Une multiplication par trois du nombre de sites d'implantation d'antennes relais de téléphonie mobile serait nécessaire pour maintenir la même qualité de couverture lors d'un abaissement global de l'exposition aux ondes électromagnétiques en façade et au sol : c'est l'un des résultats de l'expérimentation (1) menée sur différents quartiers pilotes (2) . Lancée à la suite d'une table-ronde interministérielle sur les radiofréquences (3) , l'opération s'est étalée de 2009 à 2013.
La première phase d'état des lieux avait montré que le niveau d'exposition médian d'exposition s'avérait inférieur aux valeurs limites réglementaires (comprises entre 40 V/m et 61 V/m pour les fréquences utilisées par la téléphonie mobile). Environ 90% des niveaux d'exposition modélisés (4) pour les seize zones d'expérimentation seraient en effet inférieurs à 0,7 V/m et 99% à 2,7 V/m. Les environnements identifiés comme les plus exposés restent les centres villes anciens denses et les zones urbaines modernes denses.
Le comité opérationnel sur les ondes de téléphonie mobile (5) a finalement remis lundi 26 août les résultats de la seconde phase de l'opération ainsi que des propositions pour encadrer la concertation à Philippe Martin, ministre de l'Écologie, et à Fleur Pellerin, ministre déléguée en charge de l'économie numérique. Les conclusions ne font cependant pas l'unanimité.
L'approche "qualité de service" dénoncée
Pour cette deuxième phase d'expérimentation, les opérateurs ont tout d'abord réalisés des simulations numériques de réduction de l'exposition à 0,6 V/m (à puissance maximale des émetteurs) sur l'ensemble de la zone d'expérimentation pour les réseaux 2G et 3G.
Des mesures sur le terrain ont ensuite vérifié le maintien ou pas de la qualité de la couverture GSM 1800 (extérieure et intérieure) après l'abaissement effectif de puissance pour plusieurs émetteurs (trois si possible, un par opérateur sur une seule et même fréquence (GSM 1800)) de la zone d'expérimentation.
"Ces simulations (..) ont montré qu'un abaissement de l'exposition en façade et au sol à 0,6 V/m, s'accompagnerait d'une forte détérioration de la couverture du réseau, en particulier à l'intérieur des bâtiments", souligne le rapport.
Les relevés sur le terrain (6) auraient constaté des pertes en moyenne de 82% de la couverture à l'intérieur des bâtiments à Paris 14ème, de 44% à Grenoble et de 37% à Grand-Champ.
"L'objectif de départ était vicié d'avance puisqu'il était d'évaluer les effets sur la qualité de service d'une baisse des émissions, qui aurait comme répercussion une baisse de l'exposition, sans réflexion sur ce que doit être la téléphonie mobile, a regretté Janine le Calvez, présidente de l'association Priartem, doit-on avoir une qualité de service parfaite après 4 murs, au 4e sous sols etc. ?"
Elle déplore également que les mesures de correction envisagées pour rétablir la qualité de la couverture ne reposent que sur l'existant. Ces dernières ont en effet évalué le nombre de sites d'implantation d'antennes qu'il serait nécessaire d'ajouter afin de restaurer la couverture initiale tout en maintenant un niveau d'exposition inférieur à 0,6 V/m en façade et au sol.
Une méthodologie contestée
"L'objectif poursuivi est de discréditer la valeur cible de 0,6 V/m pourtant recommandée par le Conseil de l'Europe", dénonce Robin des toits dans un communiqué. Selon l'association, le cahier des charges mis en place pour l'expérimentation de la baisse de puissance n'a pas été respecté et les résultats s'en trouvent biaisés.
Lors du changement de présidence du comité (7) en 2011, des expériences déjà réalisées à Paris 14e et à Grenoble avec le Comop, auraient été refaites avec des modes opératoires différents.
"Pour les reconfigurations faites par simulation, nous avions convenu d'une typologie d'antennes - macrocellulaires -, le CSTB avait effectué un repérage des bâtiments hauts et ces derniers ont été équipés d'antennes de manière arbitraire pour que cela soit reproductible quelque soit l'endroit où nous faisons la simulation", explique Etienne Cendrier, porte-parole de Robin des Toits. Selon l'association, l'expérience réalisée à Grenoble avec le premier protocole montre que pour maintenir la qualité du service en limitant l'exposition à 0,6V/m, le nombre d'antennes relais devrait être multiplié par 1,5 contre 3 avec les "nouveaux" arbitrages.
""Lorsqu'ils ont commencé à déployer leurs réseaux il y a près d'une vingtaine d'années, les opérateurs ont cherché, en priorité, à installer des antennes sur les bâtiments les plus hauts. Comme il s'est avéré impossible de le faire à Grenoble, les opérateurs ont déployé leurs réseaux sur des bâtiments de moindre hauteur, se justifie FFTélécoms, il serait contreproductif d'ajouter à Grenoble des antennes sur les bâtiments les plus hauts car ces ajouts provoqueraient des brouillages et dégraderaient la qualité des services mobiles".
Vers une augmentation de l'exposition avec la 4G
Si le déploiement de la 4G n'a été prise en compte qu'en 2012 avec des travaux de simulation de l'impact du déploiement d'antennes 4G (LTE) théoriques, les résultats montrent une augmentation de l'exposition du public.
"En considérant des émetteurs 4G théoriques avec des hypothèses de déploiement en principe majorantes, on obtiendrait sur l'ensemble de ces villes, une augmentation moyenne de l'exposition en façade et au sol de 50% environ", estime le rapport. En guise d'exemple, il indique que sur la zone d'expérimentation de Paris 14ème, l'exposition moyenne au sol passerait de 0,6 V/m à 0,9 V/m environ.