Alors que le débat sur la culture du maïs génétiquement modifié de Monsanto ne cesse de prendre de l'ampleur, le géant allemand de la chimie BASF a annoncé, lundi 16 janvier, l'arrêt du développement de nouveaux produits transgéniques destinés exclusivement au marché européen. Cette décision est motivée par les opinions publiques européennes qui sont majoritairement contre les OGM.
"Nous sommes convaincus que les biotechnologies vertes sont cruciales pour le XXIe siècle. Mais elles ne sont pas suffisamment acceptées dans de nombreuses régions en Europe par la majorité des consommateurs, des agriculteurs et des responsables politiques", a estimé Stefan Marcinowski, membre du directoire de BASF chargé des OGM, ajoutant que "cela n'a pas de sens économique de continuer à investir dans des produits devant être exclusivement cultivés dans ce marché".
La commercialisation et la R&D de pommes de terre transgéniques abandonnées
La première conséquence de cette annonce est d'ici 2013, l'arrêt total de la culture et la commercialisation d'Amflora, une pomme de terre OGM renforcée en amidon. Autorisée depuis 2010, cet OGM était seulement cultivée sur une parcelle de deux hectares en Allemagne depuis le scandale suédois qui avait terni la réputation de BASF. Cette dernière avait introduit par erreur dans un champ d'Amflora en Suède une autre de ses pommes de terre OGM, Amadea, pas encore autorisée par les instances européennes.
La recherche-développement sur d'autres produits transgéniques dédiés exclusivement au marché européen, comme une pomme de terre amidonnée résistante au mildiou et une variété de blé résistante aux champignons, va être également abandonnée. En revanche, le groupe a décidé de laisser les procédures de demande d'autorisation auprès de l'Union européenne des pommes de terre transgéniques déjà développées Amadea, Modena et Fortuna suivre leur cours. Mais, en cas de validation, BASF a toutefois précisé qu'il ne souhaitait pas les commercialiser sur le Vieux continent.
Vers des marchés porteurs
En indiquant son retrait partiel du marché européen, BASF souhaite désormais concentrer ses activités de biotechnologies végétales sur les principaux marchés que sont l'Amérique du Nord et du Sud. L'entreprise compte donc transférer le siège de BASF Plant Science, actuellement à Limburgerhof en Allemagne, dans le Research Triangle Park, près de Raleigh aux Etats-Unis.
"Le pipeline de projets de BASF Plant Science restera concentré sur le développement de plantes ayant un meilleur rendement et une plus grande résistance aux conditions de stress comme la sécheresse. Cela inclut la collaboration avec Monsanto dans le maïs, le soja, le coton et le colza", précise le communiqué de presse de l'Allemand. Fin 2011, le premier projet issu de ce partenariat, un maïs résistant à la sécheresse, a ainsi été homologué pour la culture aux Etats-Unis.
La délocalisation du siège risque, par contre, d'avoir quelques répercussions sociales. Environ 140 emplois seraient ainsi menacés, mais BASF étudierai la possibilité de les replacer dans d'autres secteurs d'activités du groupe.
Une décision qui réjouit les opposants aux OGM
A l'image de Greenpeace, plusieurs organisations se sont félicitées à l'annonce du retrait de BASF. Pour les Amis de la terre, "un nouveau clou est planté dans le cercueil pour les aliments génétiquement modifiés en Europe. Personne ne veut les manger et peu d'agriculteurs veulent les cultiver". Même degré de satisfaction pour Corinne Lepage, présidente de Cap21, qui estime que "cette décision montre bien qu'il n'y a pas de marché pour les OGM en Europe. [ces derniers] ne vont pas améliorer la compétitivité de l'agriculture européenne et ne sont certainement pas une réponse aux défis environnementaux et sociaux que celle-ci doit relever ". La candidate à la future élection présidentielle s'est également réjouie de l'arrêt de la culture de l'Amflora dont les risques sanitaires n'ont pas été suffisamment évalués par l'Agence européenne de sécurité sanitaire (EFSA).
Du côté de Bruxelles, la Commission européenne a annoncé avoir pris acte de la décision du groupe allemand BASF de renoncer à développer des produits transgéniques pour le marché européen et "n'autorisera aucun OGM avant d'avoir obtenu un accord sur les règles à suivre pour leur culture".