L'autoconsommation, nouveau leitmotiv de la filière photovoltaïque ? Alors que le tarif d'achat devrait être enterré par la concertation sur les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables, les réflexions sur le développement de l'autoconsommation semblent donner un nouveau souffle à ce secteur. Le 2 février, ils étaient 121 (élus, représentants d'entreprise, associations…) à avoir signé le manifeste pour l'autoproduction locale d'énergie renouvelable. "Aujourd'hui, les 800 MW de solaire photovoltaïque annuels fixés comme un seuil par le ministre de l'écologie Philippe Martin représentent un volume d'activités notoirement insuffisant pour la survie de la filière française. Les volumes additionnels, au-delà des tarifs en place et des systèmes d'appels d'offres, passent nécessairement par un développement de l'autoconsommation sur des créneaux complémentaires quand les conditions techniques et économiques sont réunies", peut-on lire en préambule du manifeste.
Les signataires se disent donc favorables aux initiatives permettant de produire l'énergie renouvelable à proximité des lieux de consommation en circuit court (maison, quartier, ville, agglo, département, région). Ce changement de modèle passe par une décentralisation de la compétence énergie, via des régies régionales de l'énergie, et une simplification des démarches administratives pour la production décentralisée. Mais favoriser l'autoconsommation ne suffit pas : il faut promouvoir l'efficacité et la sobriété énergétique, décourager les pratiques non vertueuses en matière de production/consommation d'énergie.
Si le principe même de l'autoconsommation semble faire consensus, le modèle à déployer ne fait pas l'unanimité. Pour l'heure, de nombreux acteurs s'accordent sur le fait que l'échelle la plus appropriée pour développer ce mode de consommation reste le tertiaire, l'industrie et l'îlot urbain.
A son tour, le groupement des particuliers producteurs d'électricité photovoltaïque (GPPEP), signataire du manifeste, publie ses propositions. Et comme son nom l'indique, il se penche sur le cas des particuliers.
Net metering ou tarif d'achat simplifié ?
L'une des questions posées lors de la concertation sur l'autoconsommation, lancée par le ministre de l'Ecologie Philippe Martin, est de savoir comment inciter à l'autoconsommation sans pour autant créer d'effets pervers ni peser sur la contribution au service public de l'électricité (CSPE). Tarif d'achat ? Prime au surplus de production injecté sur le réseau ?
Le GPPEP se penche sur une autre solution mise en avant par de nombreux acteurs : le net metering. En principe, sur une période donnée (un jour, un mois, une année…), est fait le solde consommation / production. Le particulier producteur pourra consommer gratuitement le même volume que celui qu'il a injecté en surplus.
Techniquement, cela peut se faire avec un compteur mécanique qui tourne à l'envers lors d'injection d'électricité sur le réseau. "Mais ce type de compteur ne permet pas de comptabiliser la partie qui a été temporairement envoyée sur le réseau (et donc l'effort à l'autoconsommation qui a été fait). A terme, il conviendra de disposer de compteurs double flux mais, en attendant leur déploiement, une tolérance serait souhaitable pour les usagers disposant encore d'un compteur mécanique".
Si cette solution n'engendre pas de surcoût pour la société (pas de tarif d'achat nécessaire), elle doit être encadrée pour éviter les abus : il serait tentant pour les particuliers de surdimensionner leur installation par rapport aux besoins de consommation. "Lorsque les compteurs double flux (genre Linky) seront disponibles, il conviendra probablement de mettre une limite sur l'énergie injectée en fonction de la puissance installée afin d'inciter à maximiser son autoconsommation". En attendant, le GPPEP propose de ne pas rémunérer le surplus en période de comptage, qui serait annuel. Lorsque les particuliers seront équipés de compteurs électroniques double flux, le GPPEP propose même de donner ce surplus à un fonds public qui pourra les vendre aux fournisseurs d'énergie pour financer ses actions de lutte contre la précarité énergétique ou de promotion de l'efficacité énergétique. Le groupement estime en revanche que ces installations en autoconsommation devraient bénéficier des mêmes aides que les travaux d'économie d'énergie (éco-PTZ, CEE, TVA à taux réduit…).
Pour inciter au développement massif du photovoltaïque, le tarif d'achat pourrait aussi être maintenu pour la vente totale ou seulement du surplus de l'électricité, mais amélioré. Selon le GPPEP, pour réduire l'impact de ces contrats sur la CSPE, il faut "poursuivre le système existant, mais en supprimant la contrainte d'intégration au bâti, qui représente la plus grande partie du coût du tarif d'achat, sans avoir montré d'impact sur le développement d'une technologie nationale".
Revoir le financement du réseau
Enfin, le GPPEP fait des propositions pour financer le réseau. Car l'autoconsommateur continue à utiliser le réseau, même s'il le sollicite moins. Une contribution au kilowatt heure consommé permettrait, selon lui, d'inciter à réduire la consommation d'électricité, à faire de l'autoconsommation, favoriserait le stockage de quartier (jugé plus rentable que le micro-stockage), et ne ferait "pas payer au consommateur la mise en place d'un système coûteux et moyennement efficace alors que ces efforts sont du ressort de la collectivité et donc d'ERDF". Mais à terme, le groupement propose de faire financer le réseau par les citoyens et non les consommateurs car, "étant un bien collectif, il est logique qu'il devienne citoyen et financé par tout le monde, consommateur, producteur, simple utilisateur".