En 2011, la part de travaux qui allait au-delà de ce qui est imposé par la réglementation thermique 2005, représente près de 30% de l'activité sur ouvrages de bâtiment de l'ensemble des entreprises impliquées dans les prestations d'économie d'énergie ou d'eau, selon une enquête (1) du ministère de l'Ecologie publiée ce début d'année. Ce dernier a essayé de mesurer l'anticipation du secteur à la nouvelle réglementation.
A la veille de l'entrée en vigueur de la RT 2012 (2) , différents acteurs se posaient la même question. ''De nombreux maîtres d'ouvrage et acteurs de la construction ne perçoivent pas les difficultés qui les attendent, estimait alors Claude Lignon, directeur développement durable ''construction'' de Bureau Veritas, le seuil de 50kWh/m²/an va être compliqué à respecter''.
270.000 entreprises concernées
270.000 entreprises seraient concernées par l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments. La situation serait contrastée selon les secteurs : la part des travaux "performants" serait ainsi plus importante dans la rénovation (32%) que pour la construction neuve (27%). "45% des prestations d'économies d'énergie performantes, soit 15 milliards d'euros, portent en 2011 sur des ouvrages de rénovation dans le logement", précise le ministère. Le type d'habitat joue également : la part des travaux qui anticipent les critères de la réglementation thermique à venir s'élève à 33 % pour les ouvrages sur les logements contre 24% pour les bâtiments non résidentiels (BNR).
Parmi ces prestations "performantes", les professionnels estiment majoritairement détenir des compétences en isolation intérieure (37% des entreprises interrogées). Et 73% ont effectivement réalisé ces prestations en 2011. Ensuite, 32% se considèrent performants pour l'installation de fenêtres, 24% pour l'isolation extérieure, 19% pour l'installation de systèmes de ventilation mécanique à double flux et 19% également, la pose de chaudière à condensation.
"La part des entreprises qui ont des compétences améliorant l'efficience de la production d'énergie augmente avec leur taille", pointe le ministère. Une exception toutefois : les prestations liées à l'étanchéité du bâti. Dans ce cas, d'après l'enquête, la taille n'intervient plus lorsque les entreprises dépassent le seuil des 10 salariés.
Toutefois, à la lumière de la répartition du chiffre d'affaires, la logique s'inverse : les entreprises de petite taille étant plus nombreuses, elles participent en effet plus que celles de plus de 50 salariés à la mise en œuvre de prestations performantes. Les grosses sociétés (de 50 salariés et plus) ne représentent ainsi que 21% du chiffre d'affaires tandis que celles de 10 à 49 salariés pèsent pour 33% de l'ensemble et celles de 0 à 2 salariés comme celles comptant 3 à 9 salariés compte chacune pour 23%.
Néanmoins, "au sein de chaque groupe de taille d'entreprise, le chiffre d'affaires sur ouvrages de bâtiment généré par la mise en œuvre de prestations performantes est, en proportion, quasiment stable autour de 3 % (de 2 % pour les entreprises de 50 salariés et plus à 31 % pour les entreprises de 0 à 2 salariés)", contrebalance le ministère.
En 2011, 13% des entreprises n'avaient aucune connaissance de la RT2005
Une tendance pourrait refléter le niveau d'anticipation des entreprises à la nouvelle réglementation : 35% des 270.000 entreprises qui avaient, en 2011, les compétences techniques pour réaliser des prestations permettant des économies d'énergie ou d'eau n'avaient qu'une connaissance générale de la RT 2005. Elles connaissaient une partie de son contenu sans le mettre en œuvre. 21% s'étaient appropriées le dispositif et savaient le mettre en œuvre de manière concrète en suivant les normes et les prescriptions qui lui sont associées. 13% n'avaient aucune connaissance.
"Les entreprises ayant répondu à l'enquête sont peu nombreuses à indiquer qu'elles souhaitent acquérir de nouvelles compétences pour 2013", rapporte le ministère. Là encore, selon le ministère, plus les entreprises sont grandes, plus elles sont nombreuses à posséder des connaissances opérationnelles qu'elles soient sur la réglementation thermique dans l'existant, labels HPE, THPE et BBC3 et certifications de bâtiments. 54% des entreprises de 50 salariés et plus ont des connaissances opérationnelles de la RT 2005, contre 18% pour les entreprises de 0 à 2 salariés.
83% d'entre elles détiennent également une qualification (3) contre 71% pour les entreprises de 10 à 49 salariés, 33% pour les entreprises de 3 à 9 salariés et 12% pour les entreprises de 0 à 2 salariés.
Le coût des matériaux innovants, un frein aux prestations performantes
Selon les entreprises interrogées, les freins à la mise en œuvre de prestations performantes seraient les coûts des matériaux innovants (68%), les réglementations techniques trop complexes et qui évoluent trop vite (55%), le manque d'information sur les aides financières associées aux prestations (53%), l'absence d'une demande exprimée par la clientèle (48%) et le marché déjà contrôlé par des concurrents (45%).
Cette question des coûts est également soulevée dans une étude du cabinet Xerfi (4) , qui estime que l'augmentation de la facture liée à la RT2012 s'inscrira dans une fourchette de 15-20% les premières années. "Les pressions tarifaires ne s'exerceront pas seulement sur les équipements ou matériaux, note toutefois le cabinet, le déficit de formation aux techniques de l'éco-construction risque d'entraîner une hausse des salaires dans un secteur déjà en proie aux pires difficultés de recrutement".