture et Edouard Philippe, le Premier ministre n'en démord pas et maintiendra cette interdiction. Elle entrera en vigueur dès le 1er septembre 2018 avec toutefois des dérogations.

1. Consulter les synthèses des études faites par la FRB
http://www.fondationbiodiversite.fr/fr/actualite/898-menaces-sur-les-pollinisateurs.html?showall=&start=1

Réactions2 réactions à cet article

Les études se succèdent, se complètent et renforcent ainsi le faisceau d'indices. On ne doit désormais plus être bien loin de la preuve incontestable, tout du moins pour les gens à peu près sains d'esprit ou non liés aux intérêts de l'agro-chimie conventionnelle.
Par ailleurs, l'abeille domestique n'est-elle pas l'arbre qui cache la forêt : l'étude semble hélas faire l'impasse sur le sort des nombreuses espèces sauvages qui jouent un rôle cumulé probablement plus décisif dans la pollinisation des plantes à fleurs.
Peut-on également savoir ce que seront les dérogations envisagées à cette interdiction en France ?

Pégase | 07 septembre 2017 à 21h32 Signaler un contenu inapproprié

S'agissant des produits interdits, l'Anses a réalisé une étude montrant les produits alternatifs efficaces à certains néonicotinoïdes. Nous avions fait un point scientifique ici : https://www.actu-environnement.com/ae/news/neonicotinoides-insecticides-alternatives-avis-Anses-28686.php4
Mais au sujet des dérogations, cela pourrait faire effectivement l'objet d'un prochain bilan.

La rédaction | 08 septembre 2017 à 09h46 Signaler un contenu inapproprié

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