Présenté vendredi par les ministères de l'écologie et de l'agriculture, le plan d'action ''algues vertes'' se veut consensuel. Mais basé sur les documents de planification existants, il n'a pas réussi à séduire les associations environnementales.
La secrétaire d'Etat à l'écologie Chantal Jouanno et le ministre de l'agriculture Bruno Le Maire ont présenté vendredi à Rennes les
détails du plan d'action du gouvernement pour lutter contre la prolifération des
algues vertes en Bretagne. Préparé à partir des conclusions de la mission interministérielle sur la prolifération des algues vertes, ce plan concerne les huit baies ''algues vertes'' identifiées dans le
Schéma Directeur d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) du bassin Loire-Bretagne. Ces baies sont alimentées en azote par plusieurs rivières et cours d'eau. Le plan vise par conséquent les 23
bassins versants soit plus de 3.500 exploitations agricoles, 120.000 hectares de surface agricole et 240.000 habitants. Le plan arrêté par le gouvernement mobilisera au total 134 millions d'euros, dont 94 millions à la charge de l'Etat et de ses établissements publics, le reste devant être assuré par les collectivités territoriales.
Financer le ramassage et le traitement des alguesAvec ce plan d'action, le gouvernement espère mieux gérer les prochaines marées vertes qui ne manqueront pas de refaire leur apparition l'été prochain. En 2010, l'État a donc prévu de prendre à sa charge, dans la limite d'un montant de 700.000 euros, le coût de ramassage sur terre des algues soit environ 70.000 tonnes. La création de plate-formes de compostage sera également soutenue financièrement. Trois projets portés par des collectivités locales sont d'ores et déjà visés : celui du SMICTOM de Launay Lantic (20.000 tonnes d'algues supplémentaires en 2010), celui de la communauté d'agglomération de Lannion Trégor (20.000 tonnes en 2011) et celui du SMICTOM des Châtelets (10.000 tonnes en 2011). Un quatrième projet pourrait voir le jour dans le sud du Finistère vers Fouesnant. Avec ces nouveaux investissements, la totalité des algues pourra être compostée à compter de 2011. En attendant leur mise en service, l'Etat prévoit de financer le traitement des algues à hauteur de 50% des coûts dans la limite de 500.000 €.
Des plans locaux pour réduire la pression azotéeOutre la volonté d'assurer un traitement curatif, le plan du gouvernement vise également à prévenir le phénomène en s'attaquant à la source des pollutions azotées tout en maintenant l'activité agricole bretonne.
''Il s'agit de faire évoluer l'agriculture vers des systèmes de production à très basses fuites d'azote'', peut-on lire dans le plan. Pour cela, l'Etat s'appuie sur le
SDAGE Loire-Bretagne adopté en octobre 2009 qui prévoit la mise en place de plans d'action locaux. Ces plans devront contenir des réductions chiffrées et datées des flux de nitrates et des objectifs de développement des zones naturelles capables de servir de
zones tampon et de capter l'azote avant qu'il n'atteigne la mer.
L'ensemble des plans d'action devra dans tous les cas viser le respect des engagements pris dans le cadre du SDAGE à savoir réduire de
30% au moins les flux de nitrates à l'horizon 2015 dans les 8 baies prioritaires. Les plans d'action devront être validés au plus tard début 2011 dans les deux baies pilotes de Saint Brieuc et de Lannion et en 2012 pour les autres baies.
Donc pour l'instant le plan repose sur le volontarisme des acteurs locaux. Le ministère précise toutefois qu'en cas d'adhésion trop faible des agriculteurs au plan d'action et si les objectifs ne sont pas atteints au bout de 3 ans, l'Etat pourra imposer des mesures obligatoires.
En parallèle, l'Etat compte encourager le recours à la méthanisation pour traiter les lisiers. Un appel à projets sera lancé dans le courant de l'année. Il devra intégrer deux objectifs prioritaires : garantir une collecte optimisée et substituer 50% des engrais minéraux utilisés dans la zone. L'appel à projet sera lancé en 2010 afin de voir les premières unités opérationnelles en 2012.
Contrôler la bonne mise en œuvre de la réglementation actuelleEn attendant l'adoption des plans d'action et la construction des unités de méthanisation, le gouvernement annonce le renforcement des contrôles sur les installations agricoles. Ainsi, chaque exploitation devra déclarer les quantités d'azote utilisées afin d'identifier les flux d'azote sur chaque bassin versant. Cette déclaration sera effective cette année pour les exploitations installées sur les bassins versants des baies pilote et en 2011 pour les autres. Par ailleurs, les administrations de contrôle sont invitées à vérifier le bon respect des plans de fertilisation, des calendriers d'épandage et l'ensemble des exploitations soumises à la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement.
De plus, les seuils de pression azoté fixés dans certains secteurs particulièrement surchargés en azote seront étendus à l'ensemble des bassins versants. Ce seuil est actuellement fixé à 210 kg d'azote organique et minéral par hectare de surface agricole. Cette mesure sera inscrite dans la prochaine révision du 4ème programme d'action nitrates appliquée aux bassins versants « algues vertes ».
Par circulaire, il sera aussi demandé aux préfets de département de
''veiller au principe de non-dégradation de la pression organique à l'hectare dans le cadre des demandes d'autorisation des dossiers ICPE dans l'ensemble des baies à algues vertes''. Autrement dit, l'intensification de l'élevage dans les bassins versants reste possible si elle n'augmente pas la pression organique sur les parcelles.
La déception des associations
Au-delà de cette inapplication criante du principe pollueur-payeur, le plan n'a pas les moyens de l'ambition qu'il affiche
Les
associations Eau & Rivières, Bretagne Vivante, Halte aux marées vertes, De la source à la mer et Côtes-d'Armor Nature Environnement étaient présentes à la préfecture de région où ce plan a été présenté. Elles ont exprimé leur
''scepticisme sur l'efficacité de ce plan'', et leur
''regret'' qu'une fois de plus, le secteur agricole et agro-alimentaire reporte sur la collectivité les coûts d'élimination de leurs déchets.
''Au-delà de cette inapplication criante du principe pollueur-payeur, le plan n'a pas les moyens de l'ambition qu'il affiche'', explique Eau & Rivières.
''Avec 134 millions d'euros, il ne sera pas possible de reconvertir l'activité agricole à l'amont des huit baies. Sur la seule baie de Lannion, les besoins de financement évalués par la communauté d'agglomération de Lannion et la profession agricole pour une reconversion herbagère du bassin versant se montent à quelque 70 millions d'euros…'', ajoute-t-elle.
Eau & Rivières a également regretté le non recours aux outils réglementaires et le refus d'expérimenter de nouveaux modes de répartition des subventions agricoles pour encourager les systèmes de production respectueux de l'environnement.
''Dans ces conditions, il est difficile de ne pas douter du « tournant important » évoqué par le ministre de l'agriculture, dans la lutte contre ces marées vertes'', estime l'association.
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