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Actu-Environnement

Porte-avions « Foch » : la France pourrait avoir à gérer le démantèlement

Les autorités turques viennent de refuser que le porte-avions « Foch » soit démantelé sur leurs côtes. En application du principe pollueur-payeur, la France pourrait avoir à assurer une partie du démantèlement du navire.

Déchets  |    |  P. Collet
Porte-avions « Foch » : la France pourrait avoir à gérer le démantèlement

Qui démantèlera le porte-avions Foch ? Le navire, vendu au Brésil en 2000, devait être ferraillé en Turquie. Mais des associations locales s'y opposent, au motif qu'il contient de nombreux polluants. La Fédération des entreprises du recyclage (Federec) et la Confédération européenne des industries de recyclage (Euric) rappellent que leurs adhérents ont la capacité de dépolluer le navire et de le démanteler dans les conditions imposées par l'Union européenne. Bien que le navire soit aujourd'hui brésilien, la France devrait assumer une part du démantèlement en tant que producteur, estiment les professionnels.

Un inventaire des polluants lacunaire

Le porte-avions Foch (rebaptisé Sao Paulo par le Brésil) pourrait bien donner lieu à un imbroglio comparable à celui qu'a connu son grand frère le Clemenceau, entre 2003 et 2010. Au début du mois, l'affaire semblait pourtant entendue : le navire quittait Rio de Janeiro pour être ferraillé en Turquie par le chantier Sök Denizcilik agréé par l'Union européenne, rapporte l'association Robin des bois, spécialiste reconnue du sujet.

La situation bascule, le 26 août, lorsque le ministre de l'Environnement turc annule le permis d'importer du navire. Parallèlement, l'autorité brésilienne, compétente au titre de la Convention de Bâle sur le contrôle des exportations de déchets dangereux et de leur élimination, suspend l'autorisation d'exporter le porte-avions. Les autorités considèrent dorénavant que « la poursuite du voyage serait un trafic illégal de déchets », explique Robin des bois.

En cause ? Un diagnostic des polluants jugé insuffisant. Selon la branche turque de Greenpeace, le navire contiendrait « des tonnes d'amiante, de tributylétains (TBT), de polychlorobiphényles (PCB) et de matières radioactives ». De son côté, Robin des bois évoque, entre autres, « 17,5 km de tuyauteries avec calorifugeage amianté, 2,8 km de gaines de ventilation amiantées, 2 380 m2 de parois isolantes avec de l'amiante projeté, 3 920 m2 de matelas amiantés dans des cloisons coupe-feu, 7 120 m2 de dalles amiantées et 44 000 m2 de peinture amiantée ». Et, contrairement au Clemenceau, l'ex-Foch n'a pas été, ne serait-ce que partiellement, désamianté avant d'être expédié en Turquie.

Le Foch peut être démantelé en Europe

“ La France et le Brésil doivent régler rapidement le problème politique ” Olivier François, Euric
Renvoyé par les autorités turques avant qu'il ne franchisse le détroit de Gibraltar, le porte-avions pourrait retourner au Brésil où « le projet d'océanisation, autrement dit l'immersion de ce déchet militaire de 265 m de long, (…) risque de l'emporter », explique Robin des bois. C'est là qu'interviennent Federec et Euric.

Plutôt que d'être envoyé par le fond, le navire devrait être démantelé dans les règles de l'art en Europe. Contacté par Actu-Environnement, Olivier François, qui préside Euric et la commission internationale de Federec, explique que les acteurs européens sont prêts à recycler le navire et disposent des infrastructures nécessaires. L'Union européenne a officiellement reconnu 37 sites, dont quatre en France.

Concrètement, il propose que soit reprise la procédure appliquée en 2003 pour le Clemenceau : lancement d'un premier appel d'offres pour réaliser un diagnostic des polluants en bonne et due forme, suivi d'un second pour attribuer le chantier de déconstruction à proprement parler. Et de glisser que, dès 2003, le parallèle avait été fait entre le Clemenceau, qui débutait la procédure, et le Foch, qui, tôt ou tard, aurait à subir le même sort.

Responsabilité du producteur

Si le parallèle existe entre les deux navires, c'est que la vente du Foch au Brésil n'exonère pas la France de certaines de ses responsabilités. De la même manière que les metteurs en marché de certains produits sont responsables de leur fin de vie, la France pourrait avoir à participer au démantèlement de son ancien porte-avions. Paradoxalement, cette application du principe pollueur-payeur est à la base d'un dispositif dont la France se veut la championne : la responsabilité élargie des producteurs (REP).

« Il est difficile pour la France de tourner le dos au problème », estime Olivier François. Le responsable fédéral juge que « la France et le Brésil doivent régler rapidement le problème politique ». En clair : les deux pays doivent trouver un accord sur le partage des responsabilités et des coûts.

Robin des bois porte une analyse similaire : « La France a une part de responsabilité dans cette exportation transocéanique de déchets gris [puisqu']au lieu de procéder au démantèlement du porte-avions Foch, elle l'a cédé à la Marine brésilienne en 2000. » L'ONG estime que la Marine nationale a vendu un navire « à bout de souffle », plutôt que de le démanteler convenablement.

Pour les professionnels du secteur, l'enjeu est de taille. Euric explique que le démantèlement en Europe du porte-avions « donnerait un signal fort à tous les armateurs européens qui contournent depuis des années leurs obligations de recyclage en Europe et qui envoient chaque année leurs bateaux en fin de vie par centaines en Asie ».

Réactions2 réactions à cet article

"Océaniser" plutôt que "couler" et donc laisser une grande épave bourrée de polluants aux bons soins de Dame Nature, loin de chez nous loin de nos yeux tant qu'à faire... Que c'est beau, ce langage techno ! Quelle talent, quelle créativité, quelle éloquence quand il s'agit de gros sous ! En revanche, on constate une fois de plus que cette belle virtuosité linguistique si française n'est plus de mise dès lors qu'il s'agit de protection de l'environnement concrète : là, soudainement, la réalité derrière le décorum s'avère moche et consternante !
Et si ces grands ronds dans l'eau aussi ridicules que pathétiques pouvaient un peu élever la conscience écologique de nos grands décideurs et éviter ainsi d’onéreuses additions au final ?
Au fait, qui paye au final pour cette gabegie ?

Pégase | 08 septembre 2022 à 09h48 Signaler un contenu inapproprié

Faire traiter nos déchets par les pays de Sud... Une longue habitude, c'est tellement commode d'exporter les sales métiers qui sont derrière contre petits arrangements financiers, notre beau pays reste propre et vert n'est ce pas ! Un porte-avion, c'est très visible, mais l'électronique obsolète, les pneus, les polluants et installations divers... sans oublier toutes nos importations fabriquées dans des conditions indignes, etc... Ce mode de gestion est purement scandaleux, il faut qu'on assume les conséquences de nos actes ! Maintenant... j'attends de voir les postures des écolos si ce bâtiment revient chez nous...

dmg | 08 septembre 2022 à 11h16 Signaler un contenu inapproprié

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