Le 6 avril dernier, au congrès des réserves naturelles de France en Charente-Maritime, le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot a appelé tous les acteurs de la protection de la nature à lui faire des propositions pour préparer son grand plan Biodiversité qui sera présenté avant l'été. Un plan qui aura pour objectifs de "lutter contre les pollutions, inverser la tendance contre l'artificialisation des sols et permettre à la nature de gagner du terrain, ou encore protéger les forêts et les océans au niveau mondial", a énuméré M. Hulot. Ce plan va succéder à la stratégie nationale pour la biodiversité 2011-2020, dont le bilan à mi-parcours avait montré qu'elle était très loin d'endiguer l'érosion des espèces qui se poursuit.
Des acteurs très impliqués pour la biodiversité, en quête de reconnaissance
Moins de deux semaines après le discours du ministre, le président des Réserves naturelles de France (RNF), Michel Métais, aux côtés des trois autres gestionnaires d'espaces protégés (Conservatoires d'espaces naturels, Parcs naturels régionaux, Rivages de France) appellent M. Hulot à "passer aux actes!". La biodiversité "doit être déclarée cause nationale avec une véritable stratégie pour l'intégrer à toutes les politiques publiques en matière économique, sociale, culturelle ou éducative et être dotée de moyens financiers à la hauteur des enjeux", plaident-ils dans un communiqué commun, le 16 avril.
Ces acteurs rappellent qu'ils sont très impliqués dans les territoires pour la biodiversité. Les Conservatoires d'espaces naturels, les Parcs naturels régionaux et les Réserves naturelles représentent près de 3.500 personnels qui agissent sur le terrain, dans toute la France et couvrent tous les types de milieux naturels. Ils "sont représentatifs de la palette très diversifiée des partenariats en faveur de la biodiversité et la géo diversité, au contact direct des collectivités locales, des filières socio-économiques et des citoyens", soulignent les organismes. Ils regrettent qu'ils ne fassent pas partie du conseil d'administration de l'Agence française pour la biodiversité (AFB) avec qui ils ont signé chacun une convention-cadre de partenariat (1) pour une durée de cinq ans reconductible. L'AFB voit ses crédits "réduits conséquemment" comme ceux de leurs structures, dénoncent-ils. Ils déplorent ne pas être associés, à ce jour, à la rédaction du plan national pour la biodiversité.
Les gestionnaires d'espaces protégés "ont besoin de reconnaissance et de soutiens concrets pour remplir leurs missions de préservation de la nature et des paysages", a indiqué Christophe Lépine, président de la fédération des conservatoires d'espaces naturels, à Actu-Environnement. "Nous poussons un coup de gueule car nous avons l'impression que nos actions sur le terrain n'intéressent pas l'Etat. Nous ne comprenons pas !", ajoute M. Lépine, en demandant plus de moyens financiers.
Une politique gouvernementale "incohérente" avec la protection de la biodiversité
Les gestionnaires dénoncent en effet la publication du décret de décembre 2017 qui autorise les préfets de certains départements à déroger aux normes en matière d'urbanisme et d'environnement. Le projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan), actuellement examiné à l'Assemblée nationale, veut également "faciliter la création de logement mais cette belle cause se sert de la dérèglementation pour libéraliser encore plus l'urbanisme commercial et accélérer l'artificialisation". La loi Elan "nous inquiète énormément pour son impact. L'opposabilité avec les chartes des parcs naturels régionaux est également mise à mal dans cette loi", souligne M. Weber. Le Sénat vient aussi d'adopter une proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux." Son objectif : libéraliser l'urbanisme sur le littoral sous couvert d'adaptation aux changements climatiques…", pointent les structures.
"La simplification ne doit pas dissimuler des atteintes à l'environnement. Doit-on rappeler le principe de non-régression inscrit dans la loi sur la biodiversité de 2016 ?", préviennent les gestionnaires d'espaces naturels protégés.