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AccueilThierry LepercqPhotovoltaïque : n'ayons pas peur de passer à une logique de marché

Photovoltaïque : n'ayons pas peur de passer à une logique de marché

Thierry Lepercq, Président de SolaireDirect, nous propose son avis d'expert sur l'avenir de la filière PV en pleine transition, avec la fin de l'économie administrée, vers une logique de marché.

Publié le 31/03/2012

Jusqu'à il y a à peine quelques semaines il était courant en France de louer la performance allemande en matière d'énergies renouvelables et surtout de photovoltaïque. Quelle réussite ! 25 GW installés dont 3 GW pour le seul mois de décembre 2011 !

Et puis patatras, le 23 février dernier le gouvernement allemand annonce une baisse des tarifs d'achat photovoltaïques de l'ordre de 40% par rapport au niveau de fin 2011 (soit entre 13.5 et 19.5 c/kWh), avec effet quasi-immédiat (9 mars, reporté depuis au 1er avril). C'est la panique au sein de la filière, protestations et manifestations se multiplient, des faillites sont annoncées…

La fin d'une économie administrée

Cette histoire allemande n'est pas sans rappeler la situation française avec le moratoire de décembre 2010, et fait écho à ce qui est arrivé en Espagne, en République Tchèque, et plus récemment en Australie et en Grande-Bretagne. Que se passe-t-il ?

Imaginez une économie où c'est l'Etat qui détermine la forme et le prix d'un produit, agit comme acheteur unique, et distribue ledit produit en échange d'une quasi-taxe. S'agit-il du Gosplan, qui aux beaux jours de l'Union Soviétique déterminait la taille et le prix des chaussures noires qu'on devait produire chaque année, et qui a eu les résultats que nous connaissons ? En fait c'est aussi la manière dont l'économie du photovoltaïque a fonctionné en Europe depuis 2000.

Un système habilement conçu pour permettre l'émergence d'une énergie coûteuse et marginale a littéralement implosé avec la très forte baisse des coûts des cellules et modules et le boom des volumes.

La « dette solaire » européenne, c'est-à-dire les surcoûts déjà contractés (sur 20 ans en général) pour les installations photovoltaïques existantes, dépasse aujourd'hui les 300 milliards d'euros (dont 180 milliards pour l'Allemagne et 20 milliards pour la France) pour à peine plus de 1% de l'électricité générée dans l'Union : le système est arrivé à son terme.

Ce que nous vivons en fait c'est la transition – chaotique – d'un système administré vers un système de marché, avec des dégâts collatéraux majeurs sur une filière dont la grande majorité des acteurs qui n'ont pas su anticiper cette transition.

Quelques principes économiques de base

Comment en est-on arrivé là ? L'économie de marché à ses règles, et les ignorer peut avoir de très graves conséquences :

  • La fixation administrative des tarifs et l'obstruction des signaux prix, qui doivent normalement permettre l'ajustement de l'offre et de la demande, peut conduire à l'explosion des volumes sans contrepartie ;
  • Un régime de subvention sans enveloppe – ce qui est le cas d'un système de tarif d'achat sans plafond, peut conduire à partir d'un certain seuil à la faillite de la collectivité qui en assume la charge ;
  • La priorité d'injection sur le réseau et l'intermédiation obligatoire par l'Etat (ou son représentant EDF AOA dans le cas français) de la relation producteur-consommateur d'énergie est un obstacle à une intégration harmonieuse d'installations décentralisées et intermittentes et découragent les innovations technologiques et de services (notamment en matière de smart grid).

Beaucoup d'acteurs du solaire récusent la logique de marché aux motifs que d'autres formes d'énergie ont fait l'objet ou font l'objet de subventions directes ou indirectes. Mais ces plaintes seraient recevables si le solaire était effectivement – injustement - condamné à une impasse. Or c'est loin d'être le cas.

La question est de savoir si  peut-on passer à un système réellement soutenable, sans subvention, et si la filière doit avoir peur d'un basculement d'une logique administrée à une logique de marché ? En fait, si on met les choses en perspective, la situation actuelle est très prometteuse.

Les perspectives immenses de l'électricité solaire compétitive, dans une logique de marché

Grâce à la baisse des coûts du silicium (25 $/kg sur le marché spot aujourd'hui contre près de 500 $/kg en 2008), et les investissements considérables d'acteurs comme Hemlock (Etats-Unis), Wacker (Allemagne), OCI (Corée) et GCL Poly (Chine), le coût des cellules et modules (qu'ils soient produits en Chine ou ailleurs) a baissé de 80% en 4 ans. Le BOS (Balance-of-System, systèmes électriques principalement) connait lui aussi une forte baisse.

Chez Solairedirect nous sommes déjà en mesure, dans le cadre de contrats récemment signés de fourniture de gré à gré portant sur plus de 120 MW avec des compagnies d'électricité et des grands utilisateurs en France et plusieurs pays émergents (Inde, Chili, Afrique du Sud…), de produire de l'électricité solaire à 100 euros/MWh, soit moins que le prix payé par le particulier en France.

Notre feuille de route nous conduit vers 70 euros/MWh en 2014, un niveau comparable au prix de gros dans la plupart des pays – et sensiblement inférieur à toutes les autres formes d'énergies pour des installations nouvelles, à l'exception du gaz de schiste : c'est bientôt au tour des autres sources d'énergie de se faire du souci !

Le message est clair : le solaire photovoltaïque est en passe de devenir pleinement compétitif, de sortir du ghetto écologique qui l'a vu naitre et rejoint maintenant le vaste monde des énergies dites conventionnelles, avec lesquelles il peut désormais pleinement se mesurer.

Dans cette transition, la logique de marché n'est pas l'ennemie du solaire, elle est son meilleur allié. Vendre son électricité dans le cadre de contrats à long terme (CVES ou Contrats de vente d'Electricité Solaire) ou sur le marché est la meilleure manière pour les producteurs solaires d'assurer la pérennité de leur modèle économique, et de l'enrichir, notamment avec des innovations permettant une meilleure intégration au réseau et le développement de services énergétiques.

La course est ouverte pour le développement de nouvelles offres et nouveaux modèles économiques autour de la production décentralisée d'électricité propre. L'avenir s'annonce très prometteur pour les acteurs du solaire qui n'auront pas peur de traverser le Rubicon et aller à la rencontre des énergéticiens et consommateurs d'énergie lesquels, l'expérience de Solairedirect l'atteste, sont en très forte demande de fourniture sécurisée d'électricité solaire compétitive et intelligente, sur le long terme.

Avis d'expert proposé par Thierry Lepercq, Président de SolaireDirect

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8 Commentaires

Energiestro

Le 02/04/2012 à 10h20

J'adhère parfaitement à cette opinion. Les subventions à l'énergie photovoltaïque sont un gaspillage d'argent public qui va durer des décennies. L'Etat n'a pas à favoriser une technologie plutôt qu'une autre. Il aurait dû lancer des appels d'offre pour acheter de l'énergie renouvelable au meilleur prix...

En revanche, le marché du solaire photovoltaïque restera limité tant qu'il n'y aura pas de solution de stockage bon marché. Maintenant le coût du stockage par batterie est devenu supérieur au coût de production photovoltaïque ! C'est pourquoi Energiestro (mais aussi bien d'autres sociétés) développe des solutions de stockage à faible coût.

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DL

Le 02/04/2012 à 10h41

très encourageantes perspectives. Mais il faut mettre un terme aux CEE (certificats d'économies d'énergie) Ces CEE permettent aux producteurs d'énergie de se dispenser de leurs obligations d'économies fixées par l'état. C'est ainsi que lorsque l'on produit 1000kwh d'électricité phv, la vente des CEE correspondants fait qu'on n'a pas diminué d'1 g la production de CO2; au contraire l'énergie grise des panneaux + celle des installations relais rend le bilan CO2 du phv négatif.
Il faut absolument mettre un terme aux CEE...

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Edi

Le 02/04/2012 à 12h08

Oui, sur le principe de la libre concurrence. Mais est-elle vraiment libre ?
Le secteur de l’énergie, qui est tributaire de politiques publiques et d’investissements massifs, est il comparable à d’autres secteurs d’activité ?
En raison de la présence historique d’oligopoles, qui n’ont aucun intérêt à céder des parts de marché. Ce qui est, de leur point de vue, d'une « logique économique cohérente».
Les politiques publiques actuelles, amènent à protéger ces leaders nationaux. Ce qui semble être aussi dans la « bonne logique économique ".
Comment en est on arrivés là ? En raison de la culture "centralisatrice" et de la « monoculture » nucléaire.
Oui, il faut à présent faire l'inverse et investir rapidement et massivement sur les technologies d’avenir, moins risquées et bientôt moins chères : le solaire photovoltaïque et l’éolien. Qui favorisent également les productions décentralisées et le "produire/consommer local".
Mais à court terme, qui peut survivre sur un marché aussi instable et soumis à de tels soubresauts ? Non pas liés à des évolutions technologiques logiques, mais à des choix politiques, économiques et parfois protectionnistes.
Dans cette période transitoire et en attendant la parité réseau, seule une régulation et des aides ciblées (et raisonnables), peuvent garantir l’émergence de filières Européennes.
Pour une vraie concurrence, il faut que tous les acteurs puissent participer et non seulement à quelques heureux élus.

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Georges Audras

Le 02/04/2012 à 15h17

C'est facile de tirer sur les subventions maintenant que le prix du PV a baissé suite à une énorme augmentation de la production de masse. Mais comment cette progression aurait-elle eu lieu sans les subventions que vous critiquez ???
Le marché de l'énergie est le moins libre des marchés. Maintenant que SolaireDirect a réussi à se faire une place au soleil, il entend faire mourir au plus vite les plus petits concurrents qui n'ont pas les mêmes sources de financement massif. Nous aussi on sait proposer 100 €/MWh même avec une installation de 100 kWc mais quel industriel va investir 200 k€ pour avoir un kWh à 10cts pendant 20 ans ? Il leur faut un retour d'investissement en 4 ans... Ah, si j'avais qqs millions d'euro à disposition, j'en ferais des installations !

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Voltaico

Le 03/04/2012 à 11h46

Trés facile de le proposer, aprés que l'on a comme vous bénéficier de tous les meilleurs tarifs de rachat, de partenaire financier pour ce dévelloper. Mais quel serait votre discours aujourd'hui si vous aviez débuté votre activité en 2010.

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VD69

Le 03/04/2012 à 12h41

Depuis le départ j'ai toujours été opposé au financement des équipements par les consommateurs d'électricité. Si nous avions consacré la même somme à la recherche, nous serions dans le peloton de tête au niveau technologique et donc bientot commercial.
Au lieu de celà, nous sommes encombrés de matériels déjà obsolètes qui nous ont fait perdre un max de devises.
Mais il était urgent de satisfaire les utopistes qui sont aussi électeurs et n'ont pas percuté qu'ils paieraent leur électricité plus cher pour payer les chinois.

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Jmdesp

Le 03/04/2012 à 19h49

Je suis tout à fait en faveur d'un marché dérégulé, où les prix dépende de l'efficacité réelle de chaque techno et non plus de décision administrative, centralisées, mais :
- par rapport aux chiffres cités, aujourd'hui EDF revend son électricité nucléaire à 42€/MWh, avec un tarif prévu en 2016 de 46€ que Proglio se contente d'espérer monter à 50
- l'électricité hydraulique, deuxième poste de production français en volume après le nucléaire, est encore moins chère
- Ca sera donc très dur pour le PV de sortir son épingle du jeu dans une dérégulation. Même si le coût de production diminue fortement, la production prend la forme d'un pic extrêmement centré sur le créneau horaire de 12h. La conséquence sauf protection artificielle du marché est que les prix de marché chute au moment où le solaire rend l'énergie très abondante vers 12h. Ou alors la production doit être "cappée" pour empêcher une surproduction le midi, mais ça condamne le solaire à être un acteur minoritaire.
L’Allemagne aujourd'hui est à la limite avec pourtant juste 5% de solaire, le volume solaire supprime la pointe de midi, plus de volume obligerait les autres production à faire de la place, soit guerre des prix jusqu'à ce que l'un renonce à produire. Ca a un peu commencé, le solaire en est protégé par les prix et achats garantis.

Le nucléaire a un peu le même problème avec sa production de nuit, vendue à prix cassé, sauf que lui produit 24/24, pas sur un seul créneau qui finit rapidement par être saturé.

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Georges Audras

Le 06/04/2012 à 10h55

Avec tous les problèmes que vous citez et tous ceux que vous ne citez pas que pose un marché dérégulé, pourquoi êtez-vous encore favorable à un marché dérégulé de l'électricité ??!
La théorie fumeuse qui voudrait que le client en retire le meilleur prix est très largement contredite par la réalité. Cette libéralisation est purement dogmatique et coute très cher.

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