Des coûts prévisionnels en hausse, des prévisions de trafics en baisse et une rentabilité socioéconomique incertaine : la Cour des comptes dans un référé (adressé le 1er août) s'interroge sur le bien-fondé du projet de liaison ferroviaire entre Lyon et Turin. Il prévoit en effet de relier les 175 kilomètres entre Aiton (en Savoie) et Orbassano (périphérie de Turin) en franchissant les obstacles naturels grâce à une autoroute ferroviaire.
"Du fait notamment du renforcement des règles de sécurité et du changement de tracé de la partie commune, l'estimation du coût global est ainsi passée, en euros courants, de 12 Md€ en 2002 à 26,1Md€ selon les dernières données communiquées par la direction générale du Trésor", souligne la Cour des comptes. Elle estime désormais indispensable la certification par un tiers extérieur des coûts prévisionnels de la partie commune.
Autre bémol soulevé par la Cour : le risque de saturation des infrastructures existantes n'est aujourd'hui envisagé qu'à l'horizon 2035.
"La mobilisation d'une part élevée de financements publics se révèle très difficile à mettre en œuvre dans le contexte actuel", souligne la Cour.Elle " relève à ce propos qu'aucun financement n'est prévu dans le budget de l'Agence de financement des infrastructures de transport en France pour 2013"
Selon le Cour, l'amélioration de la ligne existante doit rester une solution à envisager. Cependant en cas de maintien de la poursuite du projet, elle recommande d'étudier des mesures contraignantes de report du trafic transalpin de la route vers la voie ferrée.
Dans sa réponse à la Cour, datée du 8 octobre, Jean-Marc Ayrault réaffirme la volonté du gouvernement à réaliser ce projet. Concernant le financement, il reconnaît que "le budget nécessaire à la réalisation de ce grand projet est considérable, spécialement à un moment où le niveau des dépenses publiques doit être maîtrisé. En conséquence, une participation importante de l'Union Européenne au financement du projet est indispensable". Le gouvernement a toutefois depuis annoncé la création d'un nouveau schéma de mobilité durable.
Il rappelle également que RFF aurait estimé à plus de 4% le taux de rentabilité socioéconomique du projet sur les accès français. Il assure également que si le trafic de marchandises à travers les Alpes franco-italiennes a diminué, les Alpes dans leur ensemble affichent "une croissance observée (…) de 3,3% par an en moyenne entre 1999 et 2007, la période suivante étant marquée par un recul lié à la crise puis une remontée".
Enfin, sur la question de l'augmentation des coûts prévisionnels, le Gouvernement met en avant des difficultés géologiques et la variation des prix entre leur réalisation et la date d'estimation des travaux.