Par un arrêt en date du 22 février 2016 (1) , le Conseil d'Etat a rejeté les recours du Canton de Genève contre plusieurs décisions de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) fixant des prescriptions complémentaires à EDF sur le site de la centrale nucléaire du Bugey (Ain). Cet échec devant le juge administratif explique certainement la décision de la collectivité suisse, qui vient de déposer une plainte dirigée contre cette même centrale, de se tourner vers le juge pénal.
Mais si la requête du Canton de Genève a été rejetée, la Haute juridiction administrative apporte dans sa décision plusieurs précisions importantes quant à la nature des actes pris par l'ASN.
Le Conseil d'Etat considère que l'édiction de nouvelles prescriptions techniques par l'ASN, faisant suite à la transmission par l'exploitant du rapport de réexamen de sûreté qu'il doit adresser tous les dix ans au ministre chargé de la sûreté nucléaire, ne constitue pas une décision implicite d'autoriser l'exploitation pour dix années supplémentaires.
Le Conseil d'Etat dégage cette solution en s'appuyant sur les dispositions des articles L. 593-1 et suivants du code de l'environnement (2) . Selon celles-ci, aussi longtemps qu'aucun décret de mise à l'arrêt définitif et de démantèlement n'est intervenu, une installation nucléaire de base (INB) est autorisée à fonctionner, dans des conditions de sûreté auxquelles il appartient à l'ASN de veiller.
Le Conseil d'Etat juge également que l'analyse par l'ASN du rapport de réexamen de sûreté constitue un simple avis qui ne présente pas le caractère d'une décision faisant grief. Les recours contre une telle analyse sont donc irrecevables.
Règles dépourvues de caractère impératif
La Haute juridiction précise par ailleurs qu'à la différence des prescriptions que l'ASN peut édicter sur le fondement de l'article L. 592-19 du code de l'environnement (3) , afin de compléter les dispositions des décrets et arrêtés pris en matière de sûreté nucléaire, les "règles fondamentales de sûreté" qu'elle élabore, et qui sont progressivement remplacées par des "guides de l'Autorité de sûreté nucléaire", sont dépourvues de caractère impératif.
"Il appartient toutefois au juge de prendre en compte ces «règles» ou «guides» parmi les éléments de fait et de droit appréciés dans son contrôle de l'évaluation qui a été faite du risque par l'Autorité de sûreté nucléaire", indique la décision.