Le ministère de la Transition écologique met en consultation un projet encadrant l'utilisation de produits phytopharmaceutiques dans les sites Natura 2000. Le texte prévoit de confier aux préfets l'élaboration de ces règles censées limiter l'utilisation de pesticides dans les sites de ce réseau européen d'aires protégées composé de zones spéciales de conservation et de zones de protection spéciale. La consultation est ouverte jusqu'au 5 juin 2022.
Le ministère précise que ces dispositions concerneront 3 millions d'hectares de superficie agricole utilisée (SAU) dans les sites Natura 2000 français, soit 10 % de la SAU nationale. « La moitié environ est en prairie permanente, avec donc peu ou pas d'usage de produits phytosanitaires », précise le ministère. Au total, la France compte 1 756 sites Natura 2000 terrestres et marins, soit une superficie totale terrestre de 7 millions d'hectares.
Des mesures volontaires ou des arrêtés préfectoraux
Le projet de décret prévoit que « le préfet encadre ou [interdise] l'utilisation des produits phytopharmaceutiques dans les sites terrestres Natura 2000, au regard des objectifs de conservation ou de restauration des habitats naturels et des espèces définis dans les documents d'objectifs ». Toutefois, ces arrêtés ne concerneront que les sites Natura 2000 pour lesquels « cette utilisation n'est pas effectivement prise en compte par les (…) contrats et chartes ».
Ces documents d'objectifs (Docob), rappelle le ministère, définissent les orientations relatives à la gestion de chaque site Natura 2000. Ils reposent sur « une gouvernance impliquant les acteurs du territoire et sur des mesures de protection de la faune et de la flore adaptées aux situations locales, prises essentiellement dans le cadre de contrats et chartes élaborés localement ». Certains prévoient des « mesures de réduction ou d'arrêt volontaires d'utilisation des produits phytopharmaceutiques [formalisées] par des contrats d'aides à la conversion à l'agriculture biologique ou par certaines mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec) ».
Cet encadrement devra être mis en place par des arrêtés préfectoraux qui devront être pris dans un délai de six mois à compter de la publication du décret. Le projet prévoit qu'il puisse être porté à douze mois, « sur décision motivée par la prise en compte de certaines situations particulières ».
Les préfets organiseront des concertations
Concrètement, une instruction sera adressée aux préfets afin qu'ils organisent, pour chaque site, des concertations concernant la restriction de l'usage de pesticides. « À l'issue des concertations menées au niveau départemental (…), les préfets, en l'absence de mesures prises sur une base volontaire, encadreront par voie réglementaire l'utilisation des produits phytopharmaceutiques dans les sites concernés, en lien avec les Régions. »
Ce dispositif, explique le ministère, « garantit l'application systématique des exigences posées par l'article 12 de la directive [de 2009] tout en préservant le modèle contractuel de gestion des sites Natura 2000 qui reste l'approche privilégiée dans la gestion de ces sites ».
Ce texte est proposé en réponse à une décision du Conseil d'État du 15 novembre qui constatait que la France n'avait pas pris de mesures pour restreindre l'utilisation ou interdire l'usage des pesticides dans les sites Natura 2000. Cette limitation est prévue par l'article 12 de la directive relative à l'utilisation des pesticides. La Haute Juridiction avait fixé à six mois le délai de mise en conformité du droit français. Cette décision répondait à un recours déposé par France Nature Environnement (FNE), qui avait demandé au gouvernement, en septembre 2019, de prendre les mesures nécessaires pour mettre en œuvre cette disposition européenne.