Le député Antoine Herth (UMP, Bas-Rhin) a présenté le 19 avril son rapport visant à développer des méthodes de biocontrôle et protéger les végétaux par l'utilisation de mécanismes naturels. Objectif : promouvoir des alternatives aux produits phytosanitaires chimiques. Douze propositions ont été retenues par le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire. Elles seront mises en œuvre ''au cours des deux prochaines années'', a annoncé le ministre le mercredi 20 avril. Ces mesures s'inscrivent dans le cadre du plan Ecophyto visant à réduire "si possible'' de 50% les pesticides d'ici 2018.
Le purin d'ortie bientôt autorisé à la vente
Parmi ces mesures, figure la très attendue autorisation de mise sur le marché (AMM) des préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP) alors que la vente de ces phytosanitaires naturels est interdite depuis 2006. En cause : la loi d'orientation agricole qui a, il y a 5 ans, soumis ces produits naturels - utilisés par les jardiniers et agriculteurs bio - à la même procédure européenne d'autorisation que les pesticides de synthèse. Leur homologation se faisait depuis attendre. D'autant que le Règlement européen sur l'agriculture biologique de 2009 accepte l'utilisation de ces PNPP sur une exploitation certifiée bio. Un décret visant justement à simplifier la procédure de mise sur le marché des PNPP avait été publié en juin 2009.
L'homologation de ces produits naturels ''hors-la-loi'' devrait enfin … intervenir. M. Le Maire a annoncé mercredi que le purin d'ortie va être prochainement autorisé à la commercialisation. Le ministre a annoncé la publication, dans ''les prochains jours, de la première liste des substances autorisées'' pour les PNPP, conformément au décret, alors qu'elle était initialement prévue en janvier 2011. Cette liste sera suivie de la publication à venir de l'arrêté d'autorisation du purin d'ortie.
''L'ortie a été inscrite sur la liste européenne des substances de base, permettant désormais d'autoriser la mise sur le marché", prévue pour 10 ans, a expliqué le ministère. Le député Antoine Herth recommandait justement dans son rapport de classer les PNPP comme ''des produits phytopharmaceutiques à faible risque'' et ''substances de base'' prévus dans le nouveau règlement européen. Deux biais juridiques pour ''stabiliser le statut'' de ces préparations naturelles qui se ''heurte aux mêmes problèmes réglementaires que les autres spécialités autorisées en agriculture biologique'', décrit-il dans son rapport.
La ''hache de guerre'' pas pour autant enterrée…
Cette autorisation du purin d'ortie était demandée de longue date par les associations environnementales et de défense des PNPP qui s'étaient lancées dans une véritable ''guerre de l'ortie" pour promouvoir l'usage de ces produits naturels. Mais la fin de la guerre n'a pas sonné pour autant. Les plantes comme le neem et la fougère pourraient être exclues de la future liste de substances autorisées des PNPP. C'est ce que craint l'association Aspro-Pnpp qui maintient sa nouvelle action de protestation le 29 avril à Bègles (33). Les associations appellent à la commercialisation de tous les autres PNPP qui peuvent être aussi à base de prêle, de consoude ou de luzerne. A suivre....
De son côté, la Confédération paysanne estime qu'en "autorisant la commercialisation d'un symbole comme le purin d'ortie, le ministère va essayer de démobiliser ceux qui se battent pour l'autorisation" d'autres préparations naturelles. La Confédération reproche au gouvernement d'avoir compliqué le processus en exigeant que la substance de base de ces produits figure sur une liste homologuée par Bruxelles. ''La liste annoncée à grand renfort de publicité des plantes susceptibles d'être utilisées pour des PNPP ne remplace pas leur inscription à l'annexe européenne que le gouvernement impose toujours. Et les 200.000 euros annoncés dans la "feuille de route du ministre", pour le développement des produits biologiques ne permettront de mener à bien qu'un très petit nombre de dossiers''. Le syndicat dénonce en effet le coût du dossier de demande d'autorisation (40.000 euros, ndlr) , qui est, selon lui, ''inadapté aux PNPP'' et ''est exagéré par rapport au chiffre d'affaires annuel des entreprises artisanales du secteur''.
La lutte biologique parmi les autres mesures
Outre le recours aux PNPP, le député cite plusieurs autres méthodes alternatives : la réduction de doses, l'utilisation de macro- et micro-organismes ou de stimulateurs de défenses naturelles, ou encore l'usage de phéromones et auxiliaires de culture dont la coccinelle. Le décret relatif aux macroorganismes non indigènes utiles aux végétaux devrait être publié d'ici fin 2011. Le texte était déjà inscrit dans la loi Grenelle 2 de juillet dernier, dans le cadre de la lutte biologique. Il prévoit un système d'autorisation préalable pour l'introduction sur le territoire de ces macro-organismes avec réalisation préalable systématique d'une analyse du risque phytosanitaire. Des dérogations seraient possibles pour l'introduction d'espèces à des fins d'essais ou à des fins scientifiques sous réserve de garanties de confinement. Le ministère de l'Agriculture prévoit en outre dès 2012, de prendre en compte de manière différentiée l'usage des produits de biocontrôle dans le calcul des IFT (Indice de fréquence de traitements issus des enquêtes de pratiques culturales) de chaque exploitation.