Massifier. Tel est le maître-mot du plan de rénovation énergétique des bâtiments présenté dans sa version finalisée par Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires, jeudi 26 avril. L'enjeu est d'accélérer la dynamique de travaux pour que les ménages soient sollicités, accompagnés et financent des travaux de rénovation énergétique ambitieux mais abordables. L'équation est complexe mais le Gouvernement compte mettre en place des outils adaptés à tous les cas de figure : propriétaire/bailleur, maison/copropriété... Tour d'horizon des mesures choisies pour le résidentiel. Actu-Environnement reviendra dans un second temps sur le parc tertiaire.
Fixer le cap
Au cours des dernières années, la France s'est fixé de nombreux objectifs dans plusieurs outils de programmation comme la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), la loi de transition énergétique, etc. Le Gouvernement ne veut en retenir que trois prioritairement :
- rénovation de l'ensemble du parc de bâtiments au niveau Bâtiment basse consommation (BBC rénovation) d'ici 2050,
- à l'échelle du quinquennat : diminution de 15% de la consommation d'énergie finale des bâtiments en 2023, par rapport à l'année de référence 2010. La déclinaison en nombres de rénovations par types de bâtiment sera actée dans la nouvelle SNBC.
- rénover 150.000 passoires thermiques par an habitées par des ménages propriétaires à faible revenu pendant les 10 prochaines années.

Donner envie de rénover
Le rythme de rénovation actuel n'est pas en phase avec les objectifs du Gouvernement. Le plan d'actions vise donc à lancer la dynamique en communicant plus largement vers les ménages concernés et aussi les professionnels qui les approchent (notaires, agents immobiliers, artisans). Mais cette communication massive devra "inspirer confiance". L'Etat prévoit donc de créer une "signature commune de la rénovation" afin de donner des repères. Les appels à projets lancés dans le cadre des programmes de certificats d'économies d'énergie (CEE) seront ouverts aux actions de sensibilisation et de formation des professionnels de l'immobilier, des syndics de copropriétés ou des acteurs bancaires.
L'Etat veut aussi garantir la confiance envers les professionnels de la rénovation. La labellisation du dispositif Reconnu garant de l'environnement (RGE) est perfectible. Un groupe de travail aura la charge de faire évoluer le dispositif pour garantir une meilleure qualité des travaux.
Pour passer de l'envie à l'action, il manque encore un maillon territorial capable de conseiller, d'orienter et de convaincre les ménages. Le ministère mise sur le service public de la performance énergétique de l'habitat (SPPEH) pour assurer cette mission. Une ébauche de ce service a été proposée par le rapport de MM. Piron et Faucheux. Sur la base de ces travaux, l'Etat lancera en mai 2018, sous couvert de la conférence nationale des territoires, un travail avec les collectivités sur son déploiement. En attendant, l'Etat "veillera" à la continuité du financement des réseaux des points rénovation info service (PRIS) et des plateformes territoriales de la rénovation énergétique. Un programme CEE pourra être lancé pour les financer.
Avoir un bon thermomètre
Le diagnostic de performance énergétique (DPE) est le premier outil pour parler rénovation. Sa fiabilité étant aléatoire, l'Etat prévoit d'unifier la méthode de calcul ainsi que la montée en compétences des professionnels. Cette réforme sera achevée d'ici mi-2019, mais dès 2018, les contrôles des diagnostiqueurs seront renforcés. Un arrêté sera pris au printemps pour imposer des contrôles aléatoires in situ. "Une fois le DPE techniquement fiabilisé, il sera de fait rendu plus aisément opposable et deviendra une information de référence lors des mutations ou de mises en location", argumente le gouvernement.
Un fonds de garantie effectif en 2018
Concernant les aides, la nouvelle version du plan confirme la transformation du CITE en prime forfaitaire par type d'équipement ou de prestation en 2019. L'éco-prêt à taux zéro sera lui aussi simplifié. Notons que la rénovation des copropriétés fera l'objet d'un plan d'actions spécifique, comprenant notamment l'adaptation des aides et des démarches.
Par ailleurs, les éco-prêts sous plafond de ressources vont pouvoir être garantis grâce à la mise en œuvre opérationnelle du Fonds de garantie pour la rénovation énergétique (FGRE). Créé par la LTE, ce fonds n'était toujours pas abondé. Il devrait l'être en 2018 pour contre-garantir l'éco-PTZ copropriété ou encore l'éco-prêt Habiter mieux de l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Le financement du FGRE, à hauteur de 14 M€/an pour les ménages modestes et de 5 M€/an pour les copropriétés, sera assuré par un programme de CEE de 57 M€ sur trois ans porté par l'établissement financier SGFGAS et financé par EDF.
Envisager des rénovations par étapes
L'Etat envisage par ailleurs de moduler la nouvelle prime et l'eco-ptz pour prendre en compte les rénovations réalisées par étapes. Même si la rénovation globale en une fois est la meilleure option, elle n'est pas à la portée de tous. L'Etat veut profiter des développements informatiques réalisés pour le CITE, le DPE et l'éco-prêt pour garder une trace des travaux effectués. Les expérimentations du passeport de la rénovation et du carnet numérique de suivi du logement, menées en 2017 sont une première piste. Enfin, selon la même logique, un travail sera mené au niveau national afin de définir ce que sont des travaux "BBC compatibles", c'est-à-dire des travaux par étapes compatibles avec l'atteinte finale d'un niveau BBC-rénovation.