Après la loi de modernisation de l'action publique territoriale et le projet de loi relatif à la délimitation des régions, le Parlement se penche en procédure accélérée sur le troisième volet de la réforme territoriale : le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notr). L'article 6 de ce texte prévoit la création d'un schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire (Sraddt) qui remplacerait l'actuel schéma régional d'aménagement et de développement du territoire (Sradt), dont la portée est limitée, puisque non opposable.
Le gouvernement prévoit de préciser par ordonnance le contenu précis du Sraddt, mais donne toutefois de premières orientations dans l'étude d'impact. Que ce soit dans le cadre du conseil national de la transition écologique (CNTE), du CGEDD ou lors des débats en commissions sénatoriales, plusieurs réflexions ont déjà été menées.
Un contenu à la carte ?
Le gouvernement écarte l'idée d'une énumération limitative des documents que devra remplacer le Sraddt, afin de laisser un champ d'adaptation aux particularités régionales. Ainsi, les régions pourront l'élargir à d'autres thématiques qui relèvent de leurs compétences et qui ont un lien avec l'aménagement du territoire (charte d'un parc naturel régional, schéma régional d'aménagement des forêts, de développement touristique, schémas interrégionaux de massif et du littoral, directives paysagères, plan régional d'agriculture durable…). La réunion de ces documents au sein d'un schéma unique devrait entraîner plus de lisibilité et de cohérence dans l'action publique, estime l'étude d'impact.
"D'un point de vue général, une stratégie transversale de la région pour l'application des différentes politiques publiques, notamment transports (y compris infrastructures), environnement, agriculture et paysage, paraît utile", souligne le groupe de travail dédié à ce schéma au sein du CNTE. Mais certains s'interrogent sur l'addition de nombreux schémas thématiques. Par exemple, les associations de protection de l'environnement estiment que le Schéma de cohérence écologique (SRCE) ne doit pas être dilué dans ce schéma, au risque de remettre en question son opposabilité. L'association des régions de France (ARF) juge au contraire qu'il serait absurde de ne pas inclure le SRCE dans un schéma régional d'aménagement. Elle propose qu'il soit élaboré selon son mode actuel, puis intégré au Sraddt. Un point de vue défendu également par le CGEDD. Ce dernier souhaite aussi que figurent dans ce schéma une "approche qualitative du territoire régional [qui] aurait pour vocation de définir des thématiques et/ou des territoires prioritaires", ainsi que le schéma régional des carrières prévu par la loi Alur.
Des orientations et des normes
Mais justement, quelle sera la portée juridique de ce nouveau plan ? Il comprendra différents niveaux : un rapport, qui fixera des orientations générales, des objectifs et des indicateurs de suivi, et un fascicule présentant des règles générales opposables correspondant aux schémas sectoriels. Pour les rapporteurs de la commission des lois sénatoriale, "l'élaboration d'un schéma régional opposable (…) représente l'une des principales innovations du présent projet de loi [… et] témoigne de la volonté de faire de la région le niveau territorial stratégique de l'aménagement du territoire".
La concertation et l'évaluation, vecteurs de succès
Cela conduit à aborder la question de l'élaboration de ce vaste schéma régional. Devront y être associés : l'Etat, les départements, les EPCI ou les syndicats mixtes porteurs de Scot, le conseil économique social et environnemental régional, les chambres consulaires… Mais "le conseil régional a la possibilité d'associer et de consulter toute autre organisation", souligne le gouvernement dans l'étude d'impact.
Le CNTE souhaite "une large participation des parties prenantes, avec adaptation des modalités de concertation selon les composantes du schéma". Les sénateurs eux aussi considèrent que "le succès d'une telle démarche est lié à la co-élaboration de ce schéma entre la région et les différents acteurs du territoire, en particulier les autres collectivités territoriales". Selon eux, "une meilleure coordination des documents d'aménagement nécessite une participation réelle - et non formelle - de l'ensemble des collectivités territoriales".
Enfin, les sénateurs tout comme le CNTE estiment que l'évaluation de ce futur schéma est centrale et devra être portée par une autorité nationale.