Le retard de l'EPR et la hausse vertigineuse de son coût sont « un échec pour toute la filière électronucléaire française », estime Bruno Le Maire, ce lundi 28 octobre, à l'occasion de la présentation du rapport de Jean-Martin Folz sur la construction du réacteur nucléaire de Flamanville (Manche). Le ministre de l'Économie demande à EDF de lui remettre d'ici un mois « un plan d'action » pour remettre à flot la filière nucléaire française.
Après validation par l'État, le plan d'action fera l'objet d'un point d'étape fin 2020. Le Gouvernement compte ainsi disposer de toutes les données mi-2021, avant de décider d'une éventuelle construction de nouveaux réacteurs. Cette décision ne sera pas prise avant la mise en service de l'EPR de Flamanville, fin 2022, a toutefois rappelé Élisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire.
Un plan d'action en six points
« La filière nucléaire doit se ressaisir », prévient Bruno Le Maire. Le ministre souhaite que le plan d'action commandé à EDF aborde six sujets. Le premier point est la gouvernance des grands projets d'EDF. Il s'agit ici de réorganiser les équipes de l'entreprise pour, notamment, mieux fixer les responsabilités. Dans le même esprit, le plan portera aussi sur « l'établissement des responsabilités tout au long de la chaîne de production ». Un autre point concerne la poursuite de l'amélioration de la coordination entre EDF et Framatome. Cette meilleure coordination, engagée avec la reprise de Framatome par EDF, doit assurer « une intégration industrielle de la plus haute qualité ».
L'échec de l'EPR est aussi lié au retard de signalement des défauts de construction à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Bruno Le Maire attend donc « un dialogue plus étroit entre l'ASN et EDF » pour placer au même niveau la construction des réacteurs et la sûreté en exploitation.
Le ministre souhaite aussi que le plan d'action dresse un bilan des compétences de la filière nucléaire, en particulier s'agissant des métiers critiques. Cet aspect du plan d'action, qui pourra être élaboré dans le cadre du Groupement des industriels français de l'énergie nucléaire (Gifen), abordera, par exemple, le problème de la pénurie de soudeurs de haut niveau. Enfin, le plan devra montrer comment les problèmes rencontrés à Flamanville ont été pris en compte en vue de l'exportation, en particulier sur le chantier de Hinkley Point Angleterre).
Un programme de construction pour relancer la filière
La filière doit aussi réaliser un effort d'investissement et de recrutement pour reconstruire ses compétences. Le rapport pointe en particulier la nécessité d'une « profonde remise à niveau des capacités industrielles et des ressources humaines » de Framatome, ainsi que « [les] efforts considérables de formation initiale et d'entretien des compétences » qui doivent être réalisé en matière de soudure. « Le renouveau d'une culture de qualité (…) est aujourd'hui une nécessité absolue », estime aussi Jean-Martin Folz.
Pour réussir cette refondation, la filière nucléaire doit avoir de la visibilité sur plusieurs années. « Il s'agit concrètement d'afficher des programmes stables à long terme de construction de nouveaux réacteurs en France et d'entretien du parc existant », recommande Jean-Martin Folz en conclusion de son rapport.