La Cour de justice de l'UE (CJUE) a rendu ce mercredi 19 novembre sa décision suite à la question préjudicielle posée par la Cour suprême du Royaume-Uni dans le cadre d'un contentieux sur la pollution de l'air opposant ClientEarth, une ONG spécialisée dans les questions de justice environnementale, au secrétariat d'Etat britannique à l'environnement.
Valeurs limites dépassées
La directive du 21 mai 2008 sur la qualité de l'air ambiant fixe des valeurs limites pour le dioxyde d'azote (NO2) qui ne devaient pas être dépassées après le 1er janvier 2010. Un report de cinq ans de cette échéance, soit au 1er janvier 2015, est toutefois possible lorsque les conditions sont particulièrement difficiles dans une zone et que ces valeurs ne peuvent pas être respectées malgré l'adoption de mesures adéquates. Ce report est toutefois conditionné à l'adoption par l'Etat membre concerné d'un plan relatif à la qualité de l'air qui démontre comment les valeurs limites seront respectées avant la nouvelle échéance.
Les valeurs limites fixées par la directive étaient dépassées dans 40 des 43 zones concernées du Royaume-Uni en 2010. Le gouvernement britannique a présenté à la Commission en septembre 2011 des plans accompagnés de demandes de prorogation pour 24 de ces 40 zones. Mais pour les seize zones restantes, dont celle du "Grand Londres", les plans prévoyaient le respect des valeurs limites entre 2015 et 2025 seulement, sans demande de prorogation.
ClientEarth a demandé à la justice britannique de contraindre le gouvernement à réviser ces plans afin que les valeurs limites soient respectées avant l'échéance du 1er janvier 2015. La Cour suprême du Royaume-Uni, saisie de l'affaire en dernière instance, a posé plusieurs questions à la CJUE : un Etat membre est-il tenu de demander un report de l'échéance lorsque les valeurs limites n'ont pas été respectées avant le 1er janvier 2010 ? L'établissement d'un plan relatif à la qualité de l'air suffit-il à mettre l'Etat en conformité avec la directive ?
Aucune exception à cette obligation
En ce qui concerne le dioxyde d'azote (tout comme le benzène d'ailleurs), la directive prévoit que les valeurs limites "ne peuvent pas être dépassées". Ce qui signifie que l'on a affaire à une obligation de résultat, juge la Cour.
Afin de pouvoir bénéficier du report de cinq ans, les Etats membres sont tenus d'en faire la demande à la Commission lorsque, en dépit de mesures adéquates de lutte contre la pollution, ces valeurs ne peuvent être respectées dans le délai indiqué. "La directive ne comporte aucune exception à cette obligation", précise la Cour.
Lorsque le dépassement des valeurs limites a lieu après l'échéance prévue et qu'aucune demande de report n'a été transmise, les Etats membre sont là aussi tenus d'établir un plan relatif à la qualité de l'air qui prévoit des mesures pour que la période de dépassement soit la plus courte possible. En cas d'inertie, la juridiction nationale compétente "éventuellement saisie" doit enjoindre le Gouvernement d'adopter le plan exigé par la directive.
"Cependant, le simple fait d'avoir établi ce plan ne permet pas de considérer que l'Etat en cause a entièrement satisfait aux obligations qui s'imposent à lui en vertu de la directive", prévient la CJUE. Ce qui laisse augurer des recours en manquement de la part de la Commission à l'encontre des Etats membres qui ne respectent pas les valeurs limites relatives au dioxyde d'azote. L'exécutif européen a d'ores et déjà rejeté en février 2013 la demande française de report des échéances concernant ce polluant.