
Une situation due au fort équipement des Français en chauffage électrique. Ainsi, un tiers des ménages français se chaufferait à l'électricité, ce qui représenterait 7 % de la consommation d'électricité nationale. La France est en tête des pays européens concernant ce mode de chauffage. Selon Greenpeace, 80 % des constructions neuves seraient aujourd'hui encore équipées de chauffage électrique. Pour Pierre Gadonneix, PDG d'EDF, cette situation est davantage due à l'usage concomitant de tous les appareils électroménagers du domicile qu'au chauffage électrique (dans un entretien avec Aujourd'hui en France – Le Parisien publié ce jeudi).
Les limites du système de pointe
Reste que ces épisodes de forte consommation révèlent les faiblesses du système électrique français, très sensible aux baisses de température. 78 % de l'électricité française est produite par les centrales nucléaires, moyens de production dits « de base » qui s'adaptent très peu à la variabilité de la demande. Aujourd'hui, 56 réacteurs nucléaires sur 58 fonctionnent à plein régime selon Pierre Gadonneix. Nous utilisons les centrales nucléaires de façon optimale mais nous sommes parvenus à la limite du système en pointe, note le patron d'EDF.
Pour répondre aux pics de consommation, des moyens de production supplémentaires doivent être lancés. EDF a par exemple recours aux centrales thermiques (fioul, gaz…). Pour éviter des ruptures d'approvisionnement, la France, grande exportatrice d'électricité, a également recours à l'importation. Une situation en constante augmentation depuis 2001. En 2007, la France a dû importer de l'électricité pendant 20 jours, a un coût beaucoup plus élevé qu'elle ne l'avait vendue hors épisodes de pointe (116 € le mégawatt heure à l'achat contre 45 €/MWh à la vente selon le comité de liaisons énergies renouvelables). Des importations d'électricité d'origine fossile, fortement émettrices de gaz à effet de serre…
Autre conséquence des pics de consommation : la forte demande d'électricité pourrait entraîner des délestages mais aussi des problèmes de sécurité du réseau d'alimentation électrique. La situation est particulièrement tendue en Bretagne et en Provence-Alpes-Côte-d'Azur, véritables péninsules électriques. Ces régions produisent beaucoup moins d'électricité qu'elles n'en consomment et sont donc très dépendantes. Pour la première fois depuis la création de RTE (gestionnaire du réseau de transport d'électricité) en 2000, l'alerte rouge a été déclenchée pour ces deux régions, sommant les consommateurs de réduire leur consommation.
Le système électrique français en question ?
L'électricité ne se stocke pas. Son système repose donc sur un équilibre production / consommation. Si le système français est la plupart du temps surproducteur d'électricité grâce à ses centrales nucléaires, celui-ci peine à répondre aux périodes de pointe. Démarrer une centrale à l'arrêt demande plusieurs jours alors qu'il ne faut que quelques heures pour lancer un barrage hydroélectrique ou une centrale thermique. Les producteurs d'électricité ont donc recours à ces moyens de production en cas de forte demande d'électricité.
Les énergies renouvelables peuvent-elles constituer une solution aux pics de consommation ? Selon le syndicat des énergies renouvelables, au moment où nous vivons une pointe historique de consommation électrique, le parc éolien français contribue à l'approvisionnement électrique de notre pays, avec une production proche de 1.000 MW. Grâce aux trois régimes de vent décorrélés dont bénéficie l'hexagone, la production éolienne française est plus stable que dans tous les autres pays européens : la production éolienne du 6 janvier dernier a été d'environ 800 MW et celle du lendemain a légèrement augmenté pour atteindre les 1 000 MW en soirée, au moment du pic de consommation. L'augmentation de la production d'électricité d'origine renouvelable pourrait contribuer à répondre aux pics de consommation mais ces énergies restent néanmoins intermittentes et peu prévisibles.
Pour Frédéric Marillier, de Greenpeace France, la France doit investir dans le développement des renouvelables mais aussi dans des dispositifs d'économies d'énergie (isolation de l'habitat), seules solutions permettant de faire face à la fois aux enjeux de consommation, d'indépendance énergétique, de lutte contre les changements climatiques et de défense du pouvoir d'achat des consommateurs. Pour le CLER, ces pics rappellent l'urgence d'un plan massif et ambitieux d'isolation du parc de bâtiments et la nécessité d'une réflexion sur nos modes de chauffage.
Outre une diversification du mix énergétique français, l'augmentation de l'efficacité énergétique apparaît en effet plus que nécessaire aujourd'hui pour diminuer la consommation d'électricité nationale.