Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'Ecologie, et Sophie Delaporte, Directrice générale adjointe de la Santé, ont lancé le 30 mai un Plan national sur les résidus de médicaments dans l'eau. Objectif : mieux connaître les risques et mieux prévenir la dispersion des résidus.
La maîtrise des risques liés aux résidus de médicaments était un engagement du Grenelle de l'environnement, repris dans le Plan national santé environnement (PNSE 2) et inscrit également dans le Plan d'action national contre la pollution des milieux aquatiques par les micropolluants. Le comité de pilotage du plan avait été mis en place en novembre 2009.
« Des phénomènes comme la résistance de certaines bactéries dans l'environnement, que nous constatons aujourd'hui, sont des signaux. Il est important d'agir dès maintenant. La réussite de ce plan d'action repose sur la prévention, en limitant les rejets médicamenteux, et sur la recherche, pour améliorer les connaissances afin de mieux cerner les impacts sanitaires et environnementaux », a déclaré la ministre.
Méconnaissance du risque
Premier constat : les conséquences environnementales et sanitaires de la présence de résidus médicamenteux dans l'eau restent mal connues. Même si les quantités mesurées dans les milieux aquatiques ne sont que de l'ordre du nanogramme par litre, certains effets de résistance bactérienne dans l'environnement peuvent pas exemple être mis en évidence.
« La méconnaissance est telle qu'il était très difficile de fonder l'action », confirme José Cambou, responsable du réseau Santé et environnement de France Nature Environnement, qui voit dans le renforcement de la recherche un grand pas en avant.
Parmi les mesures phares figure la priorisation des différentes molécules. « Compte tenu du nombre important de molécules consommées en France, de l'urgence et de l'importance d'harmoniser les travaux sur des molécules jugées prioritaires, il est nécessaire,
d'établir une méthode de hiérarchisation et de sélection des molécules prioritaires sur lesquelles les travaux doivent être conduits en priorité », précise le plan.
Des campagnes de mesures dans l'eau potable, les milieux naturels et les sols vont être menées ; de même que dans les rejets des hôpitaux, stations d'épuration, producteurs de médicaments, élevages, piscicultures…
Le laboratoire national de référence pour les eaux, Aquaref, ainsi que le laboratoire d'hydrologie de Nancy (Anses) sont chargés de développer des outils métrologiques associés à la liste des molécules désignées comme prioritaires en matière de surveillance.
« Un appel à projet sera lancé en 2012 sur quelques bassins versants pilotes de taille limitée pour acquérir des connaissances et tester, en grandeur nature, les actions de ce plan », ajoute le ministère.
Contrôler et réduire les émissions dans l'environnement
Le volet « gestion des risques » du plan comprend des actions de contrôle et de réduction des émissions de médicaments dans l'environnement.
Parmi les mesures prioritaires figure la prise en compte de l'impact environnemental lors de l'examen des dossiers d'autorisation de mise sur le marché (AMM). « Il s'agit là d'une avancée majeure », indique José Cambou. « Les AMM ne prenaient en compte que la toxicité humaine dans une démarche coût/avantage. Depuis 2006, l'écotoxicité est étudiée mais de manière encore très imparfaite », précise-t-elle.
Pour les médicaments déjà sur le marché, une procédure de rattrapage pourrait être définie afin de pouvoir évaluer leurs impacts environnementaux.
Le plan vise également la réduction à la source plutôt qu'un traitement en bout de chaîne. « On ne peut pas tout miser sur les stations d'épuration », résume NKM. Pour les particuliers, « des gestes simples, comme ramener ses médicaments non utilisés en pharmacie, permettent d'éviter de les jeter à l'évier ou à la poubelle », ajoute le ministère.
Cela passe par la promotion et le renforcement des filières de récupération et d'élimination des médicaments non utilisés à usage humain, via le dispositif Cyclamed, et à usage vétérinaire.
Un quart des eaux contaminées
La France est le quatrième consommateur mondial de médicaments et le premier en Europe. Plus de 3.000 médicaments à usage humain et 300 à usage vétérinaire sont disponibles sur le marché français.
Une étude réalisée par l'Anses en janvier 2011 montre qu'un quart des échantillons d'eau testés contiennent des traces de médicaments : caféine, antiépileptiques, anxiolytiques… Ces traces proviennent principalement des urines et des déjections des animaux d'élevage, qui rejoignent les réseaux d'eaux usées ou directement le milieu naturel.
A ces deux sources s'ajoutent les médicaments non utilisés, dont le gisement est estimé entre 24.000 et 29.000 tonnes par an. Seules 13.000 tonnes sont récupérées dans les pharmacies. Un grande partie est donc jetée à l'égout.