L'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa) publie ce lundi 13 mars son rapport annuel (1) . En introduction, son président adresse une lettre ouverte au Président de la République, aux présidents des deux assemblées et au Premier ministre. "Cette année, en raison du calendrier électoral, la portée des recommandations est accrue par le débat politique qui se tient dans notre pays", explique Victor Haïm, mettant en avant quatre recommandations "qui nécessitent l'engagement du Président de la République, du Parlement et du gouvernement". Et de préciser que "ce rapport est l'occasion de rappeler tout ce qui n'a pas été fait et les mesures concrètes qu'il reste à prendre".
Restreindre les vols de nuit les plus bruyants
Victor Haïm le rappelle, les nuisances aériennes ne sont pas un sujet anodin. Près de 7 millions de Français vivent dans des zones survolées plusieurs fois par jour par des avions volant à moins de 2.000 mètres. "Pour certaines personnes, c'est insupportable, alors que d'autres ne s'en rendent même pas compte", explique-t-il à Actu-Environnement. Qu'ils s'en plaignent ou non, nombre d'entre eux subissent des problèmes cardiaques et souffrent du stress. "C'est objectif", insiste Victor Haïm, ajoutant que "pour la société, il s'agit d'une question de solidarité en même temps que d'un problème économique".
Réduire les zones impactées et mieux informer
Les PEB et PGS
Le plan d'exposition au bruit (PEB) est un document d'urbanisme qui fixe les conditions d'utilisation des sols exposés aux bruits aériens. Il limite les constructions pour ne pas augmenter la population exposée. Il définit quatre zones, allant de A (exposition très forte) à D (exposition faible), la dernière n'étant obligatoire qu'autour des onze aéroports les plus importants, soumis à la TNSA.
Le plan de gêne sonore (PGS) délimite les zones dans lesquels les riverains peuvent bénéficier, sous certaines conditions, de l'aide à l'insonorisation des logements. Onze aéroports en sont dotés. Il définit trois zones, de 1 (très forte nuisance) à 3 (nuisance modérée).
Parallèlement, il faut améliorer l'information des personnes qui s'installent à proximité d'un aéroport. Elles connaissent l'existence de la plateforme mais ignorent ou sous-estiment les nuisances sonores. L'Acnusa souhaite qu'une loi oblige les propriétaires en zone de restriction d'un PEB ou dans le périmètre d'un plan de gêne sonore (PGS) à informer par écrit le futur acquéreur ou locataire. L'information devrait préciser le nombre annuel moyen de vols sur l'aéroport et exprimer clairement la nuisance associée. Dans le même ordre d'idée, il est indispensable de racheter les logements situés dans la zone la plus impactée des PGS. Là aussi, l'Acnusa souhaite l'adoption d'une loi en ce sens. Les logements concernés seraient rachetés par les aéroports à un prix équivalent de celui qui serait le leur s'ils étaient dans une zone voisine moins impactée. Environ 250 logements sont concernés à proximité d'Orly (Val-de-Marne) et une trentaine à proximité de Toulouse.
Déplafonner la taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires
Enfin, l'Acnusa revient sur le plafonnement de la taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires (TNSA). Celle-ci est affectée aux travaux d'insonorisation, mais en 2014, elle a été plafonnée : les sommes au-delà du plafond sont reversées au budget de l'Etat et ne financent donc pas l'insonorisation. Certes, la loi de finance rectificative pour 2016 a relevé le plafond à 55 millions, contre 47 millions initialement, mais elle ne l'a pas supprimé. "Il faut mettre fin à cette absurdité", dénonce Victor Haïm, expliquant qu'il s'agit d'"un détournement des fonds destinés aux victimes des nuisances aériennes". Surtout, cela revient "à percevoir des compagnies aériennes un supplément d'impôt sur les sociétés au mépris du principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt".
La critique est d'autant plus vive que les logements dont l'isolation phonique est financée par la TNSA sont ceux construits avant l'adoption des PEB et PGS. Or, la TNSA finance 80% des travaux, le solde étant à la charge des propriétaires. "C'est faire supporter par les victimes la réparation d'un préjudice qui ne leur est absolument pas imputable". Une situation "inadmissible", explique Victor Haïm qui plaide pour une prise en charge intégrale.