À l'occasion d'une table ronde sur le balisage lumineux, organisée mardi 5 juillet 2011 par le Bureau franco-allemand de coordination des énergies renouvelables, professionnels du secteur et parties prenantes ont présenté différentes pistes pour concilier l'implantation d'éoliennes et la sécurité des aéronefs.
Pour l'armée, "le balisage lumineux est tout aussi important que la perturbation des ondes des radars par les parcs éoliens", explique la capitaine de frégate Annick Sarrade, ajoutant qu'"il est indispensable de signaler les obstacles à la navigation aérienne, en particulier pour les aéronefs naviguant selon la règle 'voir et éviter'." La question se pose d'autant plus que certaines éoliennes atteignent 180 m de hauteur, alors que l'aviation militaire effectue parfois des vols d'entraînement à une altitude de 100 m.
Si tous les participants s'accordent sur l'importance du sujet, il n'en est pas moins vrai qu'aucun d'entre eux n'a eu connaissance d'un quelconque accident. Seule Annick Sarrade apporte un bémol et indique avoir eu connaissance de certains problèmes lors de la construction des éoliennes avant que le balisage ne soit installé.
De nombreuses méthodes d'atténuation existent

C'est à partir de ces lampes LED que fut développée en Allemagne la technologie W-Rot qui délivre une intensité lumineuse variable selon la ligne de visée. Ainsi, la luminosité est plus intense pour un avion situé à la hauteur de la lampe que pour des observateurs situés au sol à proximité de l'éolienne.
La troisième technologie développée, toujours en Allemagne, permet d'adapter l'intensité du balisage en fonction de la visibilité. Ainsi, lorsque que la visibilité est supérieure à 5 km, l'intensité lumineuse est réduite de 70 % et si elle est supérieure à 10 km l'intensité est réduite de 90%.
Enfin, la dernière technologie, qui pour l'instant en est au stade expérimental, consiste à adapter l'éclairage en fonction du besoin. Il s'agit d'équiper les parcs de moyens de détection afin d'allumer le balisage lumineux uniquement lorsqu'un avion s'approche.
Souplesse de la législation allemande
Cependant, si ces technologies permettent de réduire les nuisances lumineuses, la législation française les interdit. En France, l'arrêté du 13 novembre 2009 relatif au balisage des éoliennes prévoit que celles dont la hauteur totale est inférieure à 150 m soient balisées à l'aide de feux lumineux. Ce balisage est effectué de jour par des feux à éclats blancs dont l'intensité est de 20.000 candelas (cd) et de nuit par des feux à éclats rouges de 2.000 cd. Ces feux d'obstacle sont installés sur le sommet de la nacelle et doivent assurer la visibilité de l'éolienne dans toutes les directions. Pour les éoliennes dépassant 150 m le balisage est complété par des feux rouges fixes de 32 cd installés à intervalles réguliers sur le mat. Par ailleurs, la réglementation n'autorise ni la technologie W-Rot, ni la modulation de l'intensité lumineuse en fonction de la visibilité.
"Du fait de la proximité des riverains, la question de l'acceptabilité des parcs éoliens s'est posée très en amont en Allemagne", explique Konrad Hölz, représentant le ministère de l'environnement allemand, pour justifier la plus grande souplesse du droit allemand qui accepte différentes techniques d'atténuation et autorise le marquage avec de simples bandes rouges pour la plupart des éoliennes de moins de 100 m. "L'Allemagne est en avance par rapport à la France" confirme Benjamin Content qui s'interroge sur les évolutions souhaitables en France : "Faut-il adopter le système W-Rot ? Faut-il adopter un balisage peint de jour ?"
Les promesses du balisage intelligent
Reste que les problèmes ne sont pas complètement réglés en Allemagne et, malgré sa plus grande souplesse, "la réglementation actuelle entraîne un rejet par la population des parcs éoliens, en particulier s'agissant de l'éclairage nocturne", regrette Thomas Herrholz, responsable du projet de balisage intelligent chez Enertrag. "Certes les riverains sont favorables au balisage lumineux car ils reconnaissent le danger, mais ils ne comprennent pas qu'on ne puisse pas désactiver le balisage lorsqu'il n'y a pas d'avion à proximité", explique-t-il.
Il préconise donc de développer les technologies d'activation du balisage en fonction des besoins, c'est-à-dire approximativement durant 10% du temps. Néanmoins, "tous les problèmes du balisage intelligent ne sont pas encore réglés" pondère Konrad Hölz, reconnaissant cependant qu'"il y a un consensus sur l'intérêt de la technique."
En l'occurrence, les opérateurs misent sur trois techniques. Il est tout d'abord possible d'installer des radars sur les mâts des éoliennes. Actuellement testée en Allemagne, la technologie a le désavantage de coûter cher. En effet, il faut mettre en réseau plusieurs radars sur les éoliennes en périphérie du parc pour assurer une couverture dans toutes les directions. Autre problème, le recours aux radars nécessite l'octroi d'une fréquence alors que les utilisateurs habituels sont déjà en concurrence pour l'attribution des fréquences disponibles. "Un test effectué en Allemagne sur le parc de Nadrensee a montré que la technique fonctionne", explique Thomas Herrholz, précisant qu'"il a aussi montré que la coordination en matière d'usage des fréquences reste à définir, en particulier avec l'armée."
Une autre technologie se base sur l'utilisation de radars secondaires captant les émissions des transpondeurs qui émettent les informations relatives à la position des avions. Si la solution est simple et peu onéreuse, elle dépend de l'équipement des avions qui ne disposent pas tous de transpondeurs.
Enfin, une troisième solution se base sur l'installation de radars passifs dont la particularité est de détecter les avions en utilisant les réflexions des ondes émises par des sources variées, telles que les émissions radiophoniques. Il n'est donc plus utile d'attribuer une fréquence aux radars des parcs éoliens, néanmoins la technologie dépend des émissions d'autres utilisateurs qui peuvent interrompre leurs émissions. De plus la mise en œuvre de la technologie est lourde car elle nécessite d'intensifier les signaux reçus du fait de leur faible intensité. En l'état, cette option reste à l'état de projet et n'a pas encore fait l'objet de tests.