Hasard du calendrier, la Commission européenne a lancé vendredi 21 novembre un nouveau système de quotas sur le gaz HFC, le jour où les participants aux négociations du Protocole de Montréal se quittaient sans accord sur le sujet, après 4 jours de négociations à Paris.
Les discussions portaient sur l'élimination progressive de ces gaz fluorés dans les pays en voie de développement. Leur impact sur l'effet de serre est plus de 1.000 fois plus important que le CO2, alors qu'ils sont substituables.
La proposition de l'UE suggérait de réduire leur production et leur consommation en organisant un agenda progressif de leur élimination à partir de 2017. Un projet qui réunit un vaste consensus international. Mais une dizaine de pays, principalement au sein de la ligue arabe, traîne des pieds.
Les pays producteurs de pétrole inquiets des nouveaux gaz réfrigérants
"Les pays producteurs de pétrole se disent inquiets pour des raisons techniques, ils craignent que le nouveau gaz réfrigère insuffisamment, alors qu'ils sont dans la plupart des pays où la vie est très dépendante de la climatisation" assure une source proche des négociations. Une position dont personne ne sait vraiment si elle est techniquement fondée. Mais qui devrait pouvoir être levée, tant la dizaine de pays en question se trouve isolée sur cette position.
L'intégration de cet "amendement de Paris" au protocole ne fait pourtant aucun doute selon Durwood Zaelke, président de l'ONG IGSD, qui suit les négociations de près. "L'adoption de cet amendement est inévitable, mais le timing n'est pas clair", estime-t-il, tout en se félicitant de l'attitude positive de l'Inde et de la Chine lors de ces négociations. "Nous avons franchi un cap à Paris, la Chine et l'Inde s'étant dites prêtes à voir comment avancer sur le dossier de l'élimination progressive des HFC", précise-t-il.
La France pourrait organiser une nouvelle négociation à Paris sur le sujet, avant la conférence de Paris Climat 2015.
"Il est important que toutes les parties s'engagent à éliminer les gaz qui détruisent la couche d'ozone, sans quoi la couche d'ozone ne se réparera pas. C'est pourquoi il est temps d'amender le Protocole de Montréal", explique-t-on du côté de la Commission européenne.
Des négociations 20 fois plus efficaces que le protocole de Kyoto
Très discrètes contrairement aux négociations du protocole de Kyoto, les discussions du protocole de Montréal affichent pourtant un bilan impressionnant. Entre 1990 et 2010, les négociations ont permis d'éliminer l'équivalent de 222 gigatonnes de CO2 de l'atmosphère, contre seulement 3,8 gigatonnes pour le Mécanisme de Développement Propre (MDP), ou 5 à 10 gigatonnes liées aux engagements des pays dans le cadre du protocole de Kyoto.
Mieux, entre 2020 et 2050, le protocole de Montréal envisage d'éliminer 210 gigatonnes de CO2 supplémentaires. Depuis leur début en 1987, elles ont aussi réussi à réduire la taille du trou dans la couche d'ozone aux effets dévastateurs sur la santé, qui devrait disparaître en 2065.
Le principal problème réside aujourd'hui sur les gaz réfrigérants : les gaz fluorés HFC qui ont remplacé les premiers n'ont pas d'impact direct sur l'ozone, mais s'avèrent très dangereux pour le climat.
En Europe, l'allemand Mercedes-Benz qui souhaitait continuer d'utiliser un gaz de type HFC pour la climatisation de ses voitures a été enjoint par la commission à modifier son système. Le sujet avait même conduit la France à bloquer les importations de Mercedes en 2013.
Nouveau système de quotas HFC en UE
Depuis, l'UE a mis en place un système de quotas pour les seuls gaz HFC, afin d'organiser leur élimination sur le sol européen. Moins ambitieux que l'UETS, puisqu'il concerne nettement moins d'implantations, le système qui débute le 1er janvier 2015 vise à réduire la consommation de gaz fluorés des deux tiers d'ici 2030.
"L'UE est un excellent élève en la matière, elle montre l'exemple ! Elle s'est dotée de la législation la plus ambitieuse", assure Durwood Zaelke.
Les premiers quotas ont été distribués le 21 novembre aux industriels européens concernés par l'importation ou la revente de ces gaz. Au total, 79 entreprises sont concernées, dont les plus gros sont le français Arkema, le franco-belge Solvay ou l'allemand Linde. Le marché étant surtout le fait des plus gros intermédiaires, 85% des quotas sont attribués aux 5 principaux producteurs et importateurs, et ce gratuitement.