"L'Autorité demande à la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) d'étudier les conditions d'une généralisation des moyens de substitution à l'utilisation des groupes auxiliaires de puissance (APU, pour Auxiliary Power Unit) ainsi que la possibilité de la mise en place d'une redevance aéroportuaire pour leur financement". Telle est l'une des principales recommandations formulées par l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa) dans son rapport annuel 2013 publié dimanche 5 mai.
L'APU est un moteur de l'avion permettant d'assure la ventilation de l'avionique, la fourniture d'électricité et, selon les besoins, la climatisation ou le chauffage lorsqu'il est au sol. Or, l'APU "est consommateur de kérosène, très polluant et extrêmement bruyant", rappelle l'Acnusa qui recommande d'en limiter l'usage. La DGAC dispose de six mois pour donner sa décision motivée.
L'année 2013 a été riche en événements concernant la pollution atmosphérique, rappelle l'Acnusa qui cite l'Année européenne de la qualité de l'air, clôturée par la présentation de la nouvelle stratégie européenne, et la classification de la pollution de l'air comme cancérogène certain par le Centre international pour la recherche sur le cancer (CIRC) de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Du côté de l'Autorité, 2013 a été marquée par les trois premières réunions du groupe de travail sur la qualité de l'air et les aéroports. L'Acnusa précise qu'"il envisage de rendre ses conclusions d'ici la fin de l'année 2014".
La France est très en retard
En attendant les conclusions du groupe ad hoc, l'Acnusa recommande d'ores et déjà de réduire la pollution atmosphérique liée aux APU, en leur substituant d'autres moyens d'alimentation électrique des avions au sol. La mesure s'inscrit dans un mouvement européen plus global puisqu'"en 2010, sur les 30 aéroports les plus fréquentés en termes de passagers et au sein de l'Union européenne, 22 d'entre eux comportent une restriction ou une limitation du temps d'utilisation de l'APU". Les contraintes limitant l'usage des APU sur les plateformes aéroportuaires varient selon la possibilité d'utiliser des équipement alternatifs, tels que des moyens d'alimentation en électricité fixes ou des unités de pré-conditionnement d'air (PCA), et des critères de température extérieure.
Les divers exemples présentés dans le rapport "démontrent bien qu'il est tout à fait envisageable d'encadrer l'utilisation de l'APU en ayant seulement des moyens de substitution en électricité", estime l'Acnusa, d'autant, "il convient d'y insister, [que] la mise en place de moyens de substitution permet d'améliorer la qualité de l'air et de réduire les nuisances sonores non seulement au profit des riverains mais aussi au profit des personnes fréquentant la plateforme et, au premier chef, des personnels travaillant sur la plateforme".
Et en France ? "Sur les 12 plateformes acnusées, 8 d'entre elles ont publié une limitation du temps d'utilisation de l'APU". Néanmoins, en Ile-de-France, l'entrée en vigueur l'arrêté du 27 juillet 2012 réglementant l'utilisation des APU lors de l'escale, sur les aéroports de Roissy Charles-de-Gaulle, Orly et du Bourget laisse à désirer. "Après un moratoire de six mois sur son application, l'année 2013 a été consacrée à la mise en place d'une procédure de contrôle de cet arrêté en raison de sa complexité", note l'Acnusa, pointant le fait que finalement "la portée de cet arrêté du 27 juillet 2012 est très limitée".
En cause, le faible nombre de postes équipés en PCA et prises 400 Hz, des équipements permettant de ne pas utiliser les APU. "La France est très en retard, alors que l'installation du dispositif est essentielle pour la protection de la santé", note l'Acnusa, ajoutant que "le retard qui affecte les aéroports parisiens touche encore plus les aéroports provinciaux".
L'Acnusa entend mieux faire respecter ses recommandations
Par ailleurs, l'Acnusa n'oublie pas que "la question des vols nocturnes reste l'une des plus sensibles, sinon la plus délicate", qu'elle a à traiter. L'an dernier, l'Autorité "avait fait un certain nombre de recommandations qui devaient permettre d'améliorer la situation des riverains, sans pour autant mettre l'équilibre économique des aéroports ou des compagnies aériennes en péril", rappelle-t-elle.
En l'occurrence, la principale recommandation était "l'instauration d'une plage de repos la nuit de samedi à dimanche de 23 heures à 6 heures sur l'ensemble des plateformes". Un an plus tard, elle constate que "ces recommandations (…) n'ont encore pas été suivies d'effet".
Le retard pris donne l'occasion à l'Acnusa de demander un retour "à plus d'orthodoxie dans la lecture et l'application des textes [régissant ses pouvoirs et les obligations de l'Administration]". Cette demande, qui sonne comme un rappel à l'ordre, doit notamment permettre une meilleure prise en compte de ses recommandations. Concrètement, l'Administration peut choisir de les suivre, ou non, et dispose d'un délai de six mois pour faire connaître sa décision motivée. Certes, la DGAC a toujours répondu aux recommandations, mais "elle l'a fait verbalement". Dans le cadre du retour à l'orthodoxie souhaité par l'Acnusa, l'Administration continuera à répondre aux recommandations, "mais elle le fera par écrit".