Dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2013, la commission des affaires sociales du Sénat a adopté mercredi 7 novembre un amendement proposé par le sénateur socialiste Yves Daudigny, visant à augmenter de 300% la taxe sur l'huile de palme "entrant dans la composition des produits alimentaires, afin d'inciter l'industrie agro-alimentaire à lui substituer des composants moins nocifs pour la santé".
Taxer l'huile de palme pour ses impacts sanitaires et environnementaux
L'amendement institue une contribution additionnelle de 300 euros la tonne à la taxe spéciale prévue sur les huiles de palme, de palmiste et de coprah destinées à l'alimentation humaine, accusées de favoriser l'obésité et la déforestation. La taxe actuelle sur ces produits s'élève à 98,74 euros pour une tonne d'huile de palme et à 107,8 euros pour une tonne d'huile de coprah ou de palmiste. Alors que les Français consomment 2 kilos par an et par habitant d'huile de palme, cette mesure "payée par les industriels permettrait de rapporter 40 millions d'euros au budget de la sécurité sociale", estime Yves Daudigny.
Pour l'heure, 315 amendements ont été déposés sur ce texte par les sénateurs qui avaient jusqu'à ce vendredi 9 novembre 11 heures pour le faire. Parmi eux, trois amendements ont été présentés par les sénateurs d'Europe Ecologie Les Verts (EELV) qui jugent que la "santé environnementale" demeure la "grande absente" du projet de budget de la Sécu 2013 et "veulent aller plus loin".
L'un de ceux-ci vise à renforcer celui proposé par Yves Daudigny alors que "l''idée des écologistes d'une taxation sur l'huile de palme a été reprise par le rapporteur du PLFSS dans la commission des affaires sociales", souligne Aline Archimbaud, sénatrice EELV, auteur des amendements. Outre des risques de maladies cardio-vasculaires en cas d'utilisation excessive, cette huile a "un impact environnemental dans les pays d'origine, comme l'Indonésie, où elle entraîne une importante déforestation", rappelle-t-elle. "L'huile de palme n'est pas toxique en soi mais ce qui est dangereux est l'excès de la consommation de cette huile qui est présente dans 5.000 à 6.000 produits de toute sorte. Nous déposons un amendement un peu différent dans le sens où la taxation est plus progressive, les sommes augmentant avec les années. Je pense qu'on arrivera à s'entendre en séance publique", espère la sénatrice.
Cet amendement porté par EELV prévoit une augmentation de la taxe sur l'huile chaque année jusqu'en 2016. Son taux serait fixé par tonne à 300 € en 2013, 500 € en 2014, 700 € en 2015 et 900 € à partir de 2016. Ce tarif serait relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2017. "Le premier objectif est d'inciter les industriels à substituer d'autres matières grasses à l'huile de palme, ce qui est le plus souvent possible. La progressivité est indispensable car elle permet d'aboutir à une taxation dissuasive tout en laissant aux industriels le temps de s'adapter aux produits de substitution. Les importations sont évidemment également taxées", précise l'amendement. EELV espère un rendement de cette taxe en 2013 compris entre 13,5 et 87 millions d'euros.
EELV veut taxer le diesel et l'aspartame
Un autre amendement, déposé par la sénatrice, entend également taxer les véhicules diesel neufs immatriculés à partir de juillet 2013,"car nous ne voulons pas prendre en otage des millions de Français qui en possèdent et dont on sait que certains sont dans une situation modeste. Nous proposons un amendement pédagogique pour prévenir les automobilistes avant d'acheter ces véhicules alors qu'une étude de l'OMS, publiée en juin 2012, a jugé que les particules fines des moteurs diesel sont cancérogènes". Or, 60% du parc français est diéselisé, déplore-t-elle.
Cette taxe sur les voitures diesel serait de 500 euros en 2013 avant d'être portée à 1.000 euros en 2014, 2.000 en 2015 et 3.000 en 2016. "Une taxe à terme de 3.000 euros commence à devenir prohibitive pour tous ceux dont rouler n'est pas la profession", stipule le texte. "Nous savons que l'amendement va être attaqué par les lobbies, mais nous défendons l'intérêt général. Nous espérons que le gouvernement nous donnera un signal", déclare la sénatrice. Selon EELV, la taxe pourrait rapporter 350 millions sur le deuxième semestre 2013.
Enfin, les sénateurs souhaitent taxer l'aspartame, responsable "des naissances prématurées et des cancers", souligne la sénatrice en citant des rapports indépendants. Le groupe EELV propose une taxation progressive démarrant à 30 € par kg en 2013, 50 € en 2014, 70 € en 2015 et 90 € à partir de 2016.
"Sur l'année 2013, si on applique nos trois amendements, la France gagnera un rendement total de 795 millions d'euros", chiffre Mme Archimbaud. Cela permettrait, selon elle "de consacrer 1% supplémentaire du budget total de la santé aux dépenses de prévention, comme le prévoyait l'accord EELV-PS, et aussi de financer des études indépendantes sur la nocivité de ces produits".
Taxe sur l'huile de palme : réserves de la ministre de la Santé
Ces amendements doivent être encore votés en séance plénière par le Sénat qui examinera à partir du lundi 12 novembre le projet de PLFSS. Une séance qui promet de vifs débats alors que la ministre de la Santé Marisol Touraine a exprimé dès jeudi 8 novembre des réserves sur la taxation de l'huile de palme. '' Il est normal de s'occuper de l'impact sur la santé de l'huile de palme mais je ne suis pas certaine que ce soit à l'occasion d'un amendement purement financier que l'on puisse engager le débat", a-t-elle déclaré sur Canal+.