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Climat : l'Union européenne adopte un règlement sur les puits de carbone

Le nouveau règlement vise à harmoniser la comptabilité des émissions et absorptions de gaz à effet de serre des forêts, sols et zones humides des Etats-membres. Il s'agit aussi de les inciter à une gestion des terres favorable au climat à long terme.

Gouvernance  |    |  A. Sinaï

A l'issue de plusieurs années de débats, le règlement 2018/841 relatif à la prise en compte des émissions et des absorptions de gaz à effet de serre résultant de l'utilisation des terres a été publié le 30 mai 2018. Ce règlement a pour objectif de stabiliser la quantité de CO2 absorbée annuellement par les sols et les forêts de l'Union européenne. De fait, l'Europe est couverte à 90% de champs, de zones humides et de forêts, qui absorbent le carbone.

Depuis la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques adoptée en 1992, la comptabilisation de ces puits de carbone est au coeur de débats complexes. L'acronyme UTCATF (LULUCF en anglais, Land Use, Land Use Change and Forestry) désigne ces activités dites d'utilisation des terres, de changement d'affectation des terres et de foresterie. Le rôle des stocks de carbone dans l'atténuation des changements climatiques est également inscrit dans le Protocole de Kyoto et dans l'Accord de Paris sur le climat. Le préambule du règlement 2018/841 rappelle aux Etats membres qu'ils doivent assurer la conservation et la valorisation des puits et des réservoirs forestiers en vue d'atteindre l'objectif de l'Accord de Paris d'ici à 2050.

Le volet UTCATF se retrouve dans les politiques de l'Union européenne (UE) sur le climat. Pour réaliser son objectif de réduction de 40% de ses émissions d'ici à 2030 (par rapport à 1990), l'UE s'est dotée de trois piliers : l'utilisation des terres, le règlement sur le partage de l'effort et le marché carbone européen. Au total en Europe, le secteur UTCATF constitue un puits net éliminant environ 300 mégatonnes (MT) de dioxyde de carbone (CO2) par an dans l'atmosphère. Les forêts aménagées contribuent le plus au stockage du carbone, même si l'UE prévoit que ces puits diminueront de 110 millions de tonnes d'ici 2030, en raison, entre autres, de l'augmentation des sources d'approvisionnement en biomasse pour l'énergie.

Comptabiliser les forêts

L'enjeu du règlement du 30 mai 2018 est d'inciter les Vingt-Huit à éviter la déforestation et à maintenir les stocks de carbone dans la biomasse des forêts et des zones humides. Les ''règles de non-débit'' soulignent que les émissions de CO2 provenant du changement d'utilisation des terres ne doivent pas excéder les stocks de CO2 imputés au secteur UTCATF. La comptabilité se déroule sur une base de référence. Si l'absorption par les puits de l'UE est inférieure en 2021-2025 ou 2026-2030 par rapport à la période de référence historique 2000-2009, la Commission fera des propositions pour garantir l'intégrité de l'objectif global de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 2030.

Concrètement, les Etats membres soumettent un plan comptable forestier national à la fin de 2018 pour la première période (2021-2025) et à la fin de 2023 pour la deuxième période (2026-2030). Le plan comptable forestier national est public. Après le processus d'examen, les niveaux de référence finaux seront soumis d'ici fin 2019 et le 30 juin 2024. La Commission rassemblera tous les niveaux de référence dans un acte délégué au plus tard le 30 octobre 2020 et le 30 avril 2025.

Le règlement exige que les Etats membres veillent à ce que le secteur UTCATF dans son ensemble ne produise pas d'émissions nettes et contribue à atteindre l'objectif consistant à renforcer les puits à long terme. La version ''fuitée'' du rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) sur les 1.5˚C souligne la nécessité d'émissions négatives (où plus de CO2 est absorbé que libéré). Un moyen d'y parvenir est de protéger et de restaurer les forêts. Cependant, une caractéristique importante des activités de l'UTCATF est leur réversibilité potentielle en raison de la non-permanence des stocks de carbone accumulés. Il s'agit donc d'un mécanisme qui sollicite une comptabilité dans le temps.

Le secteur UTCATF fournit aussi des biomatériaux qui peuvent remplacer les matériaux fossiles ou à forte intensité de carbone. Il joue un rôle important dans le passage à une économie à faible taux d'émission de gaz à effet de serre. Le développement de pratiques et de technologies durables et innovantes, y compris l'agroécologie et l'agroforesterie, peut renforcer le rôle du secteur UTCATF en matière d'atténuation du changement climatique et d'adaptation à celui-ci.

Des marges de flexibilité généreuses

Les pays membres de l'UE sont autorisés à utiliser une quantité limitée de crédits générés par le secteur UTCATF pour compenser leurs émissions domestiques, dans le cadre du règlement sur le partage de l'effort.

Cette disposition permet de gommer les émissions de combustibles fossiles par des crédits forestiers. A l'échelle de l'UE, la flexibilité maximale est de 370 Mt de CO2 au total, ce qui correspond à 10% du puits de gestion forestière. Selon l'Etat-membre concerné, la marge de flexibilité varie entre 4 et 32%. Ce qui signifie que le secteur forestier peut être utilisé pour compenser le manque d'action dans les secteurs des transports, de l'agriculture et du bâtiment.

Pour Hanna Aho de l'ONG européenne Fern, ''les nouvelles sont un peu meilleures en ce qui concerne l'intégrité et la transparence des règles comptables. De nouvelles dispositions rendent obligatoire la comptabilisation des émissions provenant des zones humides gérées et une clause de sauvegarde devrait garantir que les forêts et les terres conservent la quantité de CO2 qu'elles séquestrent dans l'UE jusqu'en 2030''. Le règlement n'a toutefois pas permis une transparence totale sur la manière dont les Etats-membres devraient fixer des niveaux de référence pour la gestion des forêts.

La comptabilisation des émissions provenant de l'utilisation de la biomasse en tant qu'énergie renouvelable s'est améliorée, mais seule une partie des émissions sera comptabilisée. ''Les Etats membres qui dépendent de l'utilisation de la biomasse devraient se souvenir des impacts négatifs sur le puits de carbone forestier et s'assurer que les plans énergétiques nationaux ne menacent pas le rôle positif des forêts'', souligne Fern. Une sorte de quadrature du cercle.

Réactions1 réaction à cet article

En zones agricoles, les prairies permanentes et naturelles (non retournées, non traitées, à la flore spontanée) constituent certainement des puits à carbone efficaces. Mais c'est tout l'inverse avec les champs de cultures intensives au bilan écologique catastrophique (j'inclue ici la perte de biodiversité sauvage et la dégradation de la ressource en eau, tant au plan qualitatif que quantitatif).
Il est grand temps que l'UE se rende compte des "services" écologiques rendus par la biosphère et se préoccupe de sa préservation sur le long terme. Pour autant, ce nouveau règlement va-t-il s'imposer à la PAC, au co-financement par du LEADER, du FEADER, du FEIS, la Banque Européenne d'Investissement, etc., de projets prédateurs d'espaces et de ressources naturelles ?

Pégase | 02 août 2018 à 13h00 Signaler un contenu inapproprié

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