La justice administrative pourrait contraindre le Gouvernement à prendre des mesures musclées contre la pollution de l'air dans les semaines qui viennent. Le rapporteur public du Conseil d'État, lors d'une audience tenue ce vendredi 3 juillet, a en effet proposé d'infliger à l'État une astreinte de 10 millions d'euros par semestre s'il tardait à mettre en place les mesures pour faire baisser les concentrations en dioxyde d'azote (NO2) et en particules fines (PM10) en dessous des seuils réglementaires dans plusieurs agglomérations françaises.
Le rapporteur public a conclu que l'État n'avait pas respecté la décision du Conseil d'État du 12 juillet 2017. Par cet arrêt, rendu sur une requête des Amis de la Terre, la Haute juridiction avait jugé que le dépassement des valeurs limites en particules et en dioxyde d'azote violait la directive sur la qualité de l'air. Il avait enjoint le Gouvernement d'adopter au plus vite des plans permettant d'y remédier. Estimant que ce dernier n'avait pas pris les mesures qu'imposait la décision, l'ONG, accompagnée de 77 autres requérants, avait de nouveau saisi le Conseil d'État, en octobre 2018, pour contraindre l'État à la respecter.
Montant inédit
« Le montant de l'astreinte proposée par le rapporteur est inédit dans la jurisprudence. Il se rapproche du montant des amendes susceptibles d'être prononcées par la Cour de justice de l'Union européenne et montre l'intérêt qu'attache le Conseil d'État au respect de sa décision, à l'autorité de la justice face à celle du Gouvernement ainsi qu'aux enjeux majeurs liés à la qualité de l'air en France », réagit Louis Cofflard, avocat des requérants.
En octobre dernier, la France avait été condamnée par la Cour de justice de l'Union européenne pour avoir dépassé de manière systématique et persistante la valeur limite annuelle pour le dioxyde d'azote. Un deuxième contentieux portant sur les particules PM10 est par ailleurs engagé devant la Cour depuis 2011.
Reste maintenant à voir si l'assemblée du contentieux, qui doit rendre sa décision d'ici trois semaines environ, va suivre les conclusions du rapporteur public. Souhaitant sans doute allumer un contre-feu, la ministre de la Transition écologique a annoncé, la veille de l'audience, une série de mesures pour lutter contre la pollution de l'air : création d'une dizaine de nouvelles zones à faibles émissions, subvention exceptionnelle de 2,8 millions d'euros aux associations de surveillance de la qualité de l'aire (Asqaa), modernisation de l'indice de qualité de l'air et surveillance des pesticides.