Alors que les concentrations de particules dépassent les seuils d'alerte dans de nombreuses régions, l'Ademe publie les résultats d'une étude visant à caractériser les sources d'émissions de ces polluants en zone rurale. Le programme Particul'air, qui a réalisé l'inventaire du niveau de particules (PM10, PM2.5, Benzo(a)Pyrène et métaux lourds) dans neuf villages ruraux français, a permis d'identifier les sources d'émission pour 82 % des concentrations.
Les campagnes de mesures, réalisées entre mars 2009 et février 2010, soulignent l'importance des émissions du secteur agricole pour les particules les plus grosses et du chauffage au bois pour les particules les plus fines. Cependant, "la mesure des particules et du BaP [Benzo(a)pyrene] indique qu'il n'y a pas de problématique de pollution d'ampleur nationale en zone rurale liée à l'utilisation du bois comme source d'énergie, puisque pratiquement tous les sites respectent les valeurs réglementaires définies, à l'exception de Lescheraines (Savoie, 73)", indique l'étude. Les transports routiers ne représentent qu'une faible proportion des émissions de particules fines (10 % en moyenne). Globalement, les taux de particules sur ces sites ruraux seraient influencés par le niveau de fond régional. Pour les 18 % d'émissions restantes d'origine indéterminée, l'Ademe recommande de mener des travaux de recherche complémentaires, notamment pour mieux identifier les émissions de la petite industrie.
Mieux connaître les sources d'émissions
Pour chacune des neuf communes, l'inventaire des émissions a permis d'identifier le secteur d'activité prépondérant dans le rejet de particules. Résultat : "Les concentrations en particules indiquent une relative bonne homogénéité sur l'ensemble des sites malgré leurs fortes disparités liées aux émissions, à la topographie ou à la météorologie". En Rhône-Alpes, Poitou-Charentes et Auvergne, les niveaux en particules sont équivalents à la zone urbaine la plus proches. "Les épisodes sont donc essentiellement gouvernés par des transports à grande échelle avec des influences locales plus ou moins variées comme l'ont montré les comparaisons horaires des concentrations. Les valeurs moyennes par campagne mettent en relief la saisonnalité des mesures sur tous les sites, avec des concentrations plus fortes en hiver liées à l'ajout supplémentaire de la source chauffage et à des conditions climatiques plus défavorables à la dispersion atmosphérique".
L'étude souligne que "le secteur agricole émet en moyenne deux tiers des poussières totales et qu'il rejette principalement des grosses particules (diamètre supérieur à 10 μm), à hauteur de 79 % en moyenne". Le secteur résidentiel, via la combustion de biomasse pour le chauffage, est prépondérant pour l'émission des particules les plus fines.
Des enquêtes locales conjuguées aux mesures ont permis de définir la part du bois consommé en appoint : "Sa prise en compte double en moyenne les quantités de bois consommées, faisant ressortir les lacunes qui peuvent exister sur les inventaires qui ne prennent pas ou mal en compte cette source souvent difficile à estimer. L'enquête locale a également permis d'identifier le type d'appareil utilisé et la qualité du combustible". La biomasse représenterait en moyenne 22 % des émissions de poussières totales, 34 % des émissions de PM10 et 53 % des émissions de PM2,5.
"Enfin, l'industrie, partiellement identifiée sur les communes, peut amener des taux d'émissions de particules non négligeables".
Le cas de Lescheraines : pollution locale et pollution subie
A Lescheraines, la biomasse représenterait 88 % des émissions de poussières totales, 80 % des émissions de PM10 et 82 % des émissions de PM2,5. "La caractérisation chimique des particules sur Lescheraines indique en l'état que la combustion du bois est la principale source des émissions mais n'a pas permis de définir la part de responsabilité entre le secteur industriel et domestique (notamment le chauffage au bois et le brûlage de déchets par l'artisanat et les populations locales)", indique l'étude, qui poursuit : "Ce cas de Lescheraines met en exergue la nécessité de mieux connaître la situation des petits émetteurs industriels, nombreux et disséminés sur le territoire, vis‐à‐vis du contexte réglementaire des émissions ou en vue d'une action des pouvoirs publiques plus ciblée".
Si la configuration du site, la météorologie locale et les caractéristiques de l'atmosphère au niveau régional contribuent très probablement à l'accumulation significative des polluants émis dans le commune, notamment durant la période hivernale, Lescheraines n'est cependant pas la principale émettrice de particules qu'elle subit. Les caractéristiques de ce site, encaissé au fond d'une vallée savoyarde, posent d'ailleurs la question de sa représentativité par rapport aux sites de même type.