
© Tepco
L'avenir de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, accidentée depuis le séisme du 11 mars 2011, commence à sérieusement inquiéter les Japonais. Le 13 avril, Masataka Shimizu, le président de Tepco revenait sur le devant de la scène et présentait ses excuses pour les dommages causés par la catastrophe. Cependant, même pour les Japonais, habitués aux excuses rituelles, la situation semble trop grave pour que cela ne suffise à calmer l'opinion.
En effet, l'exercice s'est achevé avec une séance de question qui a étalé au grand jour le peu de visibilité dont dispose le producteur d'électricité. Questionné sur l'avenir de la centrale, Masataka Shimizu n'a pas été en mesure de fournir des réponses claires et satisfaisantes.
Comptez-vous présenter un calendrier de reprise en main des réacteurs ? "Aussi vite que possible", a répondu le président de Tepco. Avez-vous un projet d'indemnisation des riverains, pêcheurs et agriculteurs touchés par les fuites radioactives ? "On y travaille" a-t-il répondu. Ses réponses évasives ont accentué la pression pesant sur l'opérateur accusé, au choix, d'opacité ou d'incompétence par la presse nipponne.
Trois actions prioritaires pour le trimestre à venir
Cette séance d'excuse catastrophique semble avoir permis à Tepco de mesurer l'ampleur du désarroi des Japonais. Le 17 avril, Tepco a donc finalement présenté un plan décrivant les grandes lignes des mesures de stabilisation de la centrale. Un plan qui, bien que vague, a au moins le mérite d'indiquer la direction et de souligner certains points clés. D'ici trois mois, l'opérateur prévoit l'achèvement des mesures d'urgence.
Concrètement, Tepco espère tout d'abord mettre en place un système de refroidissement stable pour les réacteurs et les piscines de stockage du combustible usé. Cette étape est essentielle pour envisager un refroidissement des réacteurs et un arrêt à froid des installations. L'autre mesure de première urgence est l'injection d'azote afin d'éviter de nouvelles explosions d'hydrogène qui pourraient se produire dans les enceintes de confinement cette fois-ci.
Par ailleurs, l'opérateur compte vérifier l'étanchéité de la cuve du deuxième réacteur et consolider la piscine de stockage du quatrième réacteur, deux infrastructures qui semblent endommagées.
La troisième priorité pour le trimestre à venir est la limitation de la dispersion de la radioactivité. Pour cela Tepco compte créer des lieux de stockage pour les milliers de mètres cubes d'eau hautement contaminée et continuer à répandre de la résine pour fixer au sol les particules radioactives.
Concernant le pompage de l'eau, Tepco a annoncé mardi 19 avril qu'il allait débuter l'évacuation de 10.000 mètres cubes sur les 25.000 qui ont envahit les installations du deuxième réacteur. Cette opération est prévue pour durer 26 jours, selon l'Agence de sûreté nucléaire japonaise (NISA).
Assurer la stabilisation des réacteurs d'ici six à neuf mois
Une fois la première étape accomplie, Tepco prévoit d'assurer le maintien des réacteurs en arrêt à froid. Cette opération, indispensable pour stabiliser la situation, dépend avant tout du succès de la mise en place d'un circuit de refroidissement fiable.
Par ailleurs, la lutte contre la dispersion des éléments radioactifs devrait franchir un cap supplémentaire avec le traitement de l'eau contaminée stockée et la "couverture" des trois réacteurs accidentés.
S'agissant du traitement de l'eau, la présidente d'Areva, Anne Lauvergeon, a annoncé mardi 19 avril que le groupe français avait été retenu pour réaliser l'opération. "Nous allons injecter des produits chimiques dans l'eau contaminée et cette technologie doit permettre aux substances radioactives de se déposer au fond", a-t-elle indiqué, selon l'AFP. L'eau sera alors plus faiblement radioactive et pourrait servir au refroidissement des installations endommagées. L'opération devrait débuter plus tôt que prévu car Anne Lauvergeon a précisé que "Tepco veut […] voir commencer fin mai" ce qu'elle a qualifié d'opérations "d'urgence." L'opération paraît en effet urgente puisque Tepco ne dispose que d'une capacité de stockage de 30.000 mètres cubes, correspondant à la moitié du volume à évacuer.
Enfin, Tepco espère débuter la décontamination des zones situées autour de la centrale.
Démanteler la centrale à plus long terme
Le dernier élément du plan présenté par l'opérateur électrique est le démantèlement de la centrale. La première étape consiste à retirer l'ensemble du combustible présent sur le site, que ce soit dans les réacteurs ou dans les piscines de refroidissement.
Par ailleurs Tepco, envisage de créer une usine de décontamination de l'eau radioactive que prendrait le relais de l'installation qui sera déployée par Areva pour gérer l'urgence.
Quant à la décontamination, le groupe ne donne aucune information sur la façon dont il compte procéder. Il y a deux semaines, le groupe Toshiba avait proposé de réaliser cette opération sur 10 ans. Pour cela, le groupe japonais compte notamment se baser sur l'expérience acquise par une de ses filiales, Westinghouse Electric, qui était intervenu lors de la récupération du combustible endommagé par la fonte partielle du cœur d'un des réacteurs de Three Mile Island en 1979. Reuters rapporte qu'Hitachi, associé à General Electric, serait aussi sur les rangs pour réaliser le démantèlement des six réacteurs.