Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Plan de résilience : le gouvernement donne des gages aux tenants du productivisme agricole

L'exécutif a annoncé plusieurs mesures portant sur l'agriculture dans son plan de résilience destiné à faire face aux conséquences de la guerre en Ukraine. Sécurisation des engrais, mise en culture des jachères et souveraineté alimentaire sont au menu.

Agroécologie  |    |  L. Radisson
Plan de résilience : le gouvernement donne des gages aux tenants du productivisme agricole

« Nous devons assumer notre rôle nourricier », a déclaré le ministre de l'Agriculture, le 16 mars, lors de la présentation du plan de résilience du gouvernement en vue de faire face aux conséquences de la guerre en Ukraine.

« Les filières françaises doivent (…) continuer à produire, car l'Europe et la France, grande puissance agricole, ont une responsabilité : celle de nourrir son peuple et, au-delà, contribuer à nourrir le monde. Or, de l'autre côté de la Méditerranée, des pays pourraient faire face à des famines, compte tenu de la situation en Ukraine, un des greniers du monde, et à cause de sècheresses qui frappent certains pays d'Afrique du Nord », a explicité Julien Denormandie. Dans cet objectif, le ministre a annoncé une série de mesures portant notamment sur les engrais, sur les jachères et sur le renforcement de la souveraineté alimentaire du pays.

Si la FNSEA a salué « un premier pas indispensable pour continuer à produire », la Confédération paysanne a, au contraire, dénoncé un plan « de compensation des dépendances de l'agriculture productiviste ». Pour le syndicat paysan, cette initiative « cautionne la logique libérale du marché mondial, qui fait flamber les prix, au détriment de la société ». Celui-ci rappelle au ministre que « la faim à l'échelle mondiale est beaucoup plus un problème de répartition que de production ».

Sécurisation des matières importées

« Si les besoins en engrais du printemps sont couverts, un plan de sécurisation des engrais pour la prochaine campagne d'automne 2022 sera mis en œuvre », a annoncé Julien Denormandie. Dans ce cadre, ont été annoncés la mise en place d'une « task-force de sécurisation » des matières premières importées, l'adaptation ou le report de mesures réglementaires pouvant impacter la disponibilité des engrais en 2022, ainsi que le développement de l'usage des engrais organiques.

Le deuxième point interroge sur le devenir des projets de textes destinés à renforcer les risques liés au stockage des ammonitrates élaborés à la suite d'une mission de hauts fonctionnaires mise en place après l'explosion du stockage de nitrates d'ammonium dans le port de Beyrouth, en août 2020. Les représentants des fabricants d'engrais et des coopératives agricoles se sont en effet opposés à ces textes au nom de la souveraineté, craignant qu'ils pénalisent les ammonitrates haut dosage, fabriqués en France. Examinés lors d'une réunion du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques (CSPRT), le 15 mars, ces projets, modifiés par rapport à la version soumise à la consultation du public en janvier dernier, ont cependant été approuvés à la majorité, avec toutefois l'opposition des représentants agricoles et le refus du Medef de se prononcer. Leur publication pourrait, par conséquent, restée d'actualité.

Produire plus de protéines végétales

Julien Denormandie a ensuite rappelé qu'il avait porté l'idée, au niveau européen, de valoriser les jachères, dans l'objectif de produire plus de protéines végétales. Le ministre précise que cette proposition devrait connaître une issue favorable. En complément, le gouvernement annonce la promotion de systèmes « trois cultures en deux ans ». Mais aussi, faisant feu de tout bois, un plan de lutte contre les dégâts de gibier sur les cultures « stratégiques », ainsi qu'un suivi de l'irrigation afin d'optimiser la ressource en eau.

“ L'Europe et la France, grande puissance agricole, ont une responsabilité : celle de nourrir son peuple et, au-delà, contribuer à nourrir le monde. ” Julien Denormandie, ministre de l'Agriculture
Enfin, le ministre de l'Agriculture a annoncé une accélération de la reconquête de la souveraineté alimentaire, en complément du soutien déjà apporté par le plan de relance et par le plan France 2030. Car l'Union européenne est actuellement très dépendante de l'Ukraine, avec 57 % de son approvisionnement en maïs, 47 % des importations de tourteaux de tournesol et 30 % des importations de blé, mais aussi de la Russie, notamment pour les tourteaux de colza (50 % de l'approvisionnement) ou de tournesol (34 %).

Pour cela, le gouvernement va ouvrir l'appel à projets « Capacités agroalimentaires 2030 » en vue de relocaliser les produits agricoles jugés stratégiques, c'est-à-dire les engrais et les produits transformés pour l'alimentation animale, et d'industrialiser les projets innovants portant sur les agroéquipements et l'alimentation durable.

À ce titre, l'exécutif annonce aussi la mise en œuvre d'un plan « souveraineté azote », qui doit privilégier la production d'engrais vert et le développement de filières de valorisation d'engrais organiques, de même que le renforcement du plan « protéines végétales », qui avait été présenté en décembre 2020. Julien Denormandie a également annoncé l'élaboration d'un plan de souveraineté destiné aux fruits et légumes. Un autre plan de souveraineté va, quant à lui, être consacré à l'énergie, en vue « d'accélérer le développement des énergies renouvelables et la décarbonation de l'amont agricole et des industries agroalimentaires ».

« Souveraineté alimentaire de façade »

Les préconisations de la Confédération paysanne étaient, quant à elles, bien différentes. « Pour stopper la concurrence des cultures énergétiques sur les fourrages, il aurait été urgent d'interdire l'utilisation des cultures pour la méthanisation et la fabrication d'agrocarburants. Cela aurait permis de libérer 3 à 5 % de la surface agricole française pour l'autonomie alimentaire et fourragère », indique le syndicat agricole.

D'autre part, selon ce dernier, le « produire plus » avec « son cortège de chimie de synthèse et d'énergies fossiles, nie les autres enjeux majeurs qui n'ont pas disparu avec la guerre en Ukraine : dérèglement climatique, effondrement de la biodiversité, protection des droits paysans, précarité alimentaire... ». Et d'enfoncer le clou : « Les solutions de ce nouveau plan construisent une souveraineté alimentaire de façade qui n'est absolument pas basée sur l'autonomie. Aucun mot sur la polyculture-élevage, sur la sortie de l'industrialisation de l'agriculture, sur l'affranchissement des engrais de synthèse, ni sur la durabilité des modes de production. »

Globalement satisfaite des annonces, la FNSEA salue au contraire des propositions qui redonnent « une place stratégique à l'enjeu de la souveraineté alimentaire ». « Débloquer les situations qui freinent la production, encourager la production d'intrants en France, investir dans la production d'énergies renouvelables, renforcer le plan protéines et mettre en place un plan souveraineté en fruits et légumes, tout en s'inscrivant dans une transition écologique équilibrée, sont autant de signaux positifs pour les agriculteurs français », se félicite le syndicat majoritaire.

Réactions11 réactions à cet article

En résumé, le pédant et godillot ministre de l'agriculture et la FNSEA sont en guerre permanente contre la demande sociétale - mais émanant aussi d'une part de la profession - pour une agriculture nourricière saine et diversifiée, respectueuse des équilibres naturels et qui fasse vivre des paysans.
Le prétexte de la pseudo menace d'une pénurie alimentaire liée à la guerre en Ukraine aiguise l'appétit d'agrimanagers opportunistes qui, tablant sur une flambée des prix à la tonne de blé, cherchent par tous moyens à optimiser leurs futures rentrées de devises. Ils n'ont même pas la pudeur d'attendre un peu pour abattre leurs cartes.
Ce conflit en Europe constitue donc lui aussi une occasion en or pour toute une ribambelle de profiteurs de guerre de s'engraisser sans prendre le moindre risque.
L'UE doit défendre bec et ongles le Green Deal et sa stratégie De la Fourche à la fourchette, issue d'un long processus décisionnel démocratique, contre ces tentatives de déstabilisation fomentées par une minorité sectaire !

Pégase | 17 mars 2022 à 21h10 Signaler un contenu inapproprié

L'urine, l'avenir pour une agriculture durable?
quand on parle d'indépendance énergétique, sachant que les engrais azotés sont issus de la pétrochimie, il y a une solution locale qui aurait l'avantage de réduire la pollution azotée des stations d'épuration et d'économiser de l'énergie dans les stations d'épuration : l'usage de l'urine comme engrais vert
voir https://www.actu-environnement.com/ae/news/urine-or-vert-fertilisant-agriculture-28275.php4 et https://www.leesu.fr/ocapi/bibliotheque/pour-sinitier/
hormis son usage dans les pays dit "sous développé" mais plus résilient que nous, il faut noter le déploiement de cette méthode à large échelle en Suède, prenons en de la graine...

quand on mangera les pissenlits par la racine.. | 18 mars 2022 à 10h07 Signaler un contenu inapproprié

Julien Denormandie, lorsque je l'ai rencontré,(il était alors ministre de la ville) ne m'a paru ni pédant ni godillot. Seulement mal préparé à être ministre au XXIème siècle.

En effet, à ma grande surprise, il ignorait l'existence de geoportail.gouv.fr, outil remarquable et polyvalent qui pourrait transformer (Ah ! la RGPP !) le fonctionnement des administrations lourdes, pléthoriques et trop souvent inefficaces.

Ce même geoportail.gouv.fr pourrait être la pierre fondatrice d'une politique publique pour une agriculture locale, soutenue, organisée et citoyenne. Il suffit de créer quelques couches fonctionnelles supplémentaires, ce qui ne coûtera quasiment rien et ouvrira une vraie perspective de croissance agricole. Mais il faut pour cela deux qualités absentes au sein des pouvoirs publics : inventivité et compétence.

Votre avis ?

henri le roy | 18 mars 2022 à 11h25 Signaler un contenu inapproprié

Afin d'étayer mon précédent post sur ce fil d'actualité, voici le lien vers un article du quotidien Le Monde publié aujourd'hui à https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/03/19/vouloir-produire-plus-au-nom-de-l-independance-agricole-c-est-comme-vouloir-mettre-plus-d-automobiles-sur-les-routes-au-nom-des-economies-d-energie_6118199_3232.html

Pégase | 19 mars 2022 à 09h48 Signaler un contenu inapproprié

Pégase, cette analogie n'est pas pertinente. Tous les pays ne sont pas "bénis" comme la France pour produire de l'alimentation. C'est bien pour cela que l'agriculture française a le devoir de produire davantage que pour son autosuffisance.
Cette production doit évidemment se faire en préservant les milieux et en s'intégrant au mieux dans l'environnement. C'est ce que les développements techniques doivent permettre de faire.
Nous ne devons pas sombrer dans la régression passéiste et décroissante, c'est mortifère voire criminel.
Bien cordialement et courage à tous !

Albatros | 23 mars 2022 à 09h19 Signaler un contenu inapproprié

Pouvez-vous nous expliquer, Albatros, comment produire davantage tout en "préservant les milieux et en s'intégrant au mieux dans l'environnement" ?
Car, sur ces soixante dernières années, le constat partout sur la planète est que la production s'est principalement opérée en détruisant des milieux sauvages et agri-environnementaux, en accentuant la pression sur les espèces sauvages, en dégradant la qualité de l'eau, de l'air et des sols et en diffusant des substances toxiques partout dans la biosphère (humains compris). Tout cela est parfaitement documenté et établi.
Et ce qui s'annonce, à savoir l'emploi massif de pesticides et d'engrais de synthèse et la suppression des jachères, sera encore pire et ne prépare en rien l'agriculture française à affronter le défi majeur de l'appauvrissement des sols et de leur perte de fertilité (principalement du fait des pratiques agricoles intensives) et du changement climatique en cours. C'est mortifère voire criminel.

Pégase | 23 mars 2022 à 12h27 Signaler un contenu inapproprié

Cher Pégase, cela s'appelle l'intensification : davantage de production sur des surfaces moindres. Ce n'est pas simple et bien moins simpliste que vos slogans anti-agricoles.
Nous avons le potentiel de le faire sur des surfaces considérables en France, bien évidemment pas partout, sans nuances ou, à tout le moins avec bien davantage de nuances que vos idées bien arrêtées.
Je n'ai pas un raisonnement global, étant sans doute moins visionnaire que vous, je m'attache à ce que je connais, à savoir l'agriculture de mon pays qui, ne vous en déplaise, n'est pas criminelle comme vous l'affirmez sans ambages dans ce fil.
Salutations et courage à ceux qui produisent bien !

Albatros | 23 mars 2022 à 14h39 Signaler un contenu inapproprié

L'intensification ne doit pas être une notion promue dans la nouvelle bible écolo qu'est devenu ce pauvre journal Le Monde, bien maltraité depuis maintenant des lustres par une rédaction particulièrement "insoumise".

Albatros | 23 mars 2022 à 14h58 Signaler un contenu inapproprié

Ne vous en faites pas, Albatros : avec la façon dont nos politiques au pouvoir courbent veulement l'échine devant le diktat de l'agro-industrie, il n'est pas interdit de penser qu'une loi impose un jour aux lecteurs du Monde et autres libres penseurs d'être "ré-éduqués" à la pensée unique productiviste. Tant nous sommes déjà dans une dimension de négation systématique de toute autre forme de modèle de production.
Nous connaissons déjà tous les maux que porte l'intensification agricole, pour l'homme comme pour la nature. Mais cette course folle au toujours plus est surtout gage de substantiels profits pour tout un environnement financier qui joue sur les marchés et se gave de subventions publiques.
Subventions publiques - et surtout modalités d'attribution - sur lesquelles le citoyen n'a de toute évidence aucune prise. C'est donc un perpétuel hold-up anti-démocratique qui s'opère et à tous les coups (coûts ?), ce sont invariablement les mêmes qui raflent la mise. Et gare si on se met à un peu trop contester cette mafia : la brigade Démeter veille à faire taire toute velléité !
Le monde agricole que vous appelez de vos vœux - et qui existe déjà en grande partie - est cauchemardesque. G. ORWELL n'aurait pas imaginé pire.

Pégase | 23 mars 2022 à 16h45 Signaler un contenu inapproprié

30% de gaspillage alimentaire
une superficie non négligeable dédiée aux agroccarburants
1/3 de la surface agricole utile consacrée pour produire de la nourriture pour les animaux
la FAO qui dit que l'on peut nourrir la planete en agriculture biologique à condition de changer de régime alimentaire
faut il en dire plus ?

quand on mangera les pissenlits par la racine.. | 23 mars 2022 à 17h16 Signaler un contenu inapproprié

Pégase, votre insoumission vous aveugle : nulle part il n'est question dans mes avis d'une vision unique car je n'ai eu de cesse de répéter que l'agriculture française est faite de diversité, ne vous en déplaise (ce qui se fait dans le Gers n'a rien à voir avec le Finistère ni avec l'Eure et Loir, etc.).
C'est bien la diversité et la démocratie que je promeus, pas votre vision mondialiste et délétère.
Arrêtez avec vos références ineptes s'il vous plaît. Vous ne savez pas ce que j'appelle de mes voeux.
Je salue et respecte les agriculteurs qui produisent, sans référence à une quelconque "brigade".
NB : Demeter est une référence sérieuse sur l'état de l'alimentation dans le monde. Vous êtes bien davantage Orwellien que moi avec votre prétention d'omniscience, cher Pégase Big Brother capable de lire mes pensées intimes...

Albatros | 23 mars 2022 à 17h20 Signaler un contenu inapproprié

Réagissez ou posez une question au journaliste Laurent Radisson

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires

Partager