De nombreux obstacles administratifs freinent le développement de l'électricité photovoltaïque en France et en Europe, note le consortium européen PV Legal, dont font partie la branche solaire du Syndicat des énergies renouvelables (SER) et Enerplan.
En France, le dispositif de soutien au secteur a profondément évolué à l'issue du moratoire lancé le 9 décembre 2010 (tarif d'achat révisable tous les trois mois, appels d'offres pour les installations supérieures à 100 kWc…), entraînant des impacts sur le développement de la filière. Par exemple, pour le premier appel d'offres sur les installations supérieures à 100 kW, lancé cet été, les résultats ne seront connus qu'en 2012, ''ce qui suspend quasiment toute activité sur ce segment de marché en 2011''. Même problème pour la révision trimestrielle des tarifs d'achat : les nouveaux tarifs sont connus trois semaines après le début de chaque nouvelle période…
''Ces nouvelles contraintes s'ajouteront certainement aux barrières déjà existantes'', analyse le consortium. Car PV Legal a identifié d'autres freins, plus anciens, liés à la conception et au développement d'une installation photovoltaïque. Les procédures d'autorisations administratives, les règles, les standards techniques et les procédures de connexion au réseau, ainsi que la capacité du réseau, en font partie. En France, l'un des plus mauvais élève européen en termes de délais de raccordement, les principales barrières administratives se regroupent autour de deux thèmes : la durée des démarches administratives et le manque d'adaptation du réseau à une énergie décentralisée.
Des délais de raccordement longs et incertains
''L'impact le plus significatif des barrières administratives est l'allongement du temps nécessaire à l'installation de systèmes photovoltaïques lié d'une part aux nombreux documents administratifs qu'il faut compléter et d'autre part au temps d'attente entre l'envoi d'un document, au gestionnaire de réseau par exemple, et la réception de la réponse'', note le consortium.
''Les professionnels du solaire photovoltaïque souhaitent que l'avis de l'ABF devienne un avis simple. En outre, le pouvoir confié au Maire quant à l'acceptation de la demande d'autorisation devrait se limiter à l'opposabilité ce cette dernière au plan local d'urbanisme et aux troubles qui pourraient être crées et en aucun cas relever d'un quelconque pouvoir d'interprétation'', estime le consortium, qui préconise également d'ouvrir le dialogue avec les ABF afin de les sensibiliser à la question.
Et ce qui pèse le plus lourds, c'est le traitement des dossiers de raccordement par le gestionnaire de réseau. Si la loi Grenelle 2 a institué un délai de deux mois de règlement légal pour effectuer les raccordements d'installations de moins de 3 kWc, avec compensation financière en cas de dépassement [note : le décret qui définit précisément les pénalités encourues par ErDF en cas de dépassement du délai légal de 2 mois pour les installations de moins de 3 kWc n'a toujours pas été publié], aucun délai légal n'est fixé pour les autres types d'installations. ''Les délais annoncés par le gestionnaire de réseau sont précisés aux conditions particulières de la convention de raccordement''. PV Legal demande qu'un délai, adapté aux différents types d'installation, et des pénalités de retard soient définis au niveau réglementaire.
Car le non-respect des délais de traitement peut avoir de lourdes conséquences. L'arrêté fixant les conditions d'achat de l'électricité photovoltaïque précise en effet que le contrat d'achat, conclu pour vingt ans, commence lors de la mise en service de l'installation, celle-ci devant intervenir dans un délai de 18 mois à partir de la date de demande complète de raccordement au réseau public, faute de quoi la durée du contrat d'achat est réduite du triple de la durée de dépassement. ''Le non-respect des délais peut donc être particulièrement préjudiciable pour les grandes installations, dont les délais de réalisation sont assez longs'', analyse le consortium.
Un conflit oppose également des porteurs de projets à ErDF sur le retard de remise de la proposition technique et financière (PTF) qui devait permettre d'éviter aux projets de tomber sous le coup du moratoire français.
Anticiper l'adaptation du réseau à une énergie décentralisée
Le manque d'infrastructures ou leur mal adaptation constitue également un frein au développement de l'électricité photovoltaïque. ''Le raccordement et l'impact des installations photovoltaïques sur le réseau est un sujet relativement récent en France. En effet, les réseaux sont traditionnellement dédiés à la distribution d'électricité dans les quartiers et communes'', analyse le consortium.
Or, le développement d'infrastructures électriques nécessite des hypothèses solides, un investissement conséquent et des délais importants. La difficulté actuelle réside dans la planification des lieux d'implantations des unités de production. Une concertation entre les représentants de la filière et le gestionnaire de réseau pourrait permettre d'anticiper le développement du réseau. Le consortium rappelle que la réalisation d'un schéma de raccordement est prévue dans la loi Grenelle 2.
Il propose notamment d'améliorer les procédures de traitement des demandes de raccordement au réseau basse tension (BT) ''de manière à ce que les gestionnaires de réseaux de distribution soient en mesure de développer de nouveaux réseaux BT dimensionnés pour prendre en compte la présence future de systèmes photovoltaïques, par exemple dans le cas de constructions de quartiers ou de zones d'aménagement concerté solaires''. Ce qui n'est en fait qu'une anticipation des exigences posées par la directive européenne de 2010 sur l'efficacité énergétique des bâtiments, selon laquelle les constructions neuves devront être positives, c'est-à-dire produire plus d'énergie qu'elles ne consomment dès 2020.