La biomasse agricole ne constitue pas encore une alternative suffisante aux énergies fossiles pour atteindre l'objectif français de neutralité carbone pour 2050. Une récente étude publiée par France Stratégie, institution rattachée au Premier ministre, montre qu'il n'est pour l'instant pas envisageable de mobiliser l'équivalent de 240 TWh PCS d'ici 2050 comme l'ambitionne la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC). Pour rappel, cet objectif est compris dans un total de 430 TWh pour l'ensemble de la biomasse exploitée, dont la biomasse agricole et comprenant aussi la biomasse aquatique, les déchets verts urbains, ou encore les coproduits agroalimentaires.
Un potentiel énergétique insuffisant
« Les taux de mobilisation de la biomasse agricole pour l'énergie et les matériaux sont très élevés pour le lin/chanvre, les cultures pérennes dédiées et le bois issu de l'agroforesterie dont l'utilisation énergétique est assez développée, mais restent assez faibles pour les effluents d'élevage, les résidus de cultures ainsi que pour les cultures intermédiaires et surplus d'herbes », soulignent les experts de France Stratégie dans une note de synthèse de l'étude précitée. En prenant uniquement en compte les disponibilités supplémentaires actuelles (pas encore valorisées), le potentiel énergétique maximal de la biomasse agricole française s'élève à environ 82 TWh.
En conséquence, France Stratégie suggère, notamment, de se focaliser davantage sur le développement de l'agroforesterie : « Le bois issu de haies et alignements d'arbres ainsi que d'autres pratiques agroforestières peut représenter une autre catégorie de biomasse agricole ».
Recourir davantage à l'agroforesterie
Selon un scénario prospectif impliquant un renforcement du développement de ce secteur, l'institution estime ainsi à 155 TWh le potentiel énergétique de la biomasse agricole à l'horizon 2050 – en prenant aussi en compte l'exploitation de biocarburants de « première génération », fabriqués principalement à partir de cultures alimentaires (céréales, cannes à sucre, betteraves, autres huiles végétales). L'écart avec l'ambition de la SNBC persisterait, certes à hauteur de 95 TWh, mais « un changement de pratiques agricoles sur le long-terme pourrait donc potentiellement influer sur le niveau de disponibilité de certaines ressources et l'équivalent énergétique estimé ».
Cependant, cette évolution des pratiques agricoles reste encore « incertaine » et demanderait de forts soutiens. Ainsi, France Stratégie recommande « un soutien spécifique intégrant les externalités positives [des ressources en biomasse agricole] tout en allant de pair avec le développement d'une stratégie de long terme associant l'ensemble des acteurs des filières ». Autrement dit, la mobilisation de la biomasse agricole afin de parvenir à la neutralité carbone est possible mais nécessite le développement d'un « programme agricole de long terme intégrant une vision transversale [et] la mobilisation des autres gisements de biomasse, notamment forestiers ».