« Le commerce illégal d'espèces sauvages demeure une menace importante pour la biodiversité et la sécurité tant dans le monde que dans l'UE, et le plan d'action reste un outil important et pertinent pour y remédier. » Telle est la conclusion de l'évaluation réalisée par la Commission européenne sur le plan d'action qu'elle avait lancé en 2016, pour la période 2016 à 2020. Une manière de dire que de nombreux progrès restent à faire, même si ce plan a eu une action bénéfique certaine. Parmi les axes de progrès identifiés figure la prise en compte des points suivants : l'évolution des trafics au cours du temps, leur incidence sur les communautés locales, la croissance du commerce en ligne ou encore le manque de moyens des autorités chargées des contrôles.
C'est la raison pour laquelle Bruxelles a adopté, le 10 novembre, un
Un trafic qui favorise les zoonoses
Le commerce illégal d'espèces sauvages a plusieurs effets négatifs. Il porte une atteinte directe à la biodiversité et peut conduire à l'extinction de certaines espèces ; il prive les communautés locales de formes de revenus légales et durables et il favorise les zoonoses, dont le Covid-19 est une triste illustration. « Selon le rapport mondial sur la criminalité liée aux espèces sauvages, publié en 2020, par l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime, le trafic d'espèces sauvages touche tous les pays du monde et un large éventail d'espèces, allant des anguilles aux pangolins en passant par le bois de rose », rappelle la Commission.
« Au-delà du caractère international de ces enjeux, l'action de chaque pays sur son territoire est essentielle, confirme le comité français de l'UICN. Dans la géographie des trafics d'espèces sauvages, la France est à la fois un pays source, un pays de destination et une plaque tournante de flux internationaux illicites », ajoute l'ONG qui publie, ce 14 novembre, ses recommandations pour lutter contre ce trafic.
Renforcer la chaîne répressive
Le plan de l'UE repose sur quatre piliers : la prévention, l'application de la législation, le renforcement des partenariats mondiaux et le renforcement du cadre légal. « Le nouveau plan met davantage l'accent sur le renforcement des capacités tout au long de la chaîne répressive, notamment par la formation, le partage des données et la spécialisation de la police, des juges, des procureurs et d'autres acteurs clés de l'application de la loi », explique la Commission.
Le plan prévoit également d'examiner la faisabilité d'un renforcement des législations européennes en matière de commerce des espèces sauvages. La législation actuelle repose sur un ensemble de textes : règlements qui mettent en œuvre les dispositions de la Cites dans l'UE, directives Nature (Oiseaux, Habitats, Zoos), règlement sur les espèces exotiques envahissantes et directive relative à la protection de l'environnement par le droit pénal.
Le Fonds international pour la protection des animaux (Ifaw) accueille très favorablement cet engagement de la Commission. « Il s'agit notamment d'instaurer une liste des animaux de compagnie exotiques autorisés au sein de l'UE, dite liste positive. Ces dispositifs permettraient aussi de combler un vide juridique en interdisant le commerce de toutes les espèces arrachées illégalement à leur milieu naturel, en vertu des législations nationales et internationales en vigueur au sein des pays d'origine, de transit et de destination desdites espèces », explique l'ONG.
« Il est particulièrement encourageant de voir le plan d'action appeler à des sanctions dissuasives pour la criminalité liée aux espèces sauvages et souligner l'importance de la cohérence dans leur application dans les 27 États membres de l'UE », réagit Dr Annamaria Balogh, chef du projet Réussir les poursuites contre les crimes contre les espèces sauvages en Europe chez Traffic. « Nous sommes également positifs, ajoute la représentante de l'ONG, quant aux tentatives du plan de créer des synergies avec plusieurs autres politiques pertinentes de l'UE, dont certaines sont encore en cours d'adoption, telles que la criminalité environnementale, les accords de libre-échange et la lutte contre la déforestation induite par l'UE, car, tous ensemble, ils sont fondamentaux pour l'intégration et la réalisation des objectifs généraux du plan d'action révisé. »
Prévenir les zoonoses
La stratégie présentée par la Commission prévoit également de mieux prendre en compte la santé dans le commerce des espèces sauvages, compte tenu des risques présentés par les zoonoses. Cette prise en compte sera permise par l'adoption de l'approche One Health.
Afin de mieux répondre à la croissance du commerce en ligne, elle prévoit par ailleurs de s'appuyer sur la future législation sur les services numériques qui devrait permettre de fournir aux services de contrôle les outils nécessaires à la lutte contre le trafic d'espèces sauvages. Ce point, précise l'Ifaw, sera abordé à travers des lignes directrices, mais aussi une formation spécifique pour les organismes chargés de l'application de cette législation, ainsi que par la collaboration de cette ONG avec le WWF et Traffic, à travers la Coalition pour mettre fin au trafic d'espèces sauvages en ligne.
Enfin, alors que la Commission a mené de nombreuses concertations avant d'adopter ce plan révisé, notamment via une consultation du public lancée en octobre 2021, elle appelle à un partenariat resserré de l'UE et de ses États membres avec les organisations internationales, les ONG et le secteur privé.