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Pour réduire la pollution des eaux aux nitrates, les agriculteurs veulent innover

4ème Programme d'Action au titre de la Directive relative à la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles. Entre obligations et contraintes environnementales, les Chambres d'Agricultures s'interrogent.

Eau  |    |  C. Saïsset
   
Pour réduire la pollution des eaux aux nitrates, les agriculteurs veulent innover
© luSh
   
Alors que la mission interministérielle de lutte contre les algues vertes débutait ce mardi 22 septembre et que l'Etat annonçait une indemnisation de 215.000 € aux départements bretons touchés cette année par les « marées vertes », des élus et conseillers des Chambres d'Agriculture planchaient sur la mise en application de la Directive Nitrates. Cette sage initiative, venue non pas des syndicats agricoles mais de l'Assemblée Permanente des Chambres d'Agriculture (APCA) intervient alors que les exploitants agricoles se trouvent une nouvelle fois dans la ligne de mire : la qualité des eaux souterraines ne s'améliore pas en France.
L'effort du monde agricole est cependant loin d'être négligeable : plus de 2,795 Mds€ ont été investis avec l'appui des pouvoirs publics pour maîtriser la pollution des eaux par les nitrates dans le cadre des Programmes de Maîtrise des Pollutions d'Origine Agricole (PMPOA) I et II. Une étude de l'Institut de l'élevage montre notamment que les PMPOA I et II ont contribué à une meilleure gestion de 80 % de l'azote organique produit en Zone Vulnérable. ''Cela se traduit par une amélioration de la qualité de l'eau dans les régions d'élevage où les exploitants se sont massivement engagés dans ces programmes'', témoigne Joseph Menard, vice-président eau et environnement de l'APCA.
Atteindre le bon état écologique des masses d'eau d'ici 2015, tel est l'objectif de la Directive Cadre sur l'Eau. Mais ''l'évaluation en 2008 du 3ème Programme d'Action de la Directive Nitrates donne des résultats insuffisants pour répondre aux objectifs de la DCE'', affirme Valérie Maquère, de la Direction générale des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires du Ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et de la Pêche.
Au moment où le 4ème Programme d'Action (PA) entre en vigueur, avec 80 % des PA départementaux déjà validés, et sachant qu'il sera évalué au niveau national avant d'être pleinement mis en œuvre (!), l'APCA a jugé bon de regarder comment s'applique cette directive européenne chez nos voisins européens. Les élus entendent là aussi anticiper sur la nécessaire conciliation des 4èmes PA départementaux avec la mise en œuvre dès le 1er janvier prochain des Schémas Directeurs d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE, valant plan de gestion au titre de la DCE) et dès 2012, des Mesures Agro Environnementales financées par les Agences de l'eau pour la protection des « 500 captages prioritaires du Grenelle de l'environnement ».

Comparaison européenne : des bases communes, des particularités locales

Quels Etats-Membres autres que la France, où 80 % des ressources en eau potable proviennent des eaux superficielles, sont soumis à des contentieux pour non respect du seuil de 50 mg de nitrates/litre ? Luisa Samarelli de l'unité Agriculture, sols et forêts de la DG Environnement de la Commission européenne ne peut répondre : il s'agit de contentieux pour non respect de la Directive sur les eaux brutes superficielles destinées à la consommation humaine. Selon l'étude non exhaustive de l'APCA, à laquelle 15 Etats membres ont répondu, ce seuil de 50 mg de nitrates/litre est en général celui retenu pour identifier une pollution aux nitrates des eaux superficielles et souterraines au titre de l'application de la directive Nitrates, considérée maintenant comme une directive fille de la DCE.
Par contre, la France n'est pas le seul Etat-Membre à se trouver en contentieux pour non respect de la désignation des Zones Vulnérables (ZV) rendue obligatoire au titre de la Directive Nitrates. Le Royaume-Uni, Italie, Portugal, et la Région Wallonie ont déclaré à l'APCA être dans ce cas. La raison de ce contentieux pour la France n'est pas précisée. Certains notent cependant qu'au contraire de l'Autriche, Finlande, Allemagne ou du Danemark, elle a fait le choix de ne considérer que des parties de son territoire en ZV. Et que ce choix repose parfois plus sur un critère politique que de vulnérabilité hydrogéologique (présence de karst ou d'un aquifère en sous-sol) ou de pente du sol (facteur aggravant le lessivage). En outre, au regard de l'augmentation de la taille des exploitations et de la baisse du nombre d'agriculteurs, cette répartition - exclusive de certains départements tels que la Dordogne - semble discutable.
C'est d'ailleurs ce constat qui conduit le Danemark, pays précurseur dans la mise en œuvre de la Directive Nitrates (avant même son adoption en 1991) où la densité d'élevages est équivalent à celle de la Bretagne et où 95 % de l'eau potable provient de ressources souterraines, à engager ses éleveurs dans une « croissance verte » adoptée en juin dernier. Un des objectifs est d'atteindre 50 % de biogaz produit à partir des déjections et effluents animaux en 2020. ''A l'avenir nos porcs seront producteurs d'énergie et non plus seulement produits de viande !'', s'est exclamé Erik Jorgensen, expert en environnement du Bureau Agriculture&Alimentation Danois. Osés, les Danois ! Dès le milieu des années 80, ils ont choisi de réduire de 50 % la charge en nitrates d'origine agricole ''pour préserver leur environnement''. Et en 1998, dans le cadre du PA Directive nitrates, ils ont décidé de réduire de 10 % les quotas d'apports azotés par rapport à l'optimum de production, quitte à devoir importer du blé panifiable ! ''Sans pour autant mettre en péril la souveraineté du pays'', relativise Erik Jorgensen. Il n'empêche, à entendre les réactions dans la salle de l'APCA, les agriculteurs sont prêts à s'engager dans la protection de l'environnement mais pas au détriment de la production agricole.
Justement, ''Si la Directive Nitrates était parfaitement mise en œuvre, sans autres mesures liées à la politique de l'air notamment, cela permettrait une réduction estimée à 14 % les émissions d'ammoniac en 2020 par rapport à 2000, et à 6% de celles du gaz à effet de serre qu'est le protoxyde d'azote'', encourage Luisa Samarelli.

2010 : prochaine évaluation de la Commission européenne

Dans le cadre de leurs Programmes d'Action, les Etats Membres sont soumis à l'obligation de prendre un certain nombre de mesures : définir des périodes d'interdiction d'épandage, des capacités de stockage des engrais d'origine organique (lisier, etc.), épandage sur sols en fortes pentes et à proximité des cours d'eau, équilibre de la fertilisation, respect du 170 kg d'azote organique/ha/an. Le coût/efficacité de chacune de ces mesures prises pour réduire la présence de nitrates dans les eaux doit maintenant figurer dans le rapport d'évaluation remis tous les quatre ans à la Commission européenne. À ce jour, seuls deux ou trois Etats-Membres s'y soumettent. La France, non. Or, il serait intéressant de connaître cette donnée en ce qui concerne une mesure facultative au titre de la Directive Nitrates, adoptée dans le cadre du 4ème Programme d'Action français pour répondre à l'un des objectifs du Grenelle de l'Environnement : « 100 % de couvertures des sols » à l'automne d'ici 2012 pour éviter le lessivage des sols lors du pic de minéralisation. L'efficacité de cette mesure « généralisée » et coûteuse (environ 80 €/ha pour un CIPAN, Culture Intermédiaire et Piège à Nitrates) fait l'objet de contestation dans la profession agricole, notamment lorsqu'elle s'applique aux terres argileuses en zone humide. Une pratique interdite au Danemark. ''Lorsque cette implantation [de CIPAN] est problématique, s'engager collectivement dans la réflexion sur la gestion du risque azoté pendant l'interculture avec pour objectif la préparation du 5ème programme d'actions, tempère Valérie Maquère. La voie est ouverte aux expérimentations locales, aux mécanismes de substitution.
L'évaluation des PA 2004-2007 des différents Etats-Membres sera rendue publique début 2010. D'ores et déjà, il est annoncé une amélioration ou une stabilité de la qualité des eaux souterraines sur 70 % des points de surveillance du réseau Nitrates et une dégradation sur 30 % des points. Cette proportion serait la même sur les eaux superficielles. Par contre, un problème d'interprétation des données se poserait pour évaluer la qualité des eaux marines et le caractère d'eutrophisation des eaux. « L'un des critères retenus pour la détermination des Zones Vulnérables étant l'eutrophisation, le programme d'action adopté par chaque Etat Membre doit être applicable là où les eaux douces sont eutrophisées », précise Luisa Samarelli. La France a choisi d'adopter une définition du « cours d'eau » jugée complexe par le monde agricole, mais n'a pas encore défini la notion d'« eutrophisation » de l'eau - l'Espagne non plus. Les « marées vertes » bretonnes annonceraient-elles de nouveaux contentieux avec la Commission européenne ?

Réactions8 réactions à cet article

bien vu Camille

intéressantes comparaisons avec le Danemark. pour info, le contentieux européen sur les nitrates qui menaçait la france porte sur deux régions principalement: Bretagne (eau distribuée, ensuite étendu à la ressource) et Poitou-Charentes (pour l'instant sur l'eau distribuée, mais...)

raoul | 29 septembre 2009 à 21h09 Signaler un contenu inapproprié
les nitrates

bonjour,beaucoup de parlotte et peu de résultats comme souvent,il éxiste un minéral qui lie le nitrate dans les déjections porcines il suffit de l'adjoindre a la nouriture de nos animaux en élevage associés a un équilibre dans les menus composés et on obtient d'éxcellent résultats
il suffit de creuser un peu dans les méthodes appliquées outre-rhin pour constater que des industriels ont franchis le pas depuis quelques années déjà
l'écologie et ses mannes financiéres!parlons peu,copions l'éxistant sans chercher a faire chacun sa petite sauce interne,il en va de notre patrimoine et pas du porte monnaie des industries
agir est le maitre mot
l'attentisme ne paie pas

franck59 | 01 octobre 2009 à 06h27 Signaler un contenu inapproprié
Bilan carbone ??

Lorsqu'on épend des engrais azotés, prend on en compte le mode de fabrication de ces produits.
Quelle est la base de leur fabrication?
Y-a-t-il émission de gaz carbonique au cours de cette fabrication?
Comment leur prix va-t-il évoluer s'ils sont soumis à la taxe carbone ?

Ne serait-il pas opportun d'envisager de remplacer ces produits par d'autres, issus du retraitement des boues de stations d'épuration, ou de la mthanisation des lisiers et autres déchets agricoles.

Le pétrole a été un élément clef de notre développement industriel, mais, en apportant une matière première à faible coût, il a détruit des emplois dans le domaine du recyclage (au sens le plus large). Ne serait-il pas temps de repenser à des productions faisant plus appel à la valorisation des actuels déchets ? Et de préparer une fiscalité favorisant cette valorisation ?

Dominique43 | 01 octobre 2009 à 10h36 Signaler un contenu inapproprié
interressant

C'est très intéressant de comparer avec les politiques des autres pays de l'UE.
L'article n'est pas très clair sur un point: les cipan sont interdits au Danemark? ça serait étonnant. De plus, l'évaluation du coût des cipan est à mettre en parallèle avec les apports agronomique de la cipan...

cipan | 01 octobre 2009 à 11h24 Signaler un contenu inapproprié
Re:les nitrates

comme la plupart du temps, je pense que l'on ne cherche pas les bonnes solutions. A mon avis il faudrait déjà inciter les français à manger moins de viande, qui n'est pas forcément synonyme de santé. On peut très bien vivre en divisant au moins la quantité de viande par 2.
On pourrait de ce fait limiter les nitrates, et consacrer des champs à une culture plus végétarienne.
Eric.

fish08 | 01 octobre 2009 à 15h21 Signaler un contenu inapproprié
aux pollueurs de payer

Pour être tout à fait pertinent, j'aurais souhaité que votre article puisse annoncer les sommes totales dépensées depuis le début de la lutte contre les pollutions en distinguant bien les sources de financement. je ne vous jette pas la pierre, ces chiffres sont bien gardés. Le PMPOA ne représente qu'une partie du financement en Bretagne et provient en grande partie des contribuables qui payent aussi pour feu Bretagne eau pure, le traitement des eaux, l'enlèvement des poissons morts et des algues vertes....
Tant que la politique pollueur payeur ne sera pas mise en place il n'y a aucune raison que les agriculteurs peu respectueux de leur environnement ( de moins en moins nombreux mais toujours très virulents et dans les sphères des décideurs) évoluent positivement. Le lobby agropharmaceutique veille aussi...
Les discours vont bon train depuis les années 60.
En 2000 l'administration agricole nous dit encore "on ne peut pas sanctionner on commence la sensibilisation, faut pas braquer les agriculteurs." ...
Je me réjouie que l'UE surveille et sanctionne mais j'en ai marre de payer pour des irresponsables qui ne pensent qu'à leurs profits immédiats en massacrant leur outils de travail et notre,leur santé...
Agriculteurs responsables recevez mes salutations les meilleures et merci de faire évoluer très rapidement le maximum de vos représentants de la profession. Sortez de l'"exploitation agricole" pour revenir à une agriculture respectueuse de ces intérêts à long terme.

Anne

Anne | 02 octobre 2009 à 10h35 Signaler un contenu inapproprié
Re:Re:les nitrates

la qualité de l'eau est dégradée par les nitrates en zone d'élevage, mais aussi en zone de grandes cultures (via les engrais minéraux)... il ne suffit donc pas de manger moins de viande.

cipan | 06 octobre 2009 à 12h42 Signaler un contenu inapproprié
Quand la sensibilisation ne suffit plus

Il faut prendre des sanctions : il faut encourager les agriculteurs, les éleveurs qui décident de produire autrement, par des méthodes respectueuses de l'environnement, qui développent une agriculture raisonnée, qui cherchent la qualité plutôt que la quantité, le profit, qui développent une agriculture et un élevage de proximité, près du consommateur ( ceci valable pour les pays dépossédés de leurs terres en Afrique et ailleurs)
On dira qu'il faut produire intensément pour nourrir la planète, ce toujours plus à tout prix, avec des engrais toxiques, se retourne contre son but premier. Non seulement on ne nourrit pas la planète, mais les sols s'appauvrissent, les espèces animales, petits animaux qui jouaient leur rôle de régulateurs disparaissent, les eaux sont polluées...
Certains réussissent à produire dans le respect de l'humain, de sa santé, de la biodiversité, c'est ceux-la qu'il faut aider, encourager et prendre des sanctions sévères contre ceux qui ne veulent pas changer de méthode,responsables de toutes ces pollutions, lisier, algues vertes...
On nous dit qu'il y a eu des efforts de fait certes mais dans quelles proportions ? de l'ordre de 15% en dix ans, ridicule !depuis le temps que l'on tire la sonnette d'alarme. nous ne voulons pas des mesurettes, mais de fermes décisions
Messieurs les agriculteurs cessez de vous plaindre changez vos méthodes et les consommateurs vous soutiendront. Il est normal que le pollueur paie lorsqu'il ne veut rien entendre!

debat | 21 octobre 2009 à 22h02 Signaler un contenu inapproprié

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