
Les conditions météorologiques extrêmes, la baisse des réserves d'eau et la dégradation des terres agricoles pourraient causer le déplacement forcé de 250 millions de personnes d'ici 2050, selon les prévisions les plus optimistes annoncées par le Haut commissaire adjoint de l'ONU pour les réfugiés, L. Craig Johnstone, à l'occasion de la conférence internationale sur le climat de Poznan (Pologne) en décembre dernier. Le nombre de ces ''réfugiés climatiques'' pourrait ainsi augmenter de six millions au minimum par an, a-t-il précisé.
De son côté, dans un rapport publié en mai 2007, l'association britannique Christian Aid avait estimé qu'ils seraient plus d'un milliard de personnes d'ici 2050 à fuir leur habitat en raison de la pénurie des ressources mais aussi des conflits qui résulteront de ces bouleversements climatiques.
Si, outre une réduction des émissions de gaz à effet de serre, les Nations Unies recommandent d'anticiper l'aide humanitaire et d'être en mesure de distribuer dans les zones vulnérables des stocks d'aide vingt fois supérieurs aux stocks actuels, l'ONG Oxfam International tire d'ores et déjà la sonnette d'alarme.
375 millions de victimes d'ici à 2015
Les organisations humanitaires risquent d'être submergées d'ici à 2015 par l'explosion du nombre de personnes frappées par des catastrophes climatiques, prévient Oxfam dans le rapport intitulé ''Le droit de survivre'', publié le 21 avril. Basé sur les données* portant sur 6.500 catastrophes climatiques depuis 1980, le rapport d'Oxfam indique que les crises climatiques pourraient affecter plus de 375 millions de personnes chaque année d'ici 2015 (contre 250 millions aujourd'hui), soit une augmentation de 54% des victimes, menaçant d'accabler lourdement le système d'aide humanitaire. Cette estimation ne prend pas en compte les victimes de conflits armés ou de catastrophes naturelles comme les tremblements de terre ou les éruptions volcaniques.
Le système d'aide humanitaire ''doit être réformé d'urgence''
L'incapacité des leaders mondiaux à gérer ces risques ainsi qu'un système d'aide humanitaire inadapté à la situation actuelle, aggravent encore plus cette situation, souligne l'ONG. Oxfam estime en effet que le système d'aide actuel est désuet mais aussi injuste, et dénonce une inégalité de traitement des victimes. Quand 1.241 dollars ont été dépensés pour chaque survivant du tsunami de 2004 en Asie du Sud-Est, 23 dollars seulement ont été alloués à chaque victime de la crise humanitaire au Tchad. L'aide humanitaire fonctionne comme un grand jeu de cartes dont la donne est aléatoire et non basée sur les besoins des individus. La réponse est souvent irrégulière, insuffisante, en retard et inadéquate, déclare Jeremy Hobbs, directeur général d'Oxfam International. Une réforme fondamentale centrée sur les personnes dans le besoin doit être mise en place, plaide-t-il.
25 milliards de dollars nécessaires
Le changement climatique menace déjà notre travail d'éradication de la pauvreté, secourir des millions de personnes devenant de plus en plus difficile. Nous devons aborder dès à présent la question du changement climatique, prévient Oxfam. Le monde doit repenser la manière avec laquelle il prévient les catastrophes, s'y prépare et y réagit, ajoute l'ONG.
A huit mois de la conférence sur le climat de Copenhague (Danemark) qui doit aboutir à un nouveau traité post-Kyoto, Oxfam appelle les pays riches à respecter les engagements internationaux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les nations doivent conclure un accord international afin d'éviter un changement climatique catastrophique, cesser d'accorder de l'aide de manière aléatoire et améliorer radicalement leur réponse aux catastrophes, indique le directeur général d'Oxfam International. L'ONG exhorte également les pays riches à fournir une aide d'au moins 50 milliards de dollars par an afin d'aider les pays pauvres à s'adapter aux changements climatiques.
Renforcer les mesures d'adaptation aux changements climatiques
En décembre dernier, le Haut commissaire adjoint de l'ONU pour les réfugiés avait aussi appelé les pays à renforcer les mesures d'adaptation aux changements climatiques. L'Europe n'est également pas à l'abri des effets du réchauffement. Car si l'UE s'est engagée à réduire de 20% ses émissions d'ici 2020, il n'est plus possible d'inverser la machine du changement climatique et ses conséquences sont irréversibles, a prévenu le commissaire européen à l'Environnement Stavros Dimas à l'occasion de la publication du Livre blanc d'adaptation aux changements climatiques le 1er avril par la Commission. Il devient donc urgent de se préparer, a-t-il souligné. Rappelons que selon un rapport de l'Agence européenne pour l'environnement (AEE), l'Organisation mondiale de la santé et le Centre de Recherche de la Commission européenne publié en septembre 2008, le changement climatique menace particulièrement les zones montagneuses et côtières de l'Europe, mais également la Méditerranée et l'Arctique. En Europe, 4 millions de personnes et 2.000 milliards d'euros de biens pourraient ainsi être menacés par les inondations d'ici la fin du siècle. Le rapport fait également état de la disparition de deux-tiers des glaciers alpins depuis 1850.
* Estimations du Centre for Research on the Epidemiology of Disasters (CRED) de l'université de Louvain (Belgique).