"Pour les polluants émergents dans l'eau, une liste de quatre ou cinq substances prioritaires sera définie et un calendrier de campagne de mesures, qui passeront d'exceptionnelles à cycliques." Tel était l'objectif fixé par la feuille de route issue de la première conférence environnementale en matière de polluants émergents.
L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a publié le 5 août dernier une note technique (1) relative à la mise en œuvre de cet objectif, à la demande des ministères chargés de l'écologie et de la santé. L'enjeu est de retenir des substances chimiques "ubiquitaires", c'est-à-dire présentes dans différents milieux organiques, et présentant un enjeu sanitaire du fait de leur présence dans l'eau destinée à la consommation humaine (EDCH).
Pas un problème insurmontable en matière de traitement des eaux
Il ressort des premiers travaux que les phtalates pourraient figurer dans cette liste. Ce choix présenterait l'avantage d'être en phase avec le programme de travail 2013-2014 de l'Anses, qui prévoit une évaluation des risques sanitaires des perturbateurs endocriniens, dont les phtalates. Une campagne de mesures par le Laboratoire d'hydrologie de Nancy dans les eaux destinées à la consommation humaine et les eaux embouteillées est programmée dans ce cadre. "Ces données seront utiles pour caractériser les expositions dans une approche intégrée tenant compte de la pluralité des voies d'exposition", souligne la note.
Mais le fait de mesurer un polluant implique ensuite qu'il puisse être traité si sa présence est avérée. C'est pourquoi l'Anses relève que "la présence de phtalates dans la ressource en eau ne constitue pas un problème insurmontable en matière de traitement pour produire des eaux destinées à la consommation humaine", mentionnant l'existence d'une filière intégrant du charbon actif pour éliminer cette contamination.
En revanche, souligne la note, les phtalates entrent dans la composition de certains matériaux en contact avec l'eau destinée à la consommation humaine, qui peuvent être des canalisations, des revêtements de réservoirs ou des joints et raccords.
Perchlorates, composés N-nitrosés et perfluorés également visés
L'Anses recommande également d'approfondir les connaissances sur les niveaux de contamination, notamment hydriques, par les perchlorates. Elle relève l'émergence d'une préoccupation européenne relative à la contamination des fruits et légumes par l'ion perchlorate, qui se traduit par des travaux menés aux Pays-Bas et en Allemagne, et par une récente saisine de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa).
Autre recommandation de l'Agence : la poursuite des recherches sur la contamination des milieux hydriques par les composés N-nitrosés et sur leurs précurseurs au regard des procédés de traitement de l'eau susceptibles de les générer.
Le document suggère enfin de mener des investigations complémentaires sur des contaminations localisées, telles que celles occasionnées par des perfluorés. L'objectif ? Là encore, "améliorer les connaissances relatives à la contribution des précurseurs sur la formation des métabolites cibles et évaluer l'exposition de la population à l'échelle du bassin considéré".
En revanche, l'Anses a exclu les produits phytopharmaceutiques et les métaux de cette réflexion, les considérant comme extérieurs à la saisine des deux ministères. Quant aux résidus médicamenteux dans l'eau, certains pourraient être retenus dans cette liste de substances prioritaires, mais l'Agence s'interroge sur son articulation avec le plan national spécifique portant sur ces substances.