« Il est important d'avoir une définition transversale [des perturbateurs endocriniens] dans l'ensemble des réglementations, y compris sectorielle : aujourd'hui elle existe pour les produits phytosanitaires et les biocides. Reste désormais les produits cosmétiques, les jouets et les contenants alimentaires », a indiqué Pierre Bodenez, chef du service des risques liés à l'environnement, des déchets et des pollutions diffuses à la Direction générale de la prévention des risques au ministère de la Transition écologique, lors d'une table ronde sur l'exposition du quotidien aux perturbateurs endocriniens (PE) au Sénat.
La question de la définition de ces substances est sensible. Si elle figure aujourd'hui dans certaines réglementations européennes, les négociations furent longues et les résultats pas toujours à la hauteur des espoirs de différentes associations.
« Nous sommes loin d'avoir une réglementation contraignante. Nous avons 16 PE identifiés sous la règlementation Reach, deux PE identifiés sous les biocides, la Commission européenne a lancé un appel à information sur les cosmétiques, alors que nous avons des milliers de substances qui sont sur le marché ; nous sommes loin du compte », a souligné Natacha Cingotti, responsable santé produits chimiques chez Health and Environment Alliance.
Suivant les réglementations, les obligations ne sont pas les mêmes concernant les données demandées. « Dans le règlement Reach, il existe un référentiel mais pas d'exigences qui permettraient d'imposer aux industriels un complément d'information, pour que les données sur les PE soient disponibles, a pointé Mathieu Schuler, directeur de l'évaluation des risques de l'Anses. Dans la réglementation sur les phytosanitaires, les produits sont ré-évalués tous les cinq ans : l'apport de données va nous permettre de statuer ».
L'Anses travaillera sur six à dix PE par an
En France, l'option retenue différentie les perturbateurs endocriniens avérés, présumés et suspectés. La seconde stratégie sur les PE prévoit ainsi que l'Agence de sécurité sanitaire (Anses) dresse, d'ici la fin de l'année 2021, une liste de ces substances.
« Nous allons publier une liste des substances pour lesquelles la question de l'action endocrinienne est établie. Ensuite, dans le cadre de la Stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, nous avons un engagement pour travailler sur entre six et dix substances par an. Nous déterminerons parmi la liste des substances d'intérêt, lesquelles sont avérées, probables ou suspectées », a précisé Mathieu Schuler.
Celle-ci reconnaît toutefois manquer d'outil diagnostic pour repérer les substances PE. « Dans le cadre du SNPE 2, une plateforme publique-privée Pepper destinée à développer la recherche sur l'identification des perturbateurs endocriniens, a été lancée et j'en suis la présidente », précise-t-elle.
Des échéances importantes au niveau européen
Au niveau européen, des échéances importantes sont prévues pour 2020. La Commission européenne a en effet lancé un examen (fitness check) de la gestion communautaire des perturbateurs endocriniens. Deux consultations ont été lancées en parallèle : l'une à destination des citoyens, qui prendra fin le 9 mars, et l'autre, qui vise les parties prenantes (clôture le 31 janvier).
« Ce qui ressortira de cette consultation constituera la base des actions à venir des cinq prochaines années », a pointé Natacha Cingotti.
Une stratégie sur les produits chimiques est envisagée au second semestre 2020. « La société civile, mais aussi les politiques à Bruxelles, s'attendent à un volet perturbateur endocrinien, note la responsable santé produits chimiques chez Health and Environment Alliance. Juin 2020, c'est aussi la date butoir qui a été donnée à la fois par le Parlement européen et le Conseil à la Commission pour agir concernant une définition horizontale des PE au niveau européen, mais également sur la catégorisation, notamment pour intégrer les PE suspectés. »